Un coup de main pour la paix

Publié le 8 mai 2005 Lecture : 3 minutes.

Le 29 avril 2005, il a suffi d’une simple poignée de main entre Hu Jintao, le chef du Parti communiste chinois (PCC), et Lien Chan, président du Parti nationaliste de Taiwan, la principale formation de l’opposition dans l’île, pour mettre fin à soixante ans de guerre larvée et changer radicalement la donne politique de cette zone du Pacifique.

Depuis la réélection de justesse, l’an dernier, du président indépendantiste taiwanais Chen Shui-bian, la tension n’avait cessé de monter entre les deux rives du détroit. Prêts à tout, les parlementaires chinois avaient même adopté une loi « antisécession » justifiant une intervention « non pacifique » contre Taiwan au cas où l’île rebelle déclarerait son indépendance.
Premier signe positif d’une possible détente, le 26 mars, après que 300 000 personnes furent descendues dans les rues de Taipei pour manifester contre la loi chinoise : on eut alors la surprise d’entendre Xu Wenlong, homme d’affaires influent et ami intime de Chen Shui-bian, mettre en garde le président contre une indépendance qui équivaudrait à engager l’économie de l’île dans une impasse. Il se faisait en l’occurrence le porte-parole des Taiwanais qui ont massivement investi en Chine, surtout à Shanghai et ont tout intérêt à améliorer leurs relations avec Pékin.

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Hu Jintao, conscient de ce changement de l’opinion, a saisi l’occasion pour tendre un rameau d’olivier à deux partis d’opposition, le Kuomintang de Lien Chan et le Parti du peuple dirigé par James Soong, en déclarant que Pékin était prêt à accueillir tous ceux qui voudraient abandonner leur position indépendantiste.
Un mois plus tard, le 26 avril, Lien Chan débarquait à Nankin pour une visite historique de huit jours, la première d’un homme politique taiwanais de cette importance sur le continent depuis presque un demi-siècle. Au programme : un entretien à Pékin, le 29 avril, avec le numéro un chinois, un communiqué conjoint exprimant une commune détermination de « s’opposer ensemble à l’indépendance de Taiwan » et même un dîner privé, très rare dans les us locaux.
Le cadeau fait par Pékin de deux pandas « au peuple taiwanais », l’ouverture des marchés à l’importation des fruits pour les paysans de l’île et les débuts du tourisme chinois à Taiwan ont été accueillis favorablement de part et d’autre.
Lien Chan lui-même a été surpris par la foule très chaleureuse venue spontanément l’acclamer. En outre, son discours à l’Université de Pékin, très applaudi par des étudiants connus pour leur engagement en faveur de la démocratie, a été retransmis dans l’intégralité du pays. Les plus optimistes y voient un signe que « le retour » des nationalistes pourrait promouvoir la démocratisation de la Chine continentale.
Toujours est-il que Chen Shui-bian, déjà travaillé au corps par Washington, qui redoutait les conséquences d’un éventuel conflit entre les deux Chines, a maintenant compris qu’il ne parviendrait jamais à réaliser son rêve de devenir « le père » d’une nation taiwanaise indépendante.

Il avait voulu faire croire aux Taiwanais qu’il leur fallait bannir tout rapprochement avec le continent et que seule l’indépendance les sauverait, sous le « parapluie » américain. Mais il a échoué à les convaincre, comme le prouve un sondage selon lequel 66 % des Taiwanais soutiennent désormais cette méthode de « détente » par des visites mutuelles.
Chen Shui-bian, qui les a entendus, a décidé de changer de tactique en n’hésitant plus à appeler au dialogue, voire à annoncer son prochain voyage en Chine continentale… Au point qu’il est désormais une plaisanterie qui circule : le rêve du père de Taiwan brisé, Chen Shui-bian l’aurait-il remplacé par un autre : celui de prix Nobel de la paix ?

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