Réponse du berger à la bergère

Damas et Paris se renvoient la responsabilité de la suspension de la coopération diplomatique entre les deux pays sur le dossier libanais.

Publié le 6 janvier 2008 Lecture : 2 minutes.

« Cela n’augure rien de bon pour le Liban. » C’est en ces termes qu’un diplomate arabe accrédité à Beyrouth a commenté l’annonce, le 2 janvier, par Walid al-Moualem, le ministre syrien des Affaires étrangères, de la suspension de la coopération diplomatique entre Paris et Damas sur le dossier libanais. Or, comme l’a reconnu le jour même Cheikh Hassan Nasrallah, le leader du Hezbollah, composante majeure de l’opposition prosyrienne, cette coopération était « la dernière chance » de sortir le pays du Cèdre d’une crise politique qui dure depuis plus de deux ans et qui a débouché, le 24 novembre dernier, sur la vacance de la magistrature suprême suite à la fin du mandat du président prosyrien, le général Émile Lahoud.
La décision de Damas ressemble à une réponse du berger à la bergère. Le 30 décembre, Nicolas Sarkozy, en visite en Égypte, avait accusé le régime de Bachar al-Assad d’entraver l’élection d’un nouveau chef de l’État libanais et annoncé la fin des consultations entre Paris et Damas à propos du Liban. Le lendemain, Claude Guéant, le secrétaire général de l’Élysée, a téléphoné au chef de la diplomatie syrienne « pour lui communiquer officiellement notre décision », selon le porte-parole de la présidence française. Une version contestée par les Syriens, qui affirment que Guéant a souhaité, dans un premier temps, le maintien des échanges entre les deux parties. Ce n’est qu’à la suite de la publication d’une dépêche de Sana, l’agence officielle syrienne, rendant compte de cette communication que le secrétaire général de l’Élysée, gêné, a notifié à Moualem la fin des échanges entre la France et la Syrie.
À Paris, personne n’en doute. L’incapacité du Parlement libanais à se réunir pour élire un successeur à Émile Lahoud s’explique uniquement par le refus de la minorité prosyrienne d’assister à une telle réunion, qui a dû être reportée onze fois. « La présence de députés de l’opposition est nécessaire pour assurer le quorum légal prévu pour l’élection du chef de l’État, précise un analyste libanais. Le fait qu’il y ait désormais un candidat consensuel à la présidence, à savoir le chef de l’armée, le général Michel Sleimane, ne suffit pas aux yeux des pro-Syriens. » Ces derniers exigent, en effet, la conclusion d’un accord politique global qui inclut, outre le choix du chef de l’État, l’adoption d’une nouvelle loi électorale et la composition du futur gouvernement dont le tiers des membres – minorité de blocage – devront être issus des forces du 8-Mars, composées essentiellement des chiites du Hezbollah et des partisans du général chrétien Michel Aoun.
À en croire Moualem, Guéant aurait donné, lors d’une rencontre avec le président Assad le 4 novembre dernier, son accord de principe pour un tel compromis. Mais le refus du député Saad Hariri, chef de file de la majorité parlementaire, soutenue par l’Occident, a fait capoter l’arrangement. En réalité, celle-ci a toujours estimé que le fait d’accorder une minorité de blocage au sein de l’exécutif aux pro-Syriens reviendrait de facto à « redonner » à Damas un droit de regard dans les affaires libanaises.

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