Vos lettres et emails sélectionnés

Publié le 6 novembre 2005 Lecture : 5 minutes.

Cramponnés au pouvoir
Dans son « Ce que je crois » du 15 octobre (n° 2336) intitulé « Malheur aux démunis ! », Béchir Ben Yahmed écrit (à juste titre) que l’Afrique subsaharienne a, jusqu’ici, raté son développement économique et social parce que les gouvernements qui se sont succédé à la tête des pays qui la composent n’ont pas su éduquer et soigner leurs peuples pour les mettre utilement au travail. J’estime quant à moi que les dirigeants de ces Etats se sont surtout cramponnés au pouvoir pour s’enrichir (eux et leurs proches), et cela continue.

Un guide sur le Cameroun ?
J’ai lu avec beaucoup d’intérêt le « Guide Ecofinance » sur le Rwanda (JA.I. n° 2336). J’ai été séduit par la pertinence de la présentation ainsi que par l’analyse des potentialités de ce pays, qui, malgré les difficultés qu’il a connues, a pu se relever et amorcer sa reconstruction et son développement. Je voulais savoir si l’initiative d’un tel supplément ne pouvait pas être étendue à d’autres pays comme le mien, le Cameroun, qui a aussi besoin d’être mieux connu.
Réponse : Votre souhait devrait être bientôt exaucé. Le Cameroun figure en effet dans notre programme des Guides Ecofinance prévu pour 2006.

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La BAD, mais aussi Air Afrique
Tout le monde parle des conséquences néfastes de la délocalisation de la Banque africaine de développement (BAD) sur l’économie ivoirienne (voir « Le boulet ivoirien », J.A.I. n° 2337). On oublie, sciemment ou pas, de rappeler les méfaits de la liquidation d’Air Afrique, acteur économique de taille, dont la disparition a laissé un très gros vide.

A chacun son islam
Jamais l’islam n’a fait autant peur que de nos jours : cette religion est suspectée, redoutée, montrée du doigt aux quatre coins du monde. Depuis que le président Bush a déclenché sa « croisade » contre le terrorisme, la chasse aux barbus, destructeurs de la Civilisation, se fait partout. Le 11 septembre 2001 a creusé un abîme infranchissable entre l’Islam et l’Occident. Qui songe à justifier les massacres abominables des innocents ? Quand on le fait au nom de Dieu, cela devient absurde, et pourtant les hommes l’ont fait de tout temps, quelles que soient leur religion et leur foi.
Face à une islamophobie grimpante et afin d’éviter les amalgames et les préjugés réducteurs, il faudrait savoir de quel islam on parle. S’agit-il de l’islam officiel, codifié, clérical, trop accommodant ? Ou de l’islam salafiste, ce passéisme ? S’agit-il de l’islam légaliste, si cher aux détenteurs d’une orthodoxie irréfutable, ou de l’islam mystique, maraboutique, voire folklorique où se complaît l’homme de la rue ? S’agit-il de l’islam d’Averroès, d’Avicenne, de Roumi, ou de ceux qui crient : « L’islam ou la fin du monde »?
Ni la psychose planétaire enfantée par Bush, ni les imprécations cataclysmiques des fous d’Allah ne doivent brouiller notre vision, et à chacun son islam.

Lapidation médiatique
Entre le Nord, qui vit dans un luxe tapageur, et l’Afrique, qui agonise, l’Europe demande au Maroc, un pays qui souffre au quotidien, d’être son bouclier face aux coups de boutoir de l’immigration clandestine. L’Espagne, qui occupe Ceuta et Melilla derniers vestiges du colonialisme européen en Afrique , exige que le Maroc joue le rôle ingrat du gendarme. Face à ce « tsunami migratoire », le Maroc est victime d’une lapidation médiatique sans précédent. Avant d’adopter un discours moralisateur à l’égard du Maroc, la
presse française aurait dû méditer cette phrase d’un Premier ministre socialiste de l’ère Mitterrand : « La France ne peut pas accueillir toute la misère du monde. »

Le Maroc ne fait pas rêver tous les Subsahariens
Au vu du sondage que vous commentez (voir J.A.I. n° 2337), le royaume chérifien bénéficie d’un meilleur capital de sympathie que ses voisins maghrébins chez les Subsahariens. Cela du fait d’une diplomatie plus active en Afrique noire : Casques bleus marocains en Côte d’Ivoire, aide massive du royaume lors de la crise alimentaire au Niger accompagnée d’un
déplacement sur le terrain de SM Mohammed VI. Les Subsahariens qui font leurs études au Maroc sont loin d’avoir la même sympathie pour ce pays. Entre les brimades policières, les tracasseries administratives, les agressions physiques et morales, leur séjour est tout sauf tranquille. Rares sont ceux qui décident d’y travailler une fois leur formation achevée. De toute façon, obtenir un permis de travail est plus qu’un chemin de croix ! Un sondage auprès de Subsahariens vivant au Maroc confirmerait cette contradiction : le Maroc ne les fait pas rêver.

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Du mépris à l’humiliation
En voyant les images de Noirs menottés et entassés dans des bus, je n’ai pu m’empêcher de penser aux bateaux des négriers-esclavagistes. Quand oserons-nous enfin dénoncer avec
véhémence cette misère frappant aux portes de l’Europe qui se proclame « humaniste et mondialiste »? Le remède au sous-développement qui incite nombre d’Africains démunis à émigrer parfois au péril de leur vie ne peut plus se limiter aux seules aides financières ou humanitaires souvent détournées en toute impunité. Il est grand temps de considérer
l’Afrique comme un client, un fournisseur et un emprunteur, au même titre que certains pays membres de l’Union européenne qui n’ont aucune histoire commune avec les expuissances
coloniales européennes.

Supplice de Tantale
Votre enquête « Émigration : tous coupables » parue dans le numéro 2336 est d’une qualité rarement égalée. Chapeau bas pour le formidable boulot que vous faites. Je trouve dans les
images insoutenables de ces laissés-pour-compte quelque chose d’incroyablement indécent. Diantre, qu’est-ce qui pousse ces irréductibles candidats à l’émigration à se jeter dans
l’antre du requin en bravant ces étendues inhospitalières au péril de leur vie ? La plupart de ceux qui réussissent à gagner l’autre rive ne tardent pas à se rendre à l’évidence qu’ils ont tiré des plans sur la comète. Le pays de cocagne se transformant
immédiatement en cauchemar. Et pour ceux qui ont été reconduits dare-dare chez eux, cette aventure n’aura été qu’une sorte de supplice de Tantale. Il ne faut pas occulter aussi le
fait que les disparités criantes entre un Nord immensément riche, curieusement fesse-mathieu et égoïstement vorace, et un Sud indigent sont propres à donner le tournis à plus
d’un.

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Réguler le flux migratoire
J’ai apprécié le « Ce que je crois » de BBY intitulé « Malheur aux démunis » (n° 2336). Mais l’Europe n’a pas seulement déversé sur le reste du monde ses démunis, elle y a aussi expédié ses délinquants, ses criminels. Les boat-people qui tentent aujourd’hui d’atteindre les berges de l’Europe ne sont pas uniquement des pauvres, mais aussi des diplômés, des têtes bien faites qui fuient la dictature et la misère dans leur pays. En tout cas, pour freiner ce phénomène migratoire, et parce que le Nord n’est plus aussi riche qu’autrefois alors que beaucoup de fantasmes sur sa prospérité demeurent, il faut :
1) réguler ce flux en accord avec l’Union européenne ;
2) sanctionner les passeurs et les trafiquants internationaux de l’immigration ;
3) participer à l’émancipation des pays du Sud par des programmes de développement et surtout en leur achetant leurs matières premières à bon prix.
Un être humain qui trouvera chez lui travail et dignité ne pensera venir en Occident qu’en touriste.

Rendons à son auteur
L’auteur de la lettre « Maroc : un pas géant » publiée dans le numéro 2338 est Brahim El Fadili, de Khénifra, au Maroc. Qu’il veuille bien accepter nos excuses, de même que le lecteur d’Abidjan dont la signature a malencontreusement remplacé la sienne.

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