Gouvernement de désunion nationale

Publié le 1 mai 2005 Lecture : 2 minutes.

Trois mois après le raz-de-marée électoral de la liste chiite, l’Assemblée nationale a donné, le 28 avril, son quitus au gouvernement formé par Ibrahim al-Jaafari, chef du parti Daawa. Ce cabinet est formé de quatre vice-Premiers ministres et de 32 maroquins (17 pour les chiites ; 7 pour les Kurdes ; 6 pour les sunnites ; chrétiens et Turkmènes disposant de 1 représentant chacun). « La formation de cette équipe m’a valu une mobilisation de jour et de nuit », a indiqué le Premier ministre, quelques heures avant de soumettre sa liste au vote des députés, pour illustrer la complexité de sa tâche face aux exigences des différentes communautés.

Effort vain : à quelques minutes du vote de confiance, nouveau rebondissement. Les partis sunnites décident de se retirer de l’équipe gouvernementale, estimant « la répartition des portefeuilles inéquitable », selon la formule de Ghazi al-Yawar, un sunnite membre du Conseil présidentiel dirigé par le Kurde Jalal Talabani (lire aussi pages 21-23). Résultat : des maroquins attribués à des intérimaires, un Hémicycle clairsemé avec la bouderie ostensible des partisans du Premier ministre sortant Iyad Allaoui (40 députés), écarté par le nouveau pouvoir, et le boycottage des élus sunnites. Sur les 275 députés, 90 manquaient à l’appel. Le retrait à la dernière minute des sunnites a provoqué une situation kafkaïenne. Dos au mur, (le délai de trois mois imparti par la Constitution provisoire à Jaafari lui imposait de former son gouvernement avant le 30 avril), le Premier ministre a dû présenter une équipe amputée de plusieurs titulaires, donc bancale.

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Le cas du très controversé Ahmed Chalabi en est la parfaite illustration. Homme lige du Pentagone et de la CIA, Chalabi a commencé à avoir des problèmes avec ses anciens protecteurs en 2004. Soupçonné d’intelligence avec l’ennemi iranien, rival du chouchou Iyad Allaoui, Chalabi est devenu, aux yeux des Américains, l’homme « à abattre ». Manoeuvrier dans l’âme, il a su faire le dos rond et s’est allié avec le courant religieux chiite, obtenant la bénédiction du grand ayatollah Ali Sistani. Sa stratégie lui a permis de figurer à la troisième place de la liste de l’Alliance irakienne unifiée (AIU), juste derrière Abdelaziz al-Hakim et Ibrahim al-Jaafari. Aujourd’hui vice-Premier ministre, il a en outre profité de la défection des sunnites pour prendre un des maroquins les plus « enrichissants » : celui du Pétrole. Quant au portefeuille de la Défense, également promis aux sunnites, Jaafari se l’est auto-attribué provisoirement. La communauté internationale s’est félicitée de la si tardive formation d’un gouvernement irakien, mais les 8 millions de citoyens qui avaient bravé les dangers pour se rendre aux urnes, le 30 janvier, sont totalement désarçonnés par le spectacle délirant que leur offre leur classe politique.

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