Niger : déferlante médiatique

Publié le 2 octobre 2005 Lecture : 2 minutes.

La première télévision à poser ses caméras au Niger est Al-Jazira. Le 17 mai 2005, la chaîne arabe diffuse en boucle des reportages tournés au centre de l’ONG Médecins sans frontières (MSF) à Maradi. Le Maroc, l’Arabie saoudite et la Libye envoient de l’aide alimentaire dès le mois de juin. En Occident, le silence persiste. MSF lance sa première alerte le 26 avril. RFI, France Info, l’AFP se mobilisent. Mais les télévisions restent inertes. Et sans elles, les donateurs ne bougent pas d’un iota.

Parallèlement, Bernard Kouchner s’agite dans son coin. Le fondateur de MSF fait une entrée fracassante dans la crise le 22 juin : « Trente mille enfants meurent de faim […] chaque jour au Niger, explique-t-il. C’est bien pire qu’un tsunami, mais il n’y a pas de touristes blancs pour attirer les télévisions. » La tirade fait mouche. Kouchner subjugue par sa verve les journalistes avides de phrases incisives. Et réveille les bailleurs de fonds.
MSF organise une conférence de presse à Paris le 28 juin. Salle comble, cette fois-ci. L’ONG y expose son point de vue sur la situation du Niger. Les télévisions réagissent. Timidement. Le 30 juin, Dominique Derda réalise un reportage pour France 2. France 3 reprend les images. TF1 ne bouge pas. TV5 multiplie les sujets. Outre Al-Jazira, seuls les médias français ont couvert la crise. L’argent arrive au compte-gouttes.

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L’apathie durera jusqu’au 14 juillet. Ce jour-là, déboule une équipe de BBC World, avec à sa tête la journaliste star Hilary Andersson. Elle gagne les zones désertiques au nord de Dakoro pour y tourner des images arides. Le 18 juillet, la BBC diffuse le premier sujet : on y découvre des images insoutenables filmées dans les centres de soins intensifs. Des enfants prostrés, mourant en gros plan devant la caméra.
À la manière des reportages de la BBC qui déclenchèrent une aide massive pour l’Éthiopie en 1984, les sujets d’Hilary Andersson créent un séisme médiatique. Dès le lendemain de la diffusion, MSF reçoit des dizaines de coups de téléphone. Tous les médias internationaux veulent venir : tabloïds britanniques ou journaux sérieux, français, italiens, norvégiens, allemands, danois, le Financial Times, le New York Times, CNN, ITN, qui vend ses images à ABC et à CBS. Les bailleurs de fonds, eux, sortent de leur torpeur : l’argent afflue.

À Maradi, le centre MSF n’a pas changé depuis juillet. La même terre rouge. Les mêmes tentes blanches. Et les mêmes drames quotidiens. Ne manquent que les reporters. Gavés d’images et de témoignages, ils ont quasiment tous quitté le Niger autour du 15 août.

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