Nigeria : ouverture des bureaux de vote pour la présidentielle
Les Nigérians commençaient samedi à se rendre aux urnes pour élire leur prochain président, au cours du scrutin le plus serré de l’histoire de ce pays le plus peuplé d’Afrique, marqué par les violences islamistes, la chute des cours du pétrole et la corruption endémique.
Du hub pétrolier de Port Harcourt, en plein sud chrétien, à Kano, la deuxième plus grande ville musulmane du continent, en passant par la mégalopole de Lagos, 68,8 millions d’électeurs – sur 173 millions d’habitants – sont appelés aux urnes, pour des élections présidentielle et législatives.
Les bureaux de vote devaient ouvrir officiellement à 08H00 locales (07H00 GMT), mais une demi-heure plus tard, des journalistes de l’AFP à Kano (nord), Lagos et Abuja ont cependant constaté que dans de nombreux bureaux, des responsables de la commission électorale indépendante (Inec) n’avaient toujours pas été déployés et le matériel électoral n’avait pas encore été distribué.
Le scrutin doit se dérouler en deux temps. Dans la matinée, les assesseurs procèdent à la vérification des inscriptions sur les listes. Dans un second temps, à partir de 13h30 (12H30 GMT), les électeurs devront revenir voter.
Le président sortant, Goodluck Jonathan (57 ans), brigue un second mandat, face à l’ancien général Muhammadu Buhari (72 ans), son principal adversaire et le candidat d’une opposition plus unie que jamais. Des élections législatives ont également lieu samedi. Samedi matin, de longues files d’attente se sont formées devant les bureaux de vote, un peu partout dans le pays. Certains électeurs ont même raconté avoir passé la nuit sur place.
La sécurité assurée par des milices privées
A Kano, la plus grande ville du nord du pays, frappée à plusieurs reprises par des attentats meurtriers commis par les islamistes de Boko Haram, la plupart des votants sont arrivés dès 06H00, juste après la prière du matin.
"Les élections c’est vraiment quelque chose d’important, au Nigeria", témoigne l’un d’entre eux, Dahiru Badamasi. "Le pays a besoin d’être secouru du chaos dans lequel on se trouve actuellement. L’insécurité, le manque de soins médicaux, d’éducation… Partout, c’est la pagaille. Voilà où on en est".
Pour déjouer les attentats, des membres de milices privées étaient chargés de fouiller les électeurs à l’aide de détecteurs de métaux, comme à l’intérieur d’une école primaire, bondée de monde.
De part et d’autre du pays, les électeurs s’apprêtaient à soutenir leur candidat. Ainsi, à Daura, le fief du leader de l’opposition, Muhammadu Buhari, Moustapha Osman était totalement investi : "Nous sommes 100% prêts à voter, et nous allons voter pour le candidat qui protègera nos vies et l’intégrité de ce pays."
A l’inverse, à Utuoke, dans le village du candidat chrétien, où Goodluck Jonathan doit voter dans la journée, Laurence Banigo, un ingénieur de 42 ans soutenait le président sortant: "Les Nigérians qui ont pu apprécier son bon boulot devraient lui donner la chance de continuer encore pour quatre ans."
Margaret Nwoyi, femme au foyer de 34 ans, se montrait tout aussi enthousiaste "pour le fils" du pays. Il a permis à notre communauté de se développer. (…) Nous devons le récompenser en votant massivement pour lui aujourd’hui".
Rues désertes à Lagos
Dans la mégalopole de Lagos, d’habitude embouteillée jour et nuit, les rues étaient désertes à cause d’une interdiction pour les véhicules de circuler pendant toute la durée du vote. Des barrages de police et de soldats étaient érigés sur les grandes artères de la ville. Seuls, quelques piétons étaient visibles dans les rues.
Dans un pays où les dissensions politiques attisent souvent les tensions religieuses, le duel entre le chef de l’Etat sortant, un chrétien du Sud, et M. Buhari, un musulman du Nord, fait redouter des violences politiques.
Une myriade d’observateurs internationaux ont été déployés dans le pays pour s’assurer du bon déroulement du scrutin. L’Inec espère pouvoir éviter les fraudes électorales, un problème récurrent lors des précédentes élections, grâce à un nouveau système de lecteurs de cartes électorales électroniques, expérimenté pour la première fois. Les résultats sont attendus dans les 48 heures suivant la fermeture des bureaux de vote.
Sur le plan sécuritaire, l’armée nigériane, qui a annoncé vendredi avoir repris le fief islamiste de Gwoza, se targue d’avoir démantelé le "califat" proclamé par Boko Haram, dans le cadre d’une offensive militaire régionale, ces deux derniers mois.
Mais les victoires récentes de l’armée nigériane contre Boko Haram, avec l’aide de ses alliés régionaux, le Tchad en tête, ne permettront sans doute pas d’effacer, dans l’esprit des électeurs, le manque de réactivité du président face à la montée en puissance du groupe islamiste, dont l’insurrection, et sa répression, ont fait en six ans plus de 13.000 morts et 1,5 million de déplacés.
Même si Boko Haram est en perte de vitesse, le groupe islamiste, désormais allié à l’organisation Etat islamique, a menacé de perturber l’élection et a prouvé ces dernières semaines avoir encore la capacité de mener des attentats-suicides meurtriers.
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