J.A.I. indésirable

Publié le 3 juillet 2005 Lecture : 3 minutes.

Notre collaborateur Abdelaziz Barrouhi devait couvrir le Sommet de l’Union africaine (UA), les 4 et 5 juillet, à Syrte, en Libye. Invité par l’UA et muni de tous les documents nécessaires à son accréditation, il s’est pourtant vu refuser l’entrée sur le territoire libyen à son arrivée à l’aéroport de Tripoli, le 30 juin. Sans motif particulier ni aucune explication, si ce n’est un lapidaire « C’est nous qui décidons »…
À travers lui, c’est évidemment Jeune Afrique/l’intelligent qui est visé, et ainsi censuré. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois qu’un tel incident arrive à un de nos journalistes désireux de se rendre en Libye. Mais, dans ce cas précis, il est permis de se demander comment l’UA peut accepter de tels agissements et pourquoi elle a choisi la Libye pour accueillir son sommet. Nous y reviendrons dans l’enquête consacrée à la couverture de l’événement de notre prochaine édition. À condition, bien sûr, que les autorités libyennes daignent nous laisser exercer notre métier. En attendant, voici, par le menu, le film de la mésaventure libyenne d’Abdelaziz Barrouhi. Édifiant !

Le jeudi 30 juin 2005, j’ai été refoulé à mon arrivée en fin d’après-midi à l’aéroport de Tripoli (Libye), où je devais couvrir le sommet de l’Union africaine (UA) des 4 et 5 juillet. J’ai été réembarqué manu militari dans l’avion à bord duquel j’étais arrivé.
Aucune explication valable ne m’a été donnée sur les raisons de cette mesure. « Ce sont les instructions », m’a dit l’un des officiers de la police des frontières venu me signifier ma reconduction. Quand j’ai fait valoir que j’étais invité par Alpha Oumar Konaré, président de la Commission de l’UA, pour couvrir le sommet, comme l’atteste la lettre que j’ai produite, et que, par ailleurs, j’avais accompli une semaine auparavant toutes les formalités auprès du département de la presse étrangère par fax, il a répondu : « C’est nous qui décidons. Vous ne pouvez pas couvrir le sommet. »
Les choses se sont passées ainsi : je venais d’accomplir toutes les formalités de rigueur – contrôle par ordinateur et tampon d’entrée du passeport – lorsque plusieurs agents en civil ont surgi et m’ont arraché des mains le passeport visé et la lettre d’invitation de l’UA. Avant de disparaître. J’ai été ensuite ramené dans la salle de transit. Le visa n’étant pas requis pour les ressortissants tunisiens, un policier est venu me voir quelques instants plus tard avec une feuille de papier et un stylo, et m’a demandé de m’engager par écrit à n’avoir aucune activité journalistique en Libye pour pouvoir y entrer, sinon… J’ai répondu que j’étais là pour faire mon métier et couvrir le Sommet de l’UA, et non pour faire du tourisme, et que, par conséquent, je ne pouvais m’engager à ne pas accomplir ma mission. « Nous vous renvoyons dans l’avion à bord duquel vous êtes venu », m’a alors répondu un officier supérieur. Et il a aussitôt donné l’ordre au policier de me raccompagner jusque dans l’avion. Mon passeport ne m’a été rendu qu’une fois à bord, et le tampon d’entrée y a été annulé.
Question : à quoi donc sert la lettre d’invitation du président de la Commission de l’UA ? Toutes les organisations régionales et internationales dignes de ce nom, qui organisent un sommet ou la moindre conférence dans un pays membre, exigent pour les délégués et les invités de la presse une entrée libre dans le pays hôte afin qu’ils puissent accomplir leur mission. Cela n’a visiblement pas été le cas. La Libye considérerait-elle l’UA comme sa « chose » ? Qu’en pense Monsieur Konaré ?
En novembre dernier, j’avais accompli les formalités auprès du département de la presse étrangère en Libye pour y couvrir la visite à Tripoli du président français Jacques Chirac. Réponse des Libyens : « Vous pouvez venir en Libye en tant que touriste, mais vous ne pourrez pas couvrir la visite parce que les Français ne veulent pas qu’il y ait des journalistes non résidents en Libye. »

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