La Sénégalaise des eaux voit son rôle renforcé
Malgré la coupure d’eau géante de 2013 à Dakar, le gouvernement réitère sa confiance à la SDE et lui confie même plus de responsabilités. Elle devra répondre à la consommation croissante des prochaines années.
Eau : pourquoi ça ne coule pas de source
Qu’elles soient publiques ou privées, les sociétés de gestion de l’eau sont souvent confrontées aux mêmes défis.
« L’incident est clos », assure-t-on à la direction de la Sénégalaise des eaux (SDE). En septembre 2013, la rupture d’une canalisation acheminant l’eau du lac de Guiers (qui fournit 40 % de l’eau consommée à Dakar) avait entraîné une coupure d’eau géante dans la capitale sénégalaise. La SDE avait été pointée du doigt, avant que la faute ne soit rejetée sur la Société nationale des eaux du Sénégal (Sones), propriétaire du réseau et responsable des principaux investissements.
La crise avait duré trois semaines, le temps de faire fabriquer en France la pièce défectueuse, pour un montant de 400 millions de F CFA (environ 610 000 euros), prêtés par l’Agence française de développement (AFD) à la Sones. La SDE avait quant à elle dû débourser 500 millions de F CFA, notamment pour installer des points d’eau gratuits. Mais depuis, insiste Mamadou Dia, qui vient de quitter son poste de directeur général de la SDE pour diriger le département eau et assainissement du groupe Eranove, « tous les voyants sont au vert ». En 2014, l’entreprise, contrôlée par l’investisseur Emerging Capital Partners via le groupe Eranove, a enregistré un résultat net de 2,6 milliards de F CFA, grâce à des ventes en hausse de 7 %. Autre atout pour la SDE, son taux de pertes (20 %) est l’un des plus bas du continent.
« C’est l’un des fleurons de l’eau en Afrique, avec l’Office national de l’eau et de l’assainissement au Burkina Faso, note une source dans le secteur. Même si ces dernières années, les performances ont baissé. »
« La SDE était déjà citée en exemple il y a plus de sept ans concernant la gestion commerciale, la facturation et le recouvrement », estime Bertrand de la Borde, directeur du département infrastructures Afrique de la Société financière internationale (IFC). Il juge par ailleurs ses performances techniques bonnes, même si les coupures n’ont pas disparu à Dakar.
Des bémols qui n’ont pas empêché l’état de renouveler jusqu’en 2018 le contrat d’affermage qui confie à la SDE la production et la distribution de l’eau dans les principales zones urbaines. Mieux, ses prérogatives ont été étendues. L’état soulage ainsi la Sones d’une partie des investissements à réaliser. L’entreprise renouvellera plusieurs milliers de kilomètres de réseau et effectuera des branchements de compteurs. Surtout, l’état lui a confié un « programme d’urgence » d’alimentation de Dakar d’un montant de 7,4 milliards de F CFA, qu’elle préfinance.
Même si la capitale sénégalaise est l’une des mieux loties du continent, le déficit quotidien s’élève à 20 000 m3, provoquant des coupures dans certains quartiers ou des baisses de pression. D’ici à décembre prochain, ce plan, qui comprend 21 forages dans la région, doit permettre de combler le déficit et d’accompagner la croissance de la consommation durant les deux prochaines années. Néanmoins, selon le schéma directeur de la Sones, qui a obtenu après la crise 17 millions d’euros de financements de la Banque mondiale et de l’AFD, le besoin additionnel de production s’élèvera dans dix ans à près de 240 000 m3 par jour.
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Dessalement
Pour y répondre, les autorités misent sur le dessalement de l’eau de mer. Cette technologie a vu ses prix chuter d’un tiers en dix ans. Le Sénégal prévoit une première usine qui produira 50 000 m3 d’eau par jour dès 2017 dans le cadre d’un partenariat public-privé. Plusieurs entreprises, dont la SDE, se sont d’ores et déjà montrées intéressées par ce projet, qui devrait représenter un investissement de 40 milliards à 60 milliards de F CFA.
Le financement d’une deuxième usine, d’une capacité de production de 100 000 m3 par jour, a également été bouclé avec l’Agence japonaise de coopération internationale. Le pari est ambitieux, d’autant que cette technologie nécessite de grandes quantités d’énergie, un secteur convalescent au Sénégal.
Par Marion Douet, envoyée spéciale à Dakar
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