Morosité ambiante

Publié le 3 juillet 2005 Lecture : 3 minutes.

Opérationnelle depuis juin 1999, la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) a fêté son sixième anniversaire le 29 juin à Malabo. Une célébration sans éclat particulier, qui s’est tenue dans le cadre du sommet des chefs d’État de l’organisation. Seuls le Centrafricain François Bozizé et le Gabonais Omar Bongo Ondimba ont répondu en personne à l’invitation de leur homologue équatoguinéen, Teodoro Obiang Nguema. Le Cameroun était représenté par son ministre des Relations extérieures, Laurent Esso, le Congo par son ministre du Plan, de l’Intégration économique et du Nepad, Pierre Moussa, et le Tchad par son Premier ministre, Pascal Yoadimnadji.

Héritière de l’Union douanière des États de l’Afrique centrale (Udeac), la Cemac a pour mission de renforcer le processus d’intégration des économies pour le développement de la sous-région. Un objectif qui passe par l’assainissement de l’environnement économique et la modernisation du cadre juridique et réglementaire pour mieux financer des projets d’intérêt collectif. C’est notamment le cas avec la réalisation d’infrastructures de communication dans le cadre du schéma d’aménagement routier de la Communauté.
Mais, au-delà des grands principes, l’intégration rencontre toujours de nombreux obstacles sur le terrain, comme l’ont souligné les ministres des Finances, du Commerce et du Plan de la Communauté réunis à Malabo la veille du sommet. Les responsables de la Cemac ont ainsi reconnu « l’urgente nécessité d’appliquer effectivement les textes en vigueur, aussi bien par les États que par les institutions de la Communauté ». Un document préparatoire a dressé un bilan sans concession des multiples entraves et autres lenteurs administratives que certains accords communautaires rencontrent dans chacun des six pays de la zone. Le « passeport Cemac », destiné à assurer la libre circulation des ressortissants des États membres au sein de la Communauté, illustre bien cette situation. Créé en janvier 2003, ce document n’est pas encore reconnu par les administrations des pays concernés.
Cette réticence partagée à l’égard de la démarche communautaire ne se limite pas aux problèmes douaniers. Parmi les objectifs de la Cemac, la création d’un marché financier en Afrique centrale censé doper les investissements est particulièrement laborieuse. Pour le moment, les projets doublonnent plus qu’ils ne se complètent. Ainsi, la Bourse régionale des valeurs mobilières d’Afrique centrale, installée à Libreville, tente de lancer ses activités alors que le Cameroun a créé son propre marché boursier à travers le Douala Stock Exchange.

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Idem pour la création d’une compagnie aérienne communautaire. Alors qu’Air Gabon et Cameroon Airlines connaissent une situation catastrophique, les responsables de la Communauté ont envisagé de lancer ce projet en partenariat avec la compagnie Royal Air Maroc. Mais Air Cemac semble sur le point de capoter. Yaoundé se dit déterminé à sauver son pavillon national, N’Djamena mise plutôt sur la jeune compagnie Toumaï Air Tchad, et Libreville tente de reprendre à son compte le projet d’alliance avec la RAM pour sauver Air Gabon.
Autant dire que les problèmes de cohésion sont nombreux dans la sous-région. Ce qu’a d’ailleurs confirmé Obiang Nguema dans son discours d’ouverture. Plaidant pour une réforme des statuts de l’organisation, il a souhaité « plus d’équité dans l’attribution des responsabilités pour éviter que les institutions [communautaires] ne soient considérées comme un simple cercle d’amis ».
En fait, la plus belle réussite de la Communauté, au cours des mois écoulés, relève plus du domaine politique qu’économique. La Force multinationale de la Cemac en Centrafrique (Fomuc) a contribué à sécuriser le pays en accompagnant la transition jusqu’à l’élection présidentielle de mai dernier. Le mandat de la Fomuc, qui compte actuellement 380 hommes issus de contingents congolais, gabonais et tchadiens, devait expirer le 30 juin.

Il a finalement été prorogé de six mois renouvelables pour consolider la normalisation en Centrafrique. Le sommet a également décidé d’apporter à Bangui « un soutien financier supplémentaire », sans plus de précision. En mettant la main à la poche pour aider le plus pauvre d’entre eux, comme ils l’avaient déjà fait en 2003, les cinq pays pétroliers de la Cemac ont au moins réussi à sauvegarder l’essentiel de l’esprit communautaire : un minimum de solidarité.

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