Paris courtise Dakar

Publié le 5 décembre 2004 Lecture : 2 minutes.

Paris jure ses grands dieux que l’annulation de la dette commerciale sénégalaise, un coup de chiffon sur une ardoise de 247 millions d’euros, annoncée le 29 novembre, n’est que la concrétisation d’une promesse faite par le président Jacques Chirac à son homologue Abdoulaye Wade lors du sommet France-Afrique de Yaoundé, en janvier 2001.
Pourquoi intervient-elle alors seulement maintenant ? Là encore, les technocrates et
les politiques des deux pays font assaut d’arguments pour expliquer qu’il s’agit d’un
processus logique, le Sénégal ayant atteint le point d’achèvement de l’initiative en faveur des Pays pauvres très endettés (PPTE) en avril 2004, qui marque le satisfecit de la communauté internationale concernant le bon respect du plan de route fixé et ouvre la voie à l’annulation des créances dans le cadre des négociations bilatérales. Le Sénégal est-il pour autant un si bon élève ? Que ce soit au ministère français de l’Économie ou à l’Agence française du développement, on est beaucoup plus réservé sur la question.
Sur le plan politique, cette décision n’est en tout cas pas anodine. Elle intervient alors
que le président sénégalais apporte un soutien appuyé à la France en Côte d’Ivoire. Malmené au pays d’Houphouët, Paris se doit de conserver son influence dans son ancienne
colonie sénégalaise d’autant que celle-ci est de plus en plus courtisée par Washington.
Porte d’entrée de l’Afrique subsaharienne, le Sénégal occupe une place géostratégique de choix. D’ailleurs, George W. Bush n’a pas manqué de passer par Dakar lors de son premier séjour en Afrique, en juillet 2003. Et il reçoit le président sénégalais cette semaine
pour discuter du renforcement de leur coopération. Et ce après que les États-Unis ont
annulé pour 4 milliards de F CFA de la dette sénégalaise, le 19 novembre.
Il n’est un secret pour personne qu’Abdoulaye Wade a un faible pour l’Amérique et nourrit encore un certain ressentiment vis-à-vis de Paris, qui le boudait du temps où il était
dans l’opposition. D’où la nécessité pour Chirac de resserrer ses liens avec Gorgui (« le
vieux » en wolof) et de faire preuve de largesse. En faisant jouer la concurrence entre Paris et Washington, le président Wade améliore la santé financière de son pays et amène les autres nations riches à faire un geste. Le Japon a effacé 49 milliards de F CFA de créances le 17 novembre. Le Canada et l’Allemagne devraient lui emboîter le pas. De quoi envisager des lendemains qui chantent pour le Sénégal.

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