Le triomphe de « l’architecte »

Publié le 7 novembre 2004 Lecture : 2 minutes.

Quand il évoque, dans The New Yorker, sa première rencontre avec George W. Bush, il y a plus de trente ans, il est presque attendrissant : « Je me souviens parfaitement de ce qu’il portait ce jour-là : un blouson d’aviateur de la Garde nationale et des bottes de cow-boy. Il émanait de lui un tel charisme… Aucun être au monde ne devrait avoir le droit d’en posséder autant. » On jurerait une chanson d’Édith Piaf : « Il était grand, il était beau, mon légionnaire… » Karl Rove est une midinette.
Depuis cette apparition, il se voue corps et âme à l’ascension de son idole. Son royaume à lui : les égouts. Mensonge, chantage ou intimidation, aucune ignominie ne le rebute. Davantage que le conseiller politique, son titre officiel, il est le tueur à gages patenté de George W., l’exécuteur de ses basses uvres. Après beaucoup d’autres, le candidat démocrate en a fait l’expérience. Ces vétérans du Vietnam opportunément ressortis du placard pour couvrir de boue le valeureux combattant maintes fois décoré que fut John Kerry, c’est lui. Le coup de la cassette vidéo d’Oussama Ben Laden opportunément
diffusée à quarante-huit heures du scrutin, lui aussi. Karl Rove est une canaille.
Bush, qui ne compte pas l’ingratitude au nombre de ses défauts, lui a publiquement rendu hommage : son conseiller, a-t-il dit, a été « l’Architecte » de sa réélection. En 2000, le Machiavel de la Maison Blanche savait que la victoire se jouerait au centre de l’échiquier politique : il incita donc son champion à feindre de prendre ses distances
avec les bigots allumés de la Christian Coalition. Bingo ! Cette année, il est peut-être
le seul, en tout cas le premier, à avoir compris que, par exception, la décision se ferait
à droite. Sa cible : les quatre millions d’ultrareligieux qui, lors du précédent scrutin, avaient refusé leur confiance et leur bulletin de vote à GWB, jugé par trop irrésolu, presque centriste. D’où l’insistance du camp républicain sur des sujets de société apparemment périphériques comme le mariage gay ou l’avortement. Pendant ce temps-là, Kerry
se laissait naïvement convaincre de consacrer l’essentiel de ses efforts et de son budget
électoral aux Swing States et aux électeurs indécis. Re-bingo ! Karl Rove est un génie politique.

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