Six candidats pour un fauteuil

Ces hommes briguent la magistrature suprême. De leurs alliances ou de leurs divisions dépend la physionomie du nouveau paysage politique nigérien.

Publié le 7 novembre 2004 Lecture : 5 minutes.

Le 16 novembre, près de 5 millions d’électeurs auront à choisir le prochain président parmi six candidats. Si aucun postulant ne décroche la majorité absolue des suffrages, un second tour est prévu pour le 4 décembre, date retenue également pour le scrutin législatif. Il opposera les deux prétendants ayant réalisé les meilleurs scores. En course, deux colonels à la retraite, dont le président sortant, un ancien président de la République et trois ex-Premiers ministres. Voici leurs portraits, ainsi que l’évaluation du poids électoral des partis qui les ont investis.

Mamadou Tandja
Né en 1938 dans l’est du Niger, cet ancien colonel participe en 1974 au putsch contre le président élu, Hamani Diori. Ce qui lui vaut d’être nommé ministre de l’Intérieur du
régime du colonel Seyni Kountché. En 1991, il choisit de quitter l’uniforme pour se consacrer exclusivement à la politique et au sauvetage de l’ancien parti unique, le Mouvement nigérien pour la société de développement (MNSD-Nassara),menacé par le vent démocratique qui souffle en Afrique francophone, à la faveur des conférences nationales.
Après avoir échoué à deux reprises dans la course à la magistrature suprême, battu par Mahamane Ousmane en 1993, puis par le général Ibrahim Maïnassara Baré en 1996, il remporte
la présidentielle de 1999, et postule pour un deuxième et dernier mandat. Privilégiant le monde rural à la ville, l’action au discours, il a été investi par la première force politique du pays, le MNSD-Nassara. Il peut compter sur le soutien de plusieurs chefs
d’État voisins.
Tandja a été élu président de la République en 1999 avec 1 060 295 voix, soit 59,9% des suffrages. Son parti, le MNSD, est la première force politique, avec 38 sièges à l’Assemblée nationale. Lors des municipales de juillet 2004, dernières élections en date, le parti de Tandja a recueilli 734 267 voix, soit près de 31 % des suffrages.

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Mahamadou Issoufou
Ancien président de l’Assemblée nationale, il fut brièvement Premier ministre sous la présidence de Mahamane Ousmane, en 1994. Natif de la région de Tahoua, il est, à 52 ans,
considéré comme le leader de l’opposition du fait de sa présence au second tour lors de la présidentielle de 1999. Il doit également ce statut au fait que sa formation, le Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS-Taraya), constitue la première force politique d’opposition au sein des instances élues, notamment au Parlement où il dispose
de 17 sièges sur 80. Réputé pour la fermeté de ses convictions, il avait bruyamment claqué la porte de la primature en 1994, contraignant ainsi le président Mahamane Ousmane
à une difficile cohabitation avec le MNSD, situation qui avait provoqué le coup d’État militaire du 27 janvier 1996.
En recueillant 435 041 voix (22,8 %) au premier tour de la présidentielle de 1999, Issoufou était présent au second tour où il totalisa 40,1 % des suffrages. Son parti, le PNDS, occupe la troisième position par le nombre de sièges à l’Assemblée avec 16 députés. Mais les élections locales de juillet 2004 ont confirmé la deuxième place de son parti dans le paysage politique. Le PNDS a réuni 502 986 suffrages, soit un peu plus de 21 % des votants.

Mahamane Ousmane
Né à Zinder le 20 janvier 1950, Mahamane Ousmane a achevé ses études d’ingénieur en statistique à Paris en 1978. Il a occupé plusieurs postes à responsabilité avant de créer
en février 1991 la Convention démocratique et sociale (CDS-Rahama), dont il devient le président. Investi par son parti pour la présidentielle d’avril 1993, il l’emporte au deuxième tour grâce à son alliance avec Mahamadou Issoufou du PNDS-Taraya. Renversé par les militaires en janvier 1996, il crée avec les autres leaders d’opposition le Front pour la restauration et la défense de la démocratie (FRDD). Arrivé en troisième position
lors du premier tour de la présidentielle de 1999, il soutient la candidature de Mamadou Tandja avec lequel il crée l’Alliance des forces démocratiques (AFD, au pouvoir). Il est
élu à la tête de l’Assemblée nationale le 29 décembre 1999. Principal animateur de la vie politique nigérienne, il est appelé à jouer un rôle central lors de la prochaine législature et conserve ses chances de victoire à la présidentielle, malgré la dissidence de son ancien lieutenant, Amadou Cheiffou, candidat à la même élection.
En 1999, Ousmane a réuni 430 571 voix lors du premier tour de la présidentielle, soit 22,5 % des suffrages exprimés. Avec 17 sièges à l’Assemblée, son parti, la CDS, est la deuxième force politique du pays. En juillet 2004, le parti de Mahamane Ousmane a convaincu 390 875 votants lors des élections locales, recueillant près de 18 % des voix.

Hamid Algabid
Il est incontestablement le plus diplômé des six postulants au fauteuil présidentiel. Né en 1941 à Belbéji, dans la région de Tanout, il obtient un doctorat en sciences juridiques en 1988 à la Sorbonne. Ancien Premier ministre de Seyni Kountché de 1983 à 1987, il fut secrétaire général de l’Organisation de la Conférence islamique (OCI), basée
à Djeddah, en Arabie saoudite, de 1988 à 1996. Cette année-là, il est battu par Kofi Annan lors de l’élection au poste de secrétaire général des Nations unies. De retour à Niamey, il est sollicité, en 1997, par le président Ibrahim Maïnassara Baré pour diriger son nouveau parti, le Rassemblement pour la démocratie et le progrès (RDP-Jamaa). Investi le 11 septembre 2004, à Zinder, lors du congrès du RDP, Hamid Algabid souffre toutefois
d’un handicap : accaparé par sa médiation dans la crise au Darfour pour le compte de l’Union africaine, il était absent du Niger au troisième jour de la campagne électorale.
Battu dès le premier tour de la présidentielle de 1999, il avait toutefois réussi à convaincre 207 658 électeurs, recueillant 10,9 % des suffrages. Son parti, le RDP, qui se réclame de l’héritage du président Baré, compte 8 sièges à l’Assemblée, ce qui lui confère la possibilité de constituer un groupe parlementaire. Lors du dernier scrutin local, il n’a réuni que 156 598 voix, un résultat qui ne lui permettrait pas de figurer au deuxième tour.

Amadou Cheiffou
Ancien Premier ministre désigné le 3 novembre 1991 par la Conférence nationale, il est né le 1er décembre 1942 à Kornaka dans le département de Dakoro. Diplômé en aviation civile, il a occupé diverses fonctions au sein de l’Organisation de l’aviation civile internationale (Oaci) et au sein de l’Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en
Afrique et à Madagascar (Asecna). Numéro deux de la CDS-Rahama, il entre en conflit avec son président Mahamane Ousmane et claque la porte du parti en 2003. Dans la foulée, il crée le Rassemblement social-démocrate (RSD-Gaskiya), créant la surprise lors des locales de juillet 2004. En obtenant 144 979 voix, le RSD est devenu la cinquième force politique du Niger.

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Adamou Moumouni Djermakoye
Colonel à la retraite, il est né le 22 mai 1939 à Dossou, son fief électoral. Chef de la diplomatie de Seyni Kountché entre 1974 et 1979, il multiplie ensuite les portefeuilles jusqu’en 1988, année où il est nommé ambassadeur à Washington, représentant permanent du Niger auprès des Nations unies, avec rang de ministre d’État. En 1992, à la faveur de l’instauration du multipartisme, il crée l’Alliance nigérienne pour la démocratie et le
progrès (ANDP-Zaman Lahiya). Président de l’Assemblée entre 1993 et 1995, il a composé avec les pouvoirs successifs et fait partie de l’AFD, aujourd’hui au pouvoir. Avec 147 979
des voix (7,74 %) en 1999, Moumouni Djermakoye est arrivé en cinquième position. Il a négocié son soutien à Mamadou Tandja en acceptant de faire partie de l’AFD, ce qui a valu aux cadres de son parti l’attribution de plusieurs ministères. L’ANDP ne dispose que de 4 députés. En juillet 2004, elle a engrangé 116 367 voix.

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