Chirac ranime la mémoire
« Je souhaite que, dès cette année, la France métropolitaine honore le souvenir des esclaves et commémore l’abolition de l’esclavage. » Dans son discours du 30 janvier, après un long rappel historique tantôt indigné, tantôt contrit, le président Jacques Chirac en est venu au fait. Le 10 mai de chaque année, la France se recueillera à la mémoire des victimes de ce qu’il a lui-même qualifié de « blessure » et de « tragédie ». Autour de la table, les membres du Comité pour la mémoire de l’esclavage ne peuvent qu’applaudir. En avril 2005, dans un rapport remis au Premier ministre, ils avaient proposé que la date du 10 mai soit retenue. Une date symbolique : c’est en effet le 10 mai 2001 que le Parlement a adopté à l’unanimité la loi qui fait de l’esclavage un crime contre l’humanité. « Son discours ne pouvait que nous plaire, il entérine des propositions que nous avons faites », témoigne l’écrivain guadeloupéenne Maryse Condé, présidente du Comité.
La liste des promesses présidentielles ne s’arrête pas là. Conformément aux recommandations du Comité, le chef de l’État a exigé que l’esclavage trouve « sa juste place dans les programmes de l’école primaire, du collège et du lycée ». Avant d’ajouter qu’il fallait que sa mémoire s’incarne « dans un lieu ouvert à tous les chercheurs et au public ». En d’autres mots, qu’un musée sur ce pan honteux de l’Histoire voie le jour.
« Une circulaire de décembre indiquait déjà aux enseignants qu’ils ne devaient pas omettre le sujet », rappelle Françoise Vergès, vice-présidente du Comité et historienne. « Il est temps de passer de la parole aux actes », insiste, de son côté, Maryse Condé. Une chose est sûre, les commémorations du 10 mai auront bien lieu. « Il y aura un volet grave, avec des colloques, des réflexions, un geste solennel du président. Et un volet divertissant, avec des musiciens, des acteurs, pour que chacun se sente aussi concerné », poursuit Maryse Condé.
En marge du sujet de la traite coloniale, Chirac a réservé à ses hôtes une envolée finale, imprévue au programme, sur l’asservissement moderne. « Il nous faut [] veiller, a-t-il déclaré, à ce que les entreprises occidentales, lorsqu’elles investissent dans les pays pauvres ou émergents, respectent les principes fondamentaux du droit du travail. » Avant de s’engager à « proposer une initiative européenne et internationale » sur la question. À suivre
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