Fest’Africa : N’Djamena malgré tout

Peu de moyens mais beaucoup de volonté pour donner vie à cette rencontre entre artistes et intellectuels du continent.

Publié le 8 janvier 2006 Lecture : 2 minutes.

N’Djamena a accueilli du 15 au 28 décembre dernier une dizaine d’écrivains dans le cadre de Fest’Africa. Créé en 1993 à Lille (France), où il se tient chaque année en novembre, ce festival révèle et accompagne les plumes africaines grâce à l’implication du Tchadien Nocky Djedanoum et de l’Ivoirienne Maïmonua Coulibaly. En 2003, Nocky Djedanoum, le directeur artistique, se lance dans une nouvelle aventure : « Fest’Africa sous les étoiles à N’Djamena ». Une biennale dont la première édition a réuni dans la capitale tchadienne une cinquantaine d’auteurs venus du continent et de la diaspora.
Plus hésitante fut celle de 2005. Un défi même. « J’ai été tenté de la reporter, avoue Nocky dans son discours inaugural. L’État tchadien n’a manifesté que tard son intérêt. Monsieur le représentant du gouvernement, poursuit-il en se tournant vers le ministre de la Culture et de la Communication, Moussa Doumngor, ne voyez-vous pas que la jeunesse a besoin d’un toit, d’un certain égard ? »
En déclarant : « J’ai honte pour mon pays, mais je te rêve debout », Nocky exprime tout le malaise d’une jeunesse délaissée. C’est sur un terrain vague, dans le quartier de Moursal, que des palissades ont été dressées pour servir de stands aux libraires, aux peintres et aux tables rondes.
Côté débats, il y eut de forts moments d’échanges. Les écrivains togolais Kangni Alem et Sami Tchak ont débattu avec la traductrice kényane Eva Rogo Lévénez du sujet de « La diaspora africaine face aux questions de l’émigration », le tout devant un public très au fait de l’actualité française, des incendies à Paris et « des Africains qui échouent comme des baleines aux frontières de l’Europe ». « Avec tout ça, a déclaré avec colère un intervenant, nous ne devons plus accepter les Français chez nous. » Réaction presque résignée de Kangni Alem : « Ce sera toujours ainsi tant que l’Afrique ne proposera pas d’alternative à ses enfants. Et nous ne sommes pas en position de force. »
Grand intérêt également pour la question de la littérature tchadienne contemporaine qui, selon Ahmad Taboye, enseignant universitaire et auteur d’un Panorama critique de la littérature tchadienne, évolue très faiblement. « Les écrivains ne bénéficient d’aucune structure ni d’une quelconque forme de soutien. Et cela n’est pas sans conséquences sur l’enseignement dans les écoles et dans les universités du pays qui ont besoin d’être réformées. »
Par ailleurs, une visite a été organisée dans le cadre de cette deuxième édition – articulée autour du thème de la diversité culturelle – au musée Sao Kotoko du village des potiers de Gaoui. Et une trentaine de groupes tchadiens parmi lesquels Jorios Stars, Guévara Radjil Fall, Samuraï, Djospa, les danseuses de Guelbé et Audrey Linda Shey ont servi sur scène une ambiance de reggae, rap, soukous et de gourna. Fest’Africa s’est clôturé dans la bonne humeur. Avec l’espoir qu’il y aura, en 2007, de meilleures conditions logistiques et… financières.

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