RDC : polémique, loi coloniale et fosses communes
La découverte d’une fosse commune à Maluku suscite l’émoi et un débat sur les modalités d’inhumation des cadavres non réclamés par leur famille. Surprise : c’est une loi coloniale qui est encore en vigueur.
En RD Congo, une affaire en cache souvent une autre. Alors que les circonstances dans lesquelles 421 corps ont été nuitamment inhumés le 19 mars dans une fosse commune du cimetière Fula-Fula de Maluku, en banlieue kinoise, soulèvent bien des interrogations, la polémique enfle sur la législation en vigueur en matière funéraire. Celle-ci date en effet de l’époque coloniale. Plus de cinquante ans après l’indépendance !
"C’est la branche orpheline du droit congolais", a reconnu Évariste Boshab, vice-Premier ministre chargé de l’Intérieur, appelant les députés à se pencher sur la question. D’autant que le texte de référence portant sur les déclarations de décès, les autorisations d’inhumer, la levée des corps, les délais pour les funérailles, les éventuelles autopsies et les modalités des obsèques est une ordonnance du pouvoir colonial belge, adoptée le 15 mars 1950 et qui ne comprend qu’un seul article.
Législation obsolète
Une législation obsolète, qui se réfère elle-même à des textes réglementaires signés entre 1907 et 1915. Des dispositions qui font toujours allusion aux "villages indigènes" et à la "Colonie". La procédure paraît pourtant simple : à Kinshasa – ville de plus de 10 millions d’habitants avec au moins 600 morts par jour -, les cadavres non réclamés par leurs familles sont envoyés à la morgue centrale, qui procède à un "enterrement collectif" après un délai de deux à trois mois, selon Boshab.
Et le ministre s’appuie sur des chiffres : l’an dernier par exemple, 84 corps ont ainsi été enterrés le 2 avril, 343 le 8 juin et 88 le 21 décembre. Une centaine d’autres dépouilles doivent bientôt être inhumées, la morgue de Kinshasa pouvant contenir au maximum 310 cadavres. Pour lui, la polémique que suscite la découverte de la fosse commune de Maluku n’a aucune raison d’être. Il ne s’agirait que de la "politisation" d’une procédure d’inhumation en vigueur depuis des lustres.
"Jusqu’ici, cela n’avait pas posé problème, estime pour sa part le député Christophe Lutundula. Moi-même, qui vis à Kinshasa depuis une trentaine d’années, je ne savais pas que l’État procédait à des enterrements collectifs pour des indigents ou d’autres cadavres abandonnés. Il est temps de faire évoluer notre législation." La balle est dans le camp des élus.
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