Hi-tech : l’envol des dragons chinois !
Xiaomi, Alibaba, Haier et bien d’autres petits dragons se sont lancés à la conquête du monde. En quelques années, ils sont devenus les égaux des géants de la téléphonie mobile, d’internet ou de l’électroménager. Et ce n’est qu’un début.
C’est la marque la plus cool de Chine, le symbole de la déferlante des produits originaires de ce pays sur les marchés émergents. En quelques années, Xiaomi (prononcer « chiao mi ») est passé du statut de start-up à celui de géant industriel. Ses smartphones sont désormais les plus vendus en Chine. Dans le monde entier, l’entreprise assure en avoir écoulé l’an dernier 61 millions, soit une progression de 227 % par rapport à 2013 !
Son objectif pour 2015 ? Cent millions. Pendant la même période, son chiffre d’affaires a plus que doublé pour atteindre 12 milliards de dollars (10,6 milliards d’euros). Elle se classe au troisième rang mondial, juste derrière Samsung et Apple, et sa valeur est estimée à 45 milliards de dollars. Quant à Lei Jun, son très jeune et très discret patron, il est l’une des cinq premières fortunes du pays. « Xiaomi représente une percée considérable du high-tech chinois sur les marchés internationaux, il révolutionne le modèle internet », commente Frédéric Raillard, fondateur de l’agence de publicité française Fred & Farid, à Shanghai.
En un an, le frabricant de smartphones Xiaomi a vu ses ventes croître de 227 %. Son chiffre d’affaires a doublé.
Quel est donc le secret de cette marque encore inconnue il y a trois ans ? Xiaomi, ce n’est pas seulement un téléphone aussi puissant, mais beaucoup moins cher, que l’iPhone. C’est aussi un système efficace de télévision par internet, de sites de vente sur mobile, de jeux, d’applications et de réseaux sociaux. Il peut même piloter à distance votre climatisation intérieure ou votre purificateur d’air !
« La recette de son succès, dit encore Raillard, est d’avoir su utiliser le meilleur de la technologie – et du marketing – du mobile, et de proposer le meilleur rapport qualité-prix du marché. La marque a en outre réussi à imposer une image branchée dans un environnement très concurrentiel où les jeunes ont tendance à vouloir acquérir les derniers modèles à la mode. »
>>>> Lire aussi : Comment la Chine est (re)devenue la 1ère puissance économique du monde
Pour séduire des utilisateurs toujours plus exigeants, Xiaomi propose des applications uniques à télécharger sur Miui, sa plateforme en ligne. Chacun peut ensuite donner son avis et, chaque vendredi, un nouveau système téléchargeable gratuitement est mis en service. Elle vend ses appareils à prix coûtant et se rémunère grâce à la vente d’applications, de services et de jeux. En Chine, où 80 % des achats se font sur des mobiles connectés, les perspectives sont faramineuses.
Jusqu’en 2012, la marque ne visait que le marché intérieur chinois. Mais à partir d’avril 2013, elle s’est étendue à Hong Kong, Taiwan et Singapour, puis à la Malaisie, aux Philippines, à l’Inde, à l’Indonésie, à la Thaïlande et au Vietnam. Prochaines cibles ? La Russie, la Turquie, le Brésil, le Mexique, et, bien sûr, l’Afrique.
Pied à pied
Pour se développer sur les marchés émergents, Xiaomi a débauché Hugo Barra, l’un des vice-présidents de Google. C’est lui qui a négocié pied à pied avec les opérateurs locaux et permis ce développement spectaculaire à l’international. Pour l’instant, la marque fait l’impasse sur les marchés occidentaux. L’Europe et les États-Unis sont en effet des territoires piégés, où elle s’exposerait à des procès pour contrefaçon et violation de brevets.
L’Europe et les États-Unis sont des territoires piégés, où ces firmes s’exposeraient à des procès pour violation de brevets.
Car force est d’admettre que c’est du côté d’Apple que Xiaomi cherche un peu trop son inspiration.
« C’est stupide d’essayer de contourner un design, plaide Hugo Barra. Pourquoi ne pas chercher à améliorer quelque chose qui marche plutôt que d’essayer à tout prix de procéder autrement ? L’industrie perd un temps incroyable dans ce type d’exercice. Le système des brevets freine l’éclosion des innovations. C’est un tel gaspillage d’énergie et de ressources que d’avoir une équipe d’ingénieurs qui tente par tous les moyens de trouver une façon de faire différente, au lieu de s’investir pour rendre meilleur ce qui existe. »
l'image." class="caption" style="margin: 4px;border: 0px solid #000000;float: right" />Il n’y a pas que les appareils que copie Xiaomi. Lei Jun est en effet un adepte du style décontracté et des présentations sur scène à l’américaine, raison pour laquelle il est surnommé le Steve Jobs chinois. Lui préfère se présenter comme un « serial entrepreneur ». Xiaomi, explique-t-il, est un « petit miracle » survenu sur une « terre magique » (la Chine) d’où ont été extraites les plus belles pépites de ces dernières années.
L’une de ces pépites se nomme Alibaba. Le géant du commerce en ligne, l’équivalent chinois d’Amazon, est l’une des entreprises les plus florissantes du pays. Normal puisqu’on y recense près de 650 millions d’internautes. L’an dernier, la Chine a même dépassé les États-Unis pour le commerce électronique avec des ventes de 1 850 milliards de yuans (265 milliards d’euros) – auxquelles Alibaba a largement contribué.
>>>> Lire aussi : La Chine et l’Union africaine veulent relier les métropoles du continent.
Lui-même ne vend rien directement, mais sert d’intermédiaire. Taobao, sa plateforme, contrôle 90 % du marché chinois des transactions de particulier à particulier, et Tmall, son site, représente 50 % des ventes en ligne de professionnels à particuliers. Lors de sa cotation à la Bourse de Wall Street, en septembre 2014, Alibaba a levé un montant record de 25 milliards de dollars. Et il ne cache désormais plus ses ambitions planétaires. Il vient ainsi d’acquérir deux entreprises, en Israël et en Inde, et annonce expérimenter la distribution de produits au moyen de drones.
Jack Ma, son patron, « l’homme qui a changé la vie des Chinois », comme l’écrivait récemment un quotidien américain, est naturellement l’une des toutes premières fortunes du pays. Liu Shiying, son biographe, parle à son propos d’un « esprit pionnier au service des besoins populaires ». Mais ce « visionnaire » pourrait prendre bientôt sa retraite aux États-Unis pour se consacrer au golf, son autre grande passion après le business. Il laisserait derrière lui une économie chinoise en pleine effervescence.
Car de nombreuses autres marques, toutes puissantes, riches et innovantes, sont en embuscade. Elles se nomment Lenovo et Meizu (téléphone portable), Tencent et Baidu (internet), ou encore Haier (électroménager). Aux États-Unis, les ventes de Haier (prononcer « rayerre ») connaissent une croissance fulgurante de 20 % par an en moyenne, alors qu’elle est depuis longtemps numéro un en Chine.
Comme Xiaomi, la direction de Haier veille à s’entourer des meilleurs. Sur le marché européen, elle a débauché une pointure de la grande distribution, le Français René Aubertin, qui dirige ses troupes depuis le siège européen du groupe, à Neuilly-sur-Seine. « Je suis le seul étranger membre du comité de direction », s’enorgueillit-il. Et de vanter les prouesses de ses machines à laver chinoises venues bousculer les géants du secteur dans la vieille Europe.
« L’univers entrepreneurial chinois est un écosystème extrêmement riche qui commence tout juste à s’ouvrir sur l’extérieur. Il faut s’attendre à une percée exceptionnelle des marques chinoises », explique un analyste.
Caméléon
Car ces grandes entreprises ne se limitent plus aux marchés émergents, mais étendent leurs tentacules aux États-Unis et en Europe, où leur stratégie de caméléon fait merveille. « Ce sont des marques discrètes qui savent s’adapter aux spécificités locales », explique un analyste.
« On assiste à la naissance d’une société d’entrepreneurs, dont une grande part est composée de jeunes Chinois partis étudier à l’étranger et qui reviennent parce que les financements sont disponibles en abondance chez eux, explique Alexis Bonhomme, un Français spécialiste du numérique chinois. L’univers entrepreneurial chinois est un écosystème extrêmement riche qui commence tout juste à s’ouvrir sur l’extérieur. Il faut s’attendre à une percée exceptionnelle des marques chinoises. »
L’occasion de célébrer quelques mariages de circonstance. L’opérateur Orange et le moteur de recherche chinois Baidu ont ainsi signé récemment un partenariat exclusif pour développer un navigateur mobile destiné aux marchés émergents d’Afrique, du Moyen-Orient et d’Asie. Un navigateur développé en arabe, en anglais et en français est ainsi disponible sur les terminaux équipés du système d’exploitation Android dans les pays africains où Orange est opérateur. Un partenariat qui confirme que les ambitions chinoises n’ont désormais plus de limites.
>>>> Lire également : Guo Tianmin, l’atout diplomatique de Huawei
L'éco du jour.
Chaque jour, recevez par e-mail l'essentiel de l'actualité économique.
Consultez notre politique de gestion des données personnelles
Les plus lus – Économie & Entreprises
- « Neuf des vingt pays qui présentent les taux de croissance les plus forts au mond...
- Doublé par la junte au Mali, Maroc Telecom restera-t-il dans le pays ?
- Chez Itoc au Sénégal, les enfants de Baba Diao revisitent la gouvernance du groupe
- Carburant en Afrique : pourquoi les exportateurs mondiaux jouent des coudes pour a...
- Sénégal : à quoi doit servir la nouvelle banque de la diaspora ?