Conseils d’amis européens

Publié le 8 juillet 2007 Lecture : 3 minutes.

Contrairement aux précédents, le sommet d’Accra n’a pas brillé par la présence des partenaires étrangers. Pas de Mahmoud Ahmadinejad (Iran) ou d’Hugo Chávez (Venezuela), comme à Banjul en 2006, pas de Ban Ki-moon, le secrétaire général de l’Onu, ou de Mahmoud Abbas, le président palestinien, comme à Addis-Abeba en janvier dernier. Seuls les Européens ont fait le déplacement. Invité d’honneur, le Premier ministre portugais José Socrates (voir pp. 20-21) est arrivé dans la capitale ghanéenne le 2 juillet, le lendemain de sa prise de fonctions en tant que président en exercice de l’Union européenne (UE). Fidèle au poste depuis plusieurs années, Louis Michel, commissaire européen au Développement et à l’Aide humanitaire, était, cette fois, accompagné de son « patron », José Manuel Barroso. Qui nous a fait part, en fin connaisseur des problèmes d’intégration, des écueils dont l’Afrique pourrait faire l’économie dans sa marche vers l’union.
« L’expérience de l’UE en matière d’intégration économique et politique est de loin la plus poussée de l’histoire. Il faut que les Africains en tirent des enseignements. Je crois que leur grande vision des États-Unis d’Afrique n’est pas incompatible avec des petits pas concrets et pragmatiques de rapprochement économique. Il leur faut les deux approches. Il est certes plus facile de commencer par une intégration graduelle, mais rien n’empêche d’avoir de grandes ambitions. C’est comme cela que nous, Européens, avons réussi. Les analogies entre nos deux ensembles ne sont pas forcément absurdes. Les différences de développement entre des régions reculées de Pologne et les grandes villes allemandes sont parfois bien plus grandes qu’entre les régions d’Afrique. Je fais partie des idéalistes. »
Les Européens se sont aussi félicités de la tenue du deuxième sommet Europe-Afrique, prévu les 8 et 9 décembre prochain à Lisbonne. Bloquée depuis sa première édition, en avril 2000, au Caire, pour cause de boycottage du Zimbabwéen Robert Mugabe par l’UE – le Royaume-Uni en tête -, la grand-messe devrait avoir lieu sous la présidence portugaise de l’UE. Pragmatiques et désireux de renforcer les liens avec les pays lusophones du continent, les Portugais uvrent depuis plusieurs mois pour faire en sorte que le cas Mugabe ne vienne plus perturber les relations entre les deux continents. « Il est étrange, note Barroso, que l’Europe et l’Afrique n’aient pu avoir de dialogue politique au plus haut niveau depuis sept ans. Même si nous avons continué à travailler ensemble. Nous sommes son premier partenaire au développement. »
Les Africains ont fait bloc autour du « camarade Bob », et c’est du côté européen qu’il a fallu faire preuve de pragmatisme. « Il existe des exceptions à l’interdiction de voyager que nous pouvons utiliser pour Robert Mugabe, explique un diplomate portugais. Si les Britanniques ne veulent pas venir, ce sera leur problème. » Heureux du dénouement diplomatique, Louis Michel détaille déjà l’ordre du jour du sommet : « Nous allons parler sécurité énergétique, changement climatique, migrations, gouvernance, et tenter de structurer un dialogue permanent entre l’UA et l’UE. » Selon lui, la question centrale des migrations doit être abordée d’une tout autre manière qu’aujourd’hui. « Il faut positiver cet enjeu. Les gens voyagent, bougent, se déplacent. C’est normal. Il faut mettre en place ensemble des centres de gestion et d’information, mieux gérer les diasporas et voir comment les Européens peuvent offrir des contrats aux Africains dans l’économie formelle. »
Autre sujet sensible : la bonne gouvernance. « Nous pensons que l’Afrique a un besoin crucial de capacités d’État, que les dirigeants doivent pouvoir offrir à leurs concitoyens les services inhérents aux fonctions régaliennes de l’État. Nous devons les y aider », soutient-il. Avant d’ajouter : « Plus profondément, nos relations doivent évoluer d’un rapport de dépendance donateur-bénéficiaire à des rapports entre partenaires égaux. Parlons franchement : l’Afrique doit se développer dans son propre intérêt, mais aussi dans le nôtre. Et, à mesure que l’UA se renforce, nous y gagnons tous. Nous pouvons discuter d’égal à égal avec un partenaire clairement identifié et qui va continuer à s’intégrer, quel que soit le temps que cela prendra. » Dans ses décisions finales, la conférence des chefs d’État de l’UE a adopté « les grandes lignes de la stratégie conjointe Afrique-UE comme base pour l’élaboration du plan d’action adéquat devant être adopté au sommet Afrique-Europe de Lisbonne ».

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