Zakaria Fahim : « Ce sont les PME qui doivent porter le continent »
Directeur associé du cabinet d’expertise-comptable BDO Maroc, Zakaria Fahim est aussi un promoteur de l’entrepreneuriat en Afrique. Ancien président de deux branches du réseau Centre des jeunes dirigeants – CJD International et CJD Maroc – il supervise depuis trois ans l’organisation de Hub Africa, un salon dédié à l’investissement et à l’entrepreneuriat en Afrique .
Organisé pour sa troisième édition à Casablanca les 2 et 3 avril, Hub Africa a réuni cette année une grande communauté d’entrepreneurs venus de 17 pays africains, sous le thème « Belive in Africa, Invest in Africa » (Croire en l’Afrique, investir en Afrique). Dans cet entretien, Zakaria Fahim, promoteur de ce salon, nous parle de ses objectifs et nous donne sa vision de entrepreneuriat en Afrique.
Propos recueillis à Casablanca par Mehdi Michbal
Hub Africa est aujourd’hui à sa troisième édition. Pourquoi ce salon ? Et Pourquoi avoir choisi de l’organiser encore une fois à Casablanca ?
L’organisation de ce salon de l’investissement et de entrepreneuriat à Casablanca a un double objectif. Un objectif politique d’abord, on ne va pas le cacher, puisqu’on souhaite à travers cette initiative positionner Casablanca sur les radars des entrepreneurs du continent. On ne peut parler de Casablanca, comme hub financier du continent, sans mettre en orbite autour de cette place une communauté continentale d’entrepreneurs. Cet événement est donc une façon pour nous de légitimer la position de Casa comme hub africain. L’événement est organisé d’ailleurs sous le haut patronage du roi Mohammed VI et a bénéficié du soutien du ministère des Affaires étrangères et de la Coopération.
Et l’autre objectif ?
L’internationalisation n’est pas réservée aux grands groupes.
Il est purement économique. Un salon, c’est d’abord une occasion pour construire son réseau (networking). Chose qui manque cruellement en Afrique. Je pense qu’il nous faut réellement un plan Marshall africain, créer un environnement propice pour accompagner les très petites, petites et moyennes entreprises (PME et TPE) à grandir, à sortir de leur territoire. L’internationalisation n’est pas réservée aux grands groupes. Je suis convaincu que ce n’est pas le plus gros qui mange le plus petit, mais le plus rapide qui mange le plus lent. Et notre spécificité en Afrique, c’est que la taille de notre tissu d’entreprises nous donne un avantage : l’agilité ! C’est plus important que le capital. C’est notamment le cas du secteur des NTIC. On a aussi un savoir-faire à faire valoir dans l’agroalimentaire, l’électrification rurale, le tourisme… Des branches où les entreprises africaines ont accumulé des expériences assez intéressantes.
Cet événement justement ne s’intéresse qu’aux petites et moyennes entreprises. On n’a pas vu de grandes figures de entrepreneuriat dans les allées du salon….
L’idée, c’est d’aller vers les PME, des firmes que personne ne voit aujourd’hui. On a toujours pensé que sans les grands groupes, on ne peut pas faire l’Afrique. Je suis convaincu que ce sont les PME qui peuvent porter le contient. Elles doivent juste travailler ensemble, se connaître, cibler des marchés à l’international et créer des clusters pour absorber les coûts de déploiement qui sont généralement élevés. On cible aussi le secteur informel. Il y a de grandes entreprises dans l’informel qu’on essaie d’aider à sortir de l’ombre et à s’organiser.
Généralement, les flux d’investissement marocains vont vers le sud, mais on voit rarement des entreprises au sud du Sahara venir s’installer au Maroc. Qu’en pensez vous ?
Il faut décomplexer la coopération sud-sud, pour qu’elle ne se fasse pas uniquement dans un seul sens.
Le Maroc est l’un des premiers investisseurs en Afrique de l’Ouest. Mais nos amis africains ne viennent pas nous voir. Il faut à mon avis décomplexer cette coopération sud-sud, pour qu’elle ne se fasse pas uniquement dans un seul sens. Il faut casser certains tabous. Il y a aujourd’hui des entreprises africaines qui achètent des firmes en Europe. Demain, ce sera le cas peut-être au Maroc.
Ce genre d’événement est fait justement pour ça. L’Afrique est certes plurielle, mais on a un ADN commun. Il faut par exemple créer un label Afrique. Pour cela, il faut qu’on se parle, qu’on mette nos complémentarités en valeur et nos différences de côté.
Faites-vous un suivi des projets ou des partenariats annoncés dans le salon ? Y a-t-il un après Hub Africa ?
Bien sûr. Nous allons monter un mécanisme de suivi pour le volet crowdfunding (financement participatif). Des projets sont aujourd’hui présentés à des investisseurs et notre rôle c’est de faire le suivi, accompagner les entrepreneurs dans leurs démarches. Nous comptons également monter une école de entrepreneuriat à Casablanca, créer une web TV pour mettre en ligne nos formations, produire des témoignages de réussites africaines. Cela nous aidera à nous alimenter les réflexions entre deux salons.
L'éco du jour.
Chaque jour, recevez par e-mail l'essentiel de l'actualité économique.
Consultez notre politique de gestion des données personnelles
Les plus lus – Économie & Entreprises
- Mines d’or au Mali : la junte place le CEO de l’australien Resolute en détention
- La Côte d’Ivoire, plus gros importateur de vin d’Afrique et cible des producteurs ...
- Comment Air France compense son absence des États du Sahel
- Chez Tunisair, la purge des dirigeants se poursuit et les pertes s’accumulent
- Au Maroc, l’UM6P se voit déjà en MIT