Force et faiblesse d’un silence

Publié le 5 février 2006 Lecture : 2 minutes.

Les implications françaises de l’affaire Ben Barka ne sauraient faire oublier la part qu’y occupe le Maroc. La victime est une personnalité marocaine de premier plan, les promoteurs de l’opération seraient des Marocains et un ministre appartenant au gouvernement de Hassan II se trouve personnellement mis en cause.
C’est de Paris que l’enquête est conduite, mais comment ne pas croire que la recherche de la vérité ne serait plus aisée si le Maroc acceptait d’y contribuer ? Or l’attitude marocaine consiste à nier la participation des personnalités chérifiennes à l’affaire, puis à se retrancher derrière un formalisme juridique qui, pour être fondé en droit, ne suffit pas à répondre aux exigences de la situation. Pourquoi cette attitude ? Jusqu’à nouvel ordre, le Maroc est concerné en la personne du général Oufkir, son ministre de l’Intérieur. Antoine Lopez a déclaré qu’il avait pour mission de prévenir le ministre dès que Ben Barka serait amené dans la villa de Boucheseiche et, le 30 octobre à 17 heures, le général Oufkir débarquait à Paris, venant de Casablanca.
Ou bien le général Oufkir est réellement innocent et son passage à Paris, avant de regagner Genève pour y voir ses enfants, ne constitue qu’une coïncidence prêtant à des interprétations malheureuses. Dans ce cas, pourquoi n’intervient-il pas pour dissiper le doute et démanteler l’argumentation de Lopez ? Il dépendrait de lui que la justice française avance dans la bonne direction. Ou bien il a eu une part quelconque dans la préparation du rapt de Ben Barka et dans ce qui a suivi, et il lui faudra, tôt ou tard, rendre des comptes à la justice et le plus tôt sera le mieux.
Le gouvernement marocain et, par-delà ce gouvernement, le roi Hassan II ont le devoir de trancher. Une simple attitude de refus, même en l’absence d’accusations vraiment fondées, même en l’absence d’une démonstration vraiment probante des culpabilités présumées, ne peut laisser intact le prestige du Maroc. Et il est clair que l’on a déjà pesé de part et d’autre les risques politiques et économiques d’une rupture entre les deux pays.

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