Le parti de Dieu

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  • Tshitenge Lubabu M.K.

    Ancien journaliste à Jeune Afrique, spécialiste de la République démocratique du Congo, de l’Afrique centrale et de l’Histoire africaine, Tshitenge Lubabu écrit régulièrement des Post-scriptum depuis son pays natal.

Publié le 20 février 2015 Lecture : 3 minutes.

J’applaudis des deux mains l’initiative prise par le président tchadien, Idriss Déby Itno, de lancer une offensive contre les illuminés de Boko Haram qui sèment la mort et la désolation au Nigeria et au Cameroun, deux pays voisins du Tchad. Voilà longtemps que cette secte nargue tout le monde. Mais, comme d’habitude, les dirigeants de la région et ceux d’ailleurs n’avaient pas encore compris qu’elle est une menace pour la paix et la sécurité d’une grande partie du continent.

Ils se sont comportés en spectateurs ou, plus précisément, en irresponsables, oubliant un principe plus qu’élémentaire : gouverner, c’est prévoir. Où sont donc passés les drones américains qui devaient aider l’armée nigériane à obtenir des informations de première main sur les mouvements de Boko Haram ? Ils sont sans doute devenus aveugles. À moins que la faute n’incombe à l’armée nigériane, qui serait alors l’une des plus nulles au monde.

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Par rapport à l’évolution de la situation, c’est-à-dire l’engagement de quelques pays à constituer une force d’environ 8 000 hommes afin d’anéantir les fous de Dieu, j’imagine ce dernier très embêté. Qui va-t-il soutenir ? Le général Idriss Déby Itno, lui aussi musulman, et ceux qui ont accepté de le suivre dans son expédition contre Boko Haram ? Ou ce mouvement qui, avant de frapper, crie des phrases du genre "Il n’y a de Dieu que Dieu" ; "Dieu est grand" et j’en passe ? Si ce célébrissime Allah le miséricordieux me lit, je lui saurai gré de me répondre. Il a mon numéro de téléphone.

Chez les catholiques romains, ça bouge depuis l’élection de ce pape argentin surnommé François. Le bonhomme, sans doute inspiré par l’incontournable Très-Haut, qui a commandité son élection, a décidé de donner un coup de pied dans la fourmilière, au grand dam des bonimenteurs de toujours. Voilà qu’il exhorte les princes de son Église à ne plus couvrir les prêtres pédophiles. Comme nous le savons tous, Dieu est partout, il voit tout, entend tout. Comment a-t-il pu, depuis je ne sais combien de siècles, fermer les yeux lorsque ces hommes en soutane violaient l’innocence incarnée ?

A-t-il été complice, laxiste ou, simplement, indifférent alors que ces enfants qui allaient à sa rencontre à l’adresse indiquée par ses représentants souffraient le martyre ? À moins qu’il ne soit déjà mort et enterré. Le brave pape François, dans sa croisade contre les pédophiles de son bord, ne sera-t-il qu’un nouveau Don Quichotte ?

La question de savoir à quel camp Dieu appartient devient alors pertinente. Soutient-il ceux qui prêchent la vertu tout en violant leurs propres principes ("faites ce que je dis et non pas ce que je fais") et ceux qui égorgent pour les imposer ? Est-il du côté des victimes des turpitudes des imams, des prêtres, des évêques ?

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J’attends de connaître le sort qu’il a réservé à un ami de Niamey, musulman et grand coeur. Un jour de 2002, alors que j’étais dans sa ville, il a eu la gentillesse de m’inviter à déjeuner dans un restaurant français de la capitale du Niger. Chacun a choisi son plat. Quand le sien est arrivé, j’y ai jeté un coup d’oeil rapide. C’était du porc. Devant ma surprise, il me répond, très sereinement : "Tant que c’est bon, je mange." Et il a mangé. Non, messieurs de Boko Haram, ce n’est pas la peine de me demander ses coordonnées.

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