Adieu apartheid, bonjour pauvreté

Publié le 1 octobre 2006 Lecture : 2 minutes.

Grâce au leadership visionnaire de Nelson Mandela, les craintes de nombre d’observateurs ne se sont pas réalisées : l’apartheid en Afrique du Sud ne s’est pas achevé dans le sang. Mais douze ans plus tard, le chômage des Noirs ne descend pas en dessous des 40 %, l’écart de richesse entre Noirs et Blancs perdure et la lutte contre la pauvreté généralisée n’a fait qu’engendrer la frustration. Le « miracle sud-africain » est une belle idée qui nous fait parfois oublier que le pays n’a pas encore achevé sa transition post-apartheid. Si, dans les années qui viennent, le gouvernement ne se montre pas plus efficace, l’Afrique du Sud connaîtra peut-être le chaos que l’on prédisait au début des années 1990.

À son arrivée au pouvoir, en 1994, le Congrès national africain (ANC) promet de réparer une injustice historique : il s’engage à redistribuer 30 % des exploitations détenues par des Blancs aux Noirs que l’apartheid a chassés des terres de leurs ancêtres. Pour rassurer les Blancs et prévenir une fuite des capitaux, le prix payé sera celui du marché et la redistribution progressive. Le tout doit s’achever en 2014.
Douze ans après, seuls 4 % des terres ont été vendus. Des politiciens populistes trouvent là un redoutable argument de campagne : l’ANC n’existe que pour enrichir ses amis de l’élite noire et protéger les intérêts blancs, persiflent-ils. Le 11 août, le gouvernement leur répond : Lulu Xingwana, ministre de l’Agriculture et de la Propriété rurale, annonce que les propriétaires blancs de 350 fermes ont six mois pour trouver un accord avec le gouvernement qui permette la vente – à un prix juste – de leurs propriétés. S’ils refusent, prévient Xingwana, leurs terrains seront saisis. Les propriétaires blancs protestent. D’ici à décembre 2008 – quelques semaines avant la présidentielle -, le gouvernement espère avoir répondu à près de 7 000 demandes de terres.

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La controverse fait penser à celle que connaît le Zimbabwe voisin actuellement. Comme Mandela, Mugabe a été considéré comme un modèle de modération. En 1980, il contribue à la chute du régime répressif et pro-Blanc de Ian Smith. Il conduit progressivement son pays vers le changement, remplaçant les leaders économiques blancs par des Noirs. Mais à la fin des années 1990, l’incapacité de Mugabe à réduire le chômage et à sortir des millions de Zimbabwéens noirs de la pauvreté menace son gouvernement. Pour redorer son blason, il décide d’exproprier les fermiers blancs. []
L’Afrique du Sud ne suivra pas les traces du Zimbabwe. Mais les nouvelles pressions qui pèsent sur les fermiers blancs font éclater au grand jour des tensions politiques latentes. []
En décembre 2007, l’ANC choisira son candidat à la présidentielle. L’élu sera en pole position dans la course à la succession de Mbeki. Il est trop tôt pour dire que le miracle sud-africain ne s’est pas réalisé. Mais la volonté gouvernementale pour améliorer le quotidien de la majorité des habitants s’étiole. Et le prochain président n’aura pas la légitimité de Mandela ou de Mbeki.

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