Sous le soleil exactement

Longtemps boudé par les visiteurs étrangers en raison des violences terroristes, le pays va-t-il devenir un nouvel eldorado ?

Publié le 2 juillet 2006 Lecture : 5 minutes.

Des Italiens qui investissent sur la côte oranaise, des Saoudiens qui s’apprêtent à construire un village touristique sur le littoral algérois, des hommes d’affaires qataris qui envisagent d’implanter une station balnéaire près de Boumerdès Autrefois boudée par les touristes étrangers en raison des violences terroristes, longtemps boycottée par les hommes d’affaires qui refusaient d’y risquer leurs investissements, l’Algérie serait-elle devenue le nouvel eldorado pour les promoteurs touristiques ? « Nous avons le potentiel nécessaire : un grand littoral, de belles montagnes, un immense désert et la proximité du pourtour méditerranéen, affirme le ministre du Tourisme, Nouredine Moussa. Le pays est une destination de plus en plus appréciée. Les investisseurs veulent y développer des projets et le gouvernement met tous les moyens pour les encourager. Notre ambition est de faire du tourisme un secteur créateur de richesses et pourvoyeur de devises. » L’objectif de cette nouvelle stratégie mise en place en 2004 est de doubler les capacités d’accueil afin d’attirer 4 millions de touristes par an à l’horizon 2015 (dont 2 millions d’étrangers) et d’engranger plus de 1 milliard de dollars de recettes annuelles.
Déjà, les affaires marchent bien. À l’instar de l’immobilier, de la téléphonie mobile, du bâtiment ou de la grande distribution, le tourisme aiguise l’appétit des investisseurs nationaux et étrangers. Car dans ce pays, tout reste à faire, ou presque. Selon les chiffres fournis par le Centre national d’études et d’analyses pour la population et le développement (Ceneap), l’Algérie a accueilli 1,44 million de personnes l’année dernière, dont 1 million de ressortissants algériens établis à l’étranger et revenus au pays en vacances. Restent 441 200 étrangers, principalement des Français, des Italiens et des Allemands. Un score dérisoire en comparaison des deux voisins que sont le Maroc et la Tunisie, dotés de très fortes capacités touristiques. « L’Algérie peut s’imposer comme une destination alternative », avance Abdelkader Gouti, directeur de la coopération et de la communication au ministère du Tourisme. Comment y parvenir ?
Dans un entretien accordé à Jeune Afrique, le ministre du Tourisme, Nouredine Moussa, détaille la stratégie de son département pour promouvoir le tourisme en Algérie. Quatre axes principaux seront suivis : rattraper le retard en matière d’infrastructures, améliorer les prestations touristiques, former les ressources humaines et promouvoir l’image du pays à l’étranger. Sur le plan hôtelier, seuls 10 000 à 15 000 des 81 000 lits disponibles répondent aux normes internationales. « Le reste doit être impérativement remis à niveau », insiste le ministre. D’où le lancement, en novembre 2004, d’un projet de rénovation des infrastructures existantes. Les banques et les fonds de garantie ont suivi, et le programme est aujourd’hui en voie de réalisation. Côté prestations, Nouredine Moussa ne se voile pas la face : « Tout le monde se plaint du service offert aux touristes. Nous avons désappris la culture touristique. Cela doit changer. Un touriste satisfait, ce sont dix autres qui viendront sur ses traces. » Le ministère compte donc accélérer la formation de personnels spécialisés. Près d’une centaine de cadres gestionnaires en hôtellerie seront formés chaque année dans les instituts et les centres de formation appropriés.
Pour plusieurs professionnels, une politique axée sur le renouveau du tourisme n’obtiendra aucun résultat sans une forte communication destinée à donner de l’Algérie l’image d’un pays totalement sécurisé et véritablement attractif. « Le terrorisme a été une malédiction. Il faudra encore quelques années d’efforts pour que le touriste prenne son billet pour se rendre à Alger ou à Oran comme il le fait aujourd’hui pour aller passer une semaine au soleil à Agadir ou à Hammamet », remarque Assam, directeur d’une agence de voyages à Alger. À quoi le ministre rétorque que bien communiquer passe avant tout par la mise à disposition de commodités permettant aux touristes des séjours agréables.
L’Algérie manque d’hôtels et de stations balnéaires construites aux normes internationales ? Chaque jour, des investisseurs étrangers débarquent à Alger avec des projets plein leurs serviettes. Et les investissements locaux ne manquent pas non plus. « Aujourd’hui, 300 chantiers sont lancés à travers le territoire national avec des capacités de création de 30 000 lits. Plus de 250 autres sont prêts et en recherche de financements. Les banques rechignent à accompagner certains investissements touristiques. Là aussi, il faudrait que les mentalités changent », souligne Nouredine Moussa. Parmi les programmes qui sont sur le point de voir le jour figure la construction de 34 hôtels de type Ibis (deux étoiles) et Novotel (trois étoiles) par Accor, le géant français de l’hôtellerie, en partenariat avec le groupe de l’Algérien Djillali Mehri. À l’ouest d’Alger, la société à capitaux saoudiens Sidar devrait lancer, en octobre prochain, les travaux pour la réalisation d’une station balnéaire d’une capacité de 2 000 lits. Déjà propriétaire d’un centre d’affaires international à Chéraga, sur les hauteurs d’Alger (un investissement de 150 millions de dollars), Sidar compte investir 23 milliards de dinars (316 millions de dollars) dans ce nouveau projet. Elle a également reçu l’aval du Conseil national de l’investissement (CNI) pour bâtir un village touristique à Zemmouri, une ville côtière située à 30 kilomètres d’Alger.
Si les 1 200 kilomètres de côtes algériennes attirent particulièrement les promoteurs, le gouvernement veut développer une autre région tout aussi attractive, le Sahara. Le ministre du Tourisme révèle qu’une étude sur ce secteur est en cours d’élaboration avec l’aide d’experts internationaux. Sur la base des résultats, les pouvoirs publics devront initier un plan pour la promotion de cette destination. Longtemps délaissé pour cause d’insécurité, le Sahara algérien attire déjà les touristes en quête de destinations méconnues. Ils sont plus de 20 000 à s’y être rendus l’année dernière, pour bivouaquer dans le désert, visiter les oasis de Timimoun, admirer le coucher du soleil du haut du mont Assekrem, qui domine la région de Tamanrasset, ou encore découvrir les trésors archéologiques du parc national du Tassili. Pour faire du Sahara algérien une destination privilégiée, le ministère du Tourisme envisage de développer cinq pôles qui font la « magie du Sud » : Tamanrasset, Djanet, Biskra, Ghardaïa et Gourara. Le programme prévoit également l’aménagement des 17 infrastructures hôtelières publiques que compte le Sahara. « Nous devons êtres capables d’offrir les meilleures prestations possibles aux touristes qui viennent visiter le Sud algérien », conclut Nouredine Moussa.

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