Fatma Zohra Abdou

Entrepreneur du BTP

Publié le 3 juillet 2005 Lecture : 2 minutes.

Dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, Fatma Zohra Abdou détone. Ce petit bout de femme d’une quarantaine d’années a réussi à se faire une place au soleil dans un secteur jusque-là exclusivement dominé par les hommes. « C’est simple, dit-elle, je suis la seule femme membre de l’Association générale des entrepreneurs algériens (Agea), un club de bâtisseurs qui compte environ 400 membres. » Son diplôme d’ingénieur d’État en génie civil en poche, Fatma Zohra se lance dans le privé en créant, au milieu des années 1990, un bureau d’études à Alger. « Pour décrocher des marchés, j’étais obligée de sous-traiter avec des sociétés rivales gérées par des hommes. Pourquoi ? Parce que les pouvoirs publics rechignent à confier des projets à une femme », soupire-t-elle. Mais il en faut plus pour décourager cette mère de deux enfants qui avoue deux passions, la politique et le bâtiment. En 2000, Fatma Zohra crée sa propre entreprise de construction. Aujourd’hui, celle-ci emploie plus d’une soixantaine de personnes et son chiffre d’affaires avoisine les 4 millions de dinars (450 000 euros) par an. « Quand je fais de la politique, ses bénéfices baissent ; quand je n’en fais pas, ils augmentent », ajoute-t-elle, le plus sérieusement du monde.

Le militantisme, elle est tombée dedans dès son jeune âge. « Fidèle au FLN, je reste attachée à la ligne incarnée par Ali Benflis. La femme algérienne n’a pas voix au chapitre en politique. Nous sommes au XXIe siècle, et notre société refuse encore de reconnaître l’égalité entre l’homme et la femme. Alors, si je peux contribuer à lui donner plus de place, pourquoi pas ? » lance-t-elle. Oui, mais les autres ne l’entendent pas de cette oreille. Lui fait-on payer ses engagements doublement, parce qu’elle est femme et qu’elle a osé se placer dans le camp d’Ali Benflis, le candidat malheureux à la présidentielle d’avril 2004 ? Elle en est persuadée, mais ne s’y résigne nullement. « Pour obtenir des marchés, il faut graisser la patte. Je pourrais donner des pots-de-vin, distribuer des cadeaux et même offrir mes charmes à untel pour obtenir de mirifiques contrats, indique-t-elle. Mais je ne mange pas de ce pain-là. » Fatma Zohra, une femme incorruptible dans un secteur où, de son propre aveu, la règle est de distribuer des bakchichs ?

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« Je gagne honnêtement ma vie », précise-t-elle avec orgueil. Elle se rend sur les chantiers en bottes et en gabardine, suit de près la scolarité de ses deux garçons, et consacre du temps et une partie de son argent à une association pour la protection des sans-abri qu’elle a fondée avec un groupe d’amis. « Je ne fais pas des affaires par amour de l’argent et du luxe. Je gagne bien ma vie, sans rouler sur l’or pour autant. Je cotise au parti et j’aide les personnes démunies », conclut cette femme de coeur.

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