Togo : trois clés pour comprendre les frictions autour du fichier électoral

Les Togolais sont habitués aux contestations de résultats électoraux par l’opposition. Mais, dans le cadre de la présidentielle prévue pour le 25 avril, la classe politique se déchire autour de la question de l’audit du fichier électoral censé garantir un processus irréprochable.

Des habitants d’Abidjan cherchent leur nom sur la liste électorale provisoire affichée. © Archives/AFP

Des habitants d’Abidjan cherchent leur nom sur la liste électorale provisoire affichée. © Archives/AFP

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Publié le 31 mars 2015 Lecture : 3 minutes.

Urnes bourrées, procès-verbaux de dépouillement falsifiés, publication de résultats travestis, le Togo ne déroge pas aux contestations classiques des élections dans la plupart des pays africains. 

Mais pour la première fois depuis l’avènement du multipartisme intégral au début des années 1990, l’opposition togolaise semble déterminée à obtenir en amont des conditions optimales de transparence d’une élection. Et c’est le fichier électoral qui cristallise les tensions à la veille de la présidentielle prévue pour le 25 avril.

  • Que dit la loi togolaise ?
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Le fichier électoral, est une base de données contenant l’ensemble des listes électorales, des lieux et des bureaux de vote. Et il  est impossible d’étudier cette base sans prendre en compte les dispositions légales en vigueur dans l’État en question. 

Au Togo, la loi demande une "révision des listes" à la veille de chaque scrutin. "Les textes ne parlent pas d’audit, mais une pareille opération pourrait se faire dans le cadre d’une concertation politique", explique M. Kalipé, assistant en droit public à l’Université de Lomé. La révision est un processus conduit par la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) alors que l’audit suppose le recrutement d’experts généralement étrangers.

Du côté de l’opposition, Alberto Olympio réclame "un inventaire détaillé du cadre normatif et institutionnel qui gère les processus d’inscription sur les listes électorales" pour faciliter un audit pur et simple de la base actuelle. Selon lui, l’appareil juridique est incomplet en la matière et il faut "l’adapter aux exigences démocratiques d’aujourd’hui". 

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Le chef de l’opposition togolaise dénonce des anomalies dans le fichier électoral

  • Quelle est la méthodologie utilisée ?

Plusieurs méthodologies peuvent être utilisées pour réaliser l’audit d’un fichier électoral. De façon synthétique, "toutes doivent inclure l’ensemble des parties prenantes, État, partenaires techniques, partis politiques, société civile et commission électorale", explique Doudou Dia, directeur exécutif de l’institut de Gorée.

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Au Togo, la Ceni a procédé à une révision par zones du fichier utilisé lors des législatives de juillet 2013. L’opération a consisté en un enrôlement des nouveaux majeurs et à la radiation des personnes décédées. Les listes révisées ont été affichées pour permettre à la population de soulever d’éventuels réclamations. Mais le procédé n’a pas convaincu l’opposition qui réclame un travail plus en profondeur en raison de "milliers de doublons constatés". 

Le gouvernement a donc sollicité l’expertise de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) pour réaliser une "consolidation" du fichier avec la Ceni et les représentant des cinq candidats à la présidentielle. Les résultats de cette étude sont attendus dans les jours à venir. 

>> Lire aussi Fichier électoral au Congo : la fin des contestations ?

  • Faut-il reporter de plusieurs mois l’élection ?  

Selon Doudou Dia, directeur exécutif de l’Institut de Gorée, la durée d’un audit du fichier électoral n’est pas une donnée figée. "Tout dépend des termes de référence et du cadre légal de chaque pays", explique l’expert.

Le gouvernement togolais a décidé, sur proposition de la Cedeao, de repousser le scrutin au 25 avril. Un report de dix jours pour permettre à la Ceni d’achever la mise à jour de la base de données.

Un délai jugé trop court par certains opposants. Alberto Olympio estime qu’il faudrait "au minimum deux à trois mois pour réaliser un travail crédible".  D’autres leaders s’en remettent au travail des experts de l’OIF. "S’ils nous disent à l’issue de leur mission que le fichier électoral est bon, nous leur feront confiance", a déclaré sous anonymat un responsable du Combat pour l’alternance pacifique (CAP2015), la coalition qui soutient Jean-Pierre Fabre. Mi-mars, ce dernier avait porté plainte en Belgique pour faux en informatique et usage de faux contre Zetes, la société qui fournit le matériel d’enrôlement biométrique à la Ceni. 

À quelques jours de la présidentielle, la question de la fiabilité du fichier électoral divise plus que jamais la classe politique togolaise. 

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