Senghor, un homme d’exception

Publié le 8 janvier 2006 Lecture : 2 minutes.

L’année 2006 sera celle de la Francophonie, mais aussi celle de Léopold Sédar Senghor, décédé le 20 décembre 2001 et dont on fêtera, le 9 octobre, le centième anniversaire de la naissance. Mais, déjà, avant l’ouverture des cérémonies qui marqueront cet événement, un bel hommage est rendu à l’ancien président sénégalais sous la forme d’un livre aussi original que documenté.
À la différence de bien des biographies, construites de façon linéaire, l’ouvrage de Jean-Michel Djian, journaliste et enseignant à l’université de Paris-VIII, est composé d’une série d’instantanés illustrant chacun à la fois la pensée, la personnalité et l’oeuvre politique ou littéraire de Senghor. Pas de titres de chapitres, mais, en lieu et place, des manières d’incipit qui donnent un avant-goût des thèmes traités. Exemples : « Le poète se réveille en lui quand il en décide. Une voix, un silence, une lecture, un paysage. Un stade. » « Ses humanités gréco-latines sont une sève. » « Les années passant, le président poète cherche à styliser l’exercice du pouvoir. » « Sa négritude est une ritournelle guerrière. Elle use des canons de la pensée pour viser juste. Elle fait mouche. »
Ainsi conçu, le livre dévoile la complexité de cette immense figure du xxe siècle. « Un homme d’exception capable de défier l’histoire tout en tombant parfois dans les travers les plus convenus des pratiques politiciennes », écrit l’auteur. Il en ressort l’image d’un être tourmenté, à la fois grisé par les honneurs qu’il accumule et convaincu de la vanité de son oeuvre. Il a souvent pensé au suicide, semble-t-il. Les malheurs de la vie ne l’auront au demeurant pas épargné. Ainsi la mort brutale de deux de ses fils assombrira-t-elle ses vieux jours.
Plus que son combat pour la « civilisation de l’universel » et sa défense des valeurs négro-africaines, c’est l’amour de Senghor pour la langue française qui est le fil conducteur de l’ouvrage de Jean-Michel Djian. À la qualité du récit, dont le style enlevé n’est pas sans rappeler celui avec lequel un Frédéric Mitterrand raconte la vie des grands de ce monde, s’ajoute la richesse des documents iconographiques, dont beaucoup d’inédits : photos de l’ancien président et de ses proches, manuscrits autographes, correspondances en tout genre… Le livre s’achève en apothéose par un entretien récent avec Aimé Césaire. Le vieux compère de Senghor revenant, entre autres, sur leur première rencontre à Paris en 1931 et sur leur invention commune du terme « négritude ». Succulent !

Léopold Sédar Senghor. Genèse d’un imaginaire francophone, de Jean-Michel Djian, préface d’Abdou Diouf, éditions Gallimard, 256 pages, 25 euros.

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