Iran : mêmes causes, mêmes effets

Publié le 6 janvier 2008 Lecture : 2 minutes.

Une intervention militaire des États-Unis en Iran aurait probablement le même résultat que celle de la CIA en 1953, sous la présidence Eisenhower. Ces opérations semblent être, au début, un succès. Un grand nombre d’entre elles, cependant, ont pour conséquence la tyrannie ou le chaos. Il émerge de ces tourbillons d’instabilité des menaces qui mettent en péril la sécurité internationale (et américaine) d’une manière totalement imprévue.
Il n’y a pas de meilleur exemple que l’Iran. Au début des années 1950, le Premier ministre Mohamed Mossadegh nationalisa l’industrie pétrolière iranienne. Les dirigeants américains et britanniques jugèrent que c’était un affront impardonnable et le renversèrent. L’agent de la CIA qui organisa le coup d’État, Kermit Roosevelt, fut chaleureusement félicité à son retour à Washington et fut même décoré par Eisenhower au cours d’une cérémonie secrète à la Maison Blanche.

Dans une perspective historique, cependant, l’affaire ne paraît plus tellement une réussite. Elle rétablit le shah Reza Pahlavi sur le trône du Paon. Il gouverna avec de plus en plus de brutalité pendant vingt-cinq ans. Ce régime d’oppression amena la révolution de la fin des années 1970. Cette révolution porta au pouvoir une clique de mollahs fanatiquement antiaméricains qui s’appliquèrent, parfois avec une très grande violence, à combattre les intérêts occidentaux.
Les États-Unis s’interrogent actuellement sur la manière de s’opposer au programme nucléaire de l’Iran. La question ne se serait probablement jamais posée, et les mollahs n’auraient probablement jamais accédé au pouvoir, si les États-Unis s’étaient abstenus d’intervenir en 1953. L’Iran aurait pu devenir une démocratie solidement installée au cur du Moyen-Orient musulman, avec des conséquences incalculables pour la région.
Ceux qui plaident pour une nouvelle intervention américaine en Iran n’ont pas tiré les leçons de la dernière. Bouleverser violemment un ordre politique dans l’espoir de le remplacer par quelque chose de mieux est un pari dangereux. Les Iraniens le savent bien. Dans les années 1970, ils ont mis de côté leurs différends et ont fait front commun pour renverser le shah. La base de leur unité était l’hypothèse partagée que quel que soit le régime qui lui succéderait, il serait une amélioration. Ils avaient tort.
Les Iraniens ont tiré une amère leçon de cette tragique désillusion. Si mauvais que soit un régime, il peut toujours y avoir pire. Que peut-il y avoir de pire pour les États-Unis qu’un régime antiaméricain à Téhéran qui multiplie les provocations et semble décidé à acquérir des armes nucléaires ? Aucun ne peut être pire. Mais décapiter le gouvernement iranien ou mettre le pays en ébullition provoquerait une anarchie incontrôlable. Les extrémistes se déchaîneraient sans contrainte. L’Iran serait encore plus dangereux. Si les États-Unis l’attaquaient, le chaos serait tel que nous en viendrions presque à regretter les mollahs.

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