La Tunisie célèbre l’héritage moderniste de Bourguiba

Quinze ans après son décès, le 6 avril 2000, un hommage solennel a été rendu à l’ancien président tunisien Habib Bourguiba, à Monastir, sa ville natale. 

Hommage à Habib Bourguiba à Monastir en 2011. © Fethi Belaid/AFP

Hommage à Habib Bourguiba à Monastir en 2011. © Fethi Belaid/AFP

Publié le 7 avril 2015 Lecture : 2 minutes.

Le président Béji Caïd Essebsi, attendu à Paris pour une visite d’État, a tenu à faire le déplacement, lundi 6 avril, à Monastir pour honorer la mémoire du père de l’indépendance tunisienne dont il assure être le disciple. Pourtant, les Tunisiens de moins de quarante ans, soit plus de la moitié de la population, n’ont pas connu Bourguiba et ont grandi sous le système de Ben Ali. Mais la mémoire collective a retenu que le fondateur de la Tunisie moderne, bien qu’autocrate, avait réussi à bâtir un État et des institutions tout en privilégiant l’éducation et la santé pour tous, quitte à rogner sur le budget de  l’armée. Cependant  le combattant suprême est aussi l’homme qui a raté l’ouverture vers la démocratie et réprimé toute forme d’opposition, aussi bien celle des sympathisants de son rival Salah Ben Youssef, que des étudiants de gauche, des syndicalistes et d’un mouvement islamiste naissant. Mais après 23 ans de dictature Ben Ali, l’autoritarisme de Bourguiba est presque oublié. On préfère désormais conserver de lui l’image du leader qui s’est attaqué au sous-développement en Tunisie.

"Il symbolise la modernité"

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Depuis la chute de l’ancien régime, l’ancien chef d’État est même devenu une véritable icône, excepté auprès des islamistes qui peinent encore à dire "paix à son âme" tant il est pour certains un laïc infréquentable. Mais, après quatre ans d’une transition parfois chaotique, beaoucoup de Tunisiens le regrettent. "Il symbolise la modernité", explique Ali Sakka, un informaticien de 44 ans. "Il avait promulgué le Code du statut personnel (CSP) qui donnait les plus larges droits aux femmes, encouragé le contrôle des naissances et mis en place une forme de méritocratie qui permettait à l’ascenseur social de fonctionner à plein régime. Un temps où la Tunisie avançait", conclu ce Tunisien qui se réclame de la famille destourienne qui s’inscrit dans le droit fil de la pensée politique de Bourguiba. Du côté des politiques, souvent proches de l’ancien régime, on se réclame aujourd’hui de son héritage, comme s’il était un gage de probité qui pouvait faire oublier les dérives du parti de Ben Ali, le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD).

Mais pour les Tunisiens le seul à être crédible comme légataire de Bourguiba est le président Béji Caïd Essebsi. À son retour aux affaires en 2011, il a séduit et étonné par une gestuelle et un phrasé très proches de ceux du fondateur de la Tunisie indépendante et a su composer avec les références bourguibiennes tout en signifiant que son projet politique était  de projeter le pays dans le 21e siècle. En 2015, les Tunisiens peuvent donc sereinement enterrer ce passé ainsi que leur culpabilité à son égard pour permettre au pays de se projeter avec innovation et créativité dans l’avenir.   

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