La bigote de John McCain

Publié le 7 septembre 2008 Lecture : 2 minutes.

À première vue, c’est bien joué. En choisissant Sarah Palin, gouverneure de l’Alaska, comme colistière sur le ticket républicain pour la présidentielle du 4 novembre, John McCain fait d’une pierre deux coups. 1. Il comble d’aise la droite religieuse, sourdement réticente à son égard en raison de ses fluctuations passées sur certaines questions à ses yeux essentielles comme l’avortement ou le mariage gay. 2. Il fait un appel du pied appuyé aux électrices de Hillary Clinton qui, ulcérées par la défaite de leur championne lors des primaires démocrates, rechignent à reporter leur voix sur Barack Obama.
En y regardant de près, c’est moins sûr. D’abord, parce que rien ne dit que lesdites électrices, qui eussent préféré des propositions plus concrètes comme la mise en place d’une couverture sociale universelle, seront séduites par les divagations de la vice-miss Alaska 1984 sur l’enseignement du créationnisme (rejet de la théorie darwinienne de l’évolution) à l’école. Ensuite, parce que McCain se prive ainsi de son meilleur argument électoral : la relative inexpérience d’Obama.
Car Mrs. Palin, 44 ans, mariée à un Inuit du Grand Nord – ancien membre d’un parti réclamant l’indépendance de l’Alaska – et mère de cinq enfants (dont un petit trisomique), est, si l’on a bien compris, une sorte de « girl-scout » boréale. Une belle plante pieuse et sportive, folle de bons sentiments, de grands espaces et de chasse à l’élan (elle est membre de la National Rifle Association, le puissant lobby des armes à feu). Ancienne maire de Wasilla, paisible bourgade que vous auriez du mal à situer sur une carte, elle n’est gouverneure que depuis deux ans et n’a jamais brigué aucun mandat électif national. Elle a poussé à la démission deux hommes politiques notoirement corrompus – ce qui n’est pas mal ; aurait exercé des pressions sur le chef de la police locale pour le contraindre à licencier son ex-beau-frère – ce qui est moins bien ; et souhaite livrer les immensités préservées de l’Arctique à l’exploration pétrolière – ce qui n’est pas bien du tout. Dans l’hypothèse pas si invraisemblable d’une disparition de McCain (72 ans et pas toutes ses dents) avant la fin de son mandat – si, bien sûr, mandat il y a -, on ne l’imagine pas sans frémir propulsée dans la jungle de la grande politique internationale.
Et puis, quand même Deux jours après la désignation de Sarah Palin, on a découvert que Bristol, 17 ans, sa fille aînée, se trouve enceinte de cinq mois sans avoir convolé. Ça fait désordre ? Oui. C’est injuste ? Non. Rejeter bigotement la contraception et l’avortement expose sans doute à de tels désagréments.

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