Le nouveau visage de Tripoli

Publié le 1 juillet 2007 Lecture : 3 minutes.

J’avais gardé de la capitale libyenne, où je n’étais pas retourné depuis le début des années 1990, le souvenir d’une ville maussade, dont les rues n’incitaient guère à la promenade, et où – caractéristique singulière – on ne voyait jamais personne sourire. Dès lors, quelle surprise que ce bref séjour effectué en juin 2007 ! J’avais entendu dire que la Libye de 2007 avait changé, sinon d’âme, du moins de visage. Mais je ne pensais pas que cela pût être aussi frappant.
Dès l’aéroport, qui vous donnait autrefois l’impression de débarquer sur la planète Mars, j’ai eu l’impression d’arriver, cette fois-ci, dans un pays « comme les autres » : fini les banderoles, les portraits géants du « Guide », les tracasseries policières ou douanières. C’est à peine si le policier a jeté un il sur mon visa avant d’y apposer un coup de tampon nonchalant. Quant au douanier, il a ignoré ma valise. Obligeamment, il m’a fait signe de passer, et je me suis retrouvé dehors. Là, pendant que j’attendais mon véhicule, deux ou trois chauffeurs de taxi sont venus me proposer leurs services. Aimablement et sans insister. Ils m’ont proposé leurs téléphones portables, au cas où j’aurais voulu appeler quelqu’un. J’étais déjà un peu surpris : où étaient les mines renfrognées, voire hostiles, de naguère ?

Des deux côtés de la route qui relie l’aéroport à Tripoli, on a beaucoup construit, jusqu’à donner naissance à une ville nouvelle. Et il en est de même tout autour de la capitale : sur des kilomètres de boulevards, de nouveaux quartiers. La circulation est devenue un problème, comme partout ailleurs : ici, elle provoque des encombrements interminables, là, elle prend des allures de rodéo automobile, hommes et femmes au volant se pourchassant, dès que la chaussée se dégage, à 140 km/heure. La ville était autrefois sale, poussiéreuse et jonchée d’objets divers – jusqu’à des matelas ou des baignoires. Elle ressemble aujourd’hui à une grande cité, où l’on trouve des espaces verts, des aires de jeux pour enfants, et où l’on voit, en fin de journée, des familles prendre le frais, allongées sur l’herbe ou assises sur des bancs.
Mon hôtel n’était pas l’un des plus beaux. Mais tout y était propre, fonctionnel et la cuisine savoureuse. À l’exception d’un réceptionniste tunisien, personne ne parlait ni le français ni l’anglais, pas même la standardiste. Cadres et employés étaient tous libyens, manifestement formés en école hôtelière, et ils travaillaient avec zèle. Beaucoup d’établissements de ce type, assimilables à des hôtels français deux ou trois étoiles, s’ouvrent en ce moment. La chaleur de l’accueil fut, pour moi, une autre surprise : à chacune de mes demandes, deux ou trois personnes se précipitaient pour me rendre service.
Plus grand étonnement encore : même le personnel féminin me disait bonjour – au lieu de regarder ailleurs – et il le faisait avec le sourire ! Cette gentillesse affichée, cette disponibilité, je les ai retrouvées partout où je suis passé et jusque dans les rues. Le responsable du cybercafé, où j’allais travailler, a refusé que je le paie (ce que j’ai tout de même fait, naturellement). Autant de petites attentions révélatrices d’une véritable « détente », elle-même liée au développement spectaculaire de tous les secteurs d’activité. Les petites entreprises, notamment de construction et de services, se multiplient. Dans toutes les rues – autrefois quasi désertes – des commerces se sont ouverts – alimentation, électronique, vidéo, électroménager – où des gens affairés font leurs courses. Le soir, on voit des groupes de jeunes, des couples, des femmes en pantalon et hijab se promener tranquillement, une canette de Pepsi à la main.
Tripoli, décidément, est devenu sympathique.

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