La guerre des sexes aura bien lieu

Publié le 1 juillet 2007 Lecture : 2 minutes.

Les gens qui placent l’éthique au-dessus de tout vont pouvoir s’indigner en toute légitimité. Pink or Blue (Rose ou Bleu), un test de dépistage précoce du sexe du futur bébé, vient d’être commercialisé en Grande-Bretagne par DNA Worlwide, une entreprise américaine. En vente libre depuis l’année dernière aux États-Unis, il est désormais disponible aussi sur Internet. Les impatients peuvent aujourd’hui connaître dès six semaines de grossesse, contre douze chez l’échographiste, le sexe du ftus. Pour savoir très vite si la layette sera rose ou bleue, il suffit de déposer une goutte de sang maternel sur un buvard et de l’envoyer par la poste au laboratoire américain. Il en coûte aux curieux 300 euros pour un délai d’une semaine et 350 euros pour un résultat plus rapide.

Hum ! Pourquoi ne pas attendre le délai réglementaire pour faire une échographie ? Que dénote une telle impatience ? Un réel désir de mieux préparer l’arrivée du bébé ? Ne serait-ce pas plutôt une volonté cachée de donner naissance à un enfant du « bon sexe » ? Selon le laboratoire américain, la méthode Pink or Blue, fiable à 99 %, limite les déceptions lorsque l’échographiste ne peut révéler le sexe à cause d’une mauvaise position du bébé.
Certes. Si beaucoup de parents sont motivés par leur désir sincère de savoir s’ils vont avoir un garçon ou une fille, d’autres l’utiliseront sans doute à des fins de sélection. Et pas seulement en Occident. Comment ne pas frémir lorsque l’on sait l’importance qu’attachent au sexe du bébé certains pays comme l’Inde ou la Chine. Et c’est là que les choses se gâtent ; car si la société a décidé de ne pas vendre son produit dans les deux pays en question pour ne pas encourager la sélection par le sexe, rien n’interdira aux personnes déterminées de se le procurer sur Internet ou par d’autres voies tortueuses.

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Cela fait froid dans le dos lorsqu’on sait que le fticide des filles fait rage en Inde, où elles sont des « fardeaux financiers » à cause de la dot qu’il faut payer pour les marier. Il y aurait eu 10 millions de victimes en vingt ans. La vente libre du kit Pink or Blue risque d’aggraver aussi la discrimination en Chine. Dans ce pays où l’on ne rigole pas avec la politique de l’enfant unique, 500 000 ftus de filles sont avortés chaque année.
Au cours des années qui viennent, l’achat du kit pourrait devenir une simple formalité. Aujourd’hui déjà, c’est par centaines que le laboratoire américain en vend chaque mois. La question se pose : en éliminant des ftus féminins à tour de bras, n’ouvre-t-on pas la voie à un eugénisme digne des pires romans de science-fiction ?
La science progresse, l’éthique régresse, pourrais-je dire en guise de conclusion. Je vous laisse méditer cette phrase, chers amis lecteurs. À mon grand regret, je vais devoir vous abandonner pendant quelques semaines, une cigogne ayant choisi de faire son nid au-dessus de ma cheminée. Votre dévouée servante vous remercie de votre fidélité et espère vous retrouver à la fin de son « pouponnage ».

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