Bourse panafricaine : quelle voie choisir ?

Publié le 7 décembre 2008 Lecture : 3 minutes.

Contrairement à bien des propos rassurants, les Bourses africaines n’ont pas été épargnées par la crise financière internationale. Dans la semaine du 7 octobre, l’indice All Share de la Bourse de Nairobi a reculé de 4,29 % et celui du Johannesburg Stock Exchange (JSE) a plongé de 16 %. Toutes n’ont cependant pas été affectées de la même manière. Leurs réactions sont directement liées au poids des investisseurs internationaux dans leur capitalisation. La situation a conduit ces investisseurs, essentiellement des fonds de pension ou d’investissement américains et britanniques, à vendre rapidement les actions qu’ils détenaient pour retrouver des liquidités.

La Place boursière de Tunis est celle qui a le mieux résisté à ces désinvestissements, notamment parce qu’elle est l’une des moins spéculatives – elle présente un PER moyen de 10, à comparer avec un PER de 30 à Lagos, par exemple. En outre, les investisseurs institutionnels locaux se sont massivement substitués aux fonds étrangers. Des opérations qui ont pu se produire sans encombre : la Banque centrale de Tunisie s’est montrée très coopérative, transférant sans rechigner les devises. Ce faisant, elle a démontré aux yeux des étrangers la liquidité de l’investissement boursier dans ce pays. Très spéculative, la Bourse de Lagos a perdu près de 20 % la première semaine. La Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM), à Abidjan, a perdu 10 % en novembre, le nombre insuffisant d’investisseurs locaux s’ajoutant à son habituel problème de liquidité des titres.
Cette crise montre une nouvelle fois que les Bourses africaines sont insuffisamment armées pour être en mesure d’attirer des investisseurs internationaux et locaux et leur offrir à la fois sécurité, liquidité et rendement élevé. Une place boursière tire avant tout son utilité de la dimension de son marché primaire, ou marché de l’émission. Il est le lieu de financement non inflationniste de l’économie sous deux formes essentielles, emprunts obligataires et actions. Le marché secondaire, qui offre aux investisseurs des supports de placement liés à des anticipations de natures diverses, est, lui, forcément spéculatif.
En 2007, la capitalisation boursière africaine représentait moins de 2 % du total mondial. Première place du continent avec 75 % de la capitalisation africaine, le JSE arrive 19e dans le monde. D’où l’idée d’intégrer les Bourses africaines dans un ensemble qui pèserait plus lourd à l’international. Le projet de création d’une Bourse panafricaine a d’ailleurs fait l’objet d’un séminaire d’experts qui s’est tenu au début de novembre à Addis-Abeba, sous l’égide de l’Union africaine. Reste à savoir quel chemin emprunter pour y parvenir. Les anglophones considèrent qu’il est impératif de développer avant tout une Bourse « chez soi ». C’est une question de « statut » pour le pays, qui se doit d’être proche de ses agents économiques et de développer une culture boursière locale avant d’envisager quelque rapprochement que ce soit. La sensibilité francophone est au contraire d’aller directement vers des Bourses régionales. Cette solution présente notamment l’inconvénient de l’appropriation de l’outil par tous les pays membres. La domination des entreprises ivoiriennes à la BRVM (34 sur 38 sociétés cotées) témoigne de cette difficulté.

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Régionales ou pas, les Bourses africaines sont faibles, tant en nombre d’entreprises cotées qu’en volume de transactions. Ce qui pose par ailleurs des problèmes de financement et de rentabilité de l’infrastructure. Certes, des initiatives voient le jour, qui traduisent une volonté de faire évoluer la situation. En Afrique de l’Est, par exemple, les Bourses nationales coopèrent activement entre elles. La Bourse de Nairobi et celle de Dar es-Salaam ont harmonisé leurs conditions de cotation, et déjà quatre sociétés de ces pays font l’objet d’une cotation transfrontalière. Quelle que soit la voie choisie, le chemin vers la création d’une Bourse panafricaine sera forcément long et plein d’obstacles. Citons, entre autres, les restrictions de change, l’inconvertibilité des monnaies, l’absence d’harmonisation du droit des affaires et des réglementations des marchés financiers.

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