Comme un éléphant dans un magasin de porcelaine

Publié le 4 février 2007 Lecture : 2 minutes.

C’est pathétique. Nous pouvons aller tranquillement sur la Lune, mais pas mettre les pieds dans la province d’Anbar. Nous pouvons scruter l’espace jusqu’au fin fond de l’univers, mais nous sommes incapables de nous apercevoir (quand il en est encore temps) que beaucoup d’Irakiens nous détestent. Nous produisons des films qui font le bonheur du public du monde entier, mais nous sommes incapables d’imaginer une politique étrangère qui plaise à quelqu’un.
Et le problème, ce ne sont pas seulement les républicains de droite. Le président George W. Bush a certes eu la vue particulièrement courte, mais les démocrates nous ont embourbés au Vietnam. L’aveuglement est une tradition bipartite de la politique étrangère américaine. Historiquement, nous sommes souvent notre pire ennemi.

L’Irak est l’exemple du moment. Nous l’avons envahi, en pensant que nous en ferions un bastion américain, que nous aurions droit à du pétrole bon marché, à des bases militaires à long terme et à la reconnaissance des Irakiens libérés. Au lieu de quoi nous avons fait la guerre à l’Irak, et l’Iran a gagné.
L’Iran, justement. En 1953, nous avons contribué à la chute du Premier ministre démocratiquement élu, Mohamed Mossadegh, pour mettre à sa place un gouvernement plus favorable à l’Occident. Cela a créé des tensions qui ont abouti à la révolution iranienne de 1979 et à l’arrivée des mollahs avec leurs rêves nucléaires. Sans notre politique, l’Iran pourrait très bien aujourd’hui avoir un gouvernement proaméricain.
Pourquoi donc agissons-nous si souvent contre nos intérêts à long terme ? Il y a au moins deux raisons.

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La première est que les grandes puissances avancent toujours comme des éléphants, bousculant les gens au passage, suscitant des ressentiments et réglant les problèmes militairement, simplement parce qu’elles en ont les moyens. L’une des grandes pages de Thucydide est celle où il raconte comment, il y a 2 400 ans, Athènes a décidé de détruire la ville de Melos parce qu’elle en avait les moyens.
De même, en 1955, lorsque le Royaume-Uni, alors puissance dominante au Moyen-Orient, a mis sur pied le Pacte de Bagdad, un accord militaire destiné à protéger ses intérêts au Moyen-Orient. Au lieu de quoi le pacte s’est heurté à l’opposition des nationalistes arabes, a renforcé le sentiment antibritannique et contribué à la chute de la monarchie irakienne en 1958 – et, au bout du compte, à l’arrivée au pouvoir de Saddam Hussein.
L’autre raison est particulière aux États-Unis : nous n’avons pas compris comment fonctionne le monde.
© The New York Times et Jeune Afrique 2007
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