Présidentielle au Burundi : Nkurunziza, le chef d’État sortant, prêt à être désigné candidat

Le parti au pouvoir au Burundi s’apprêtait à désigner samedi le chef de l’État sortant, Pierre Nkurunziza, comme son candidat à la présidentielle du 26 juin, une candidature très controversée dont les observateurs craignent qu’elle ne débouche sur des violences.

Pierre Nkurunziza lors d’une rencontre avec les jeunes de CNDD-FDD, le 9 mai 2014 à Bujumbura. © Roberto Schmidt/AFP

Pierre Nkurunziza lors d’une rencontre avec les jeunes de CNDD-FDD, le 9 mai 2014 à Bujumbura. © Roberto Schmidt/AFP

Publié le 25 avril 2015 Lecture : 3 minutes.

Un congrès du parti présidentiel, le Cndd-FDD, était convoqué samedi matin à son siège national dans la capitale Bujumbura.

Officiellement, les candidatures sont ouvertes. Mais un haut cadre du parti s’exprimant sous couvert d’anonymat a affirmé à l’AFP que les jeux étaient faits: ce sera Pierre Nkurunziza, à la tête de l’Etat depuis 2005 et réélu en 2010, qui n’a jamais caché son intention de briguer un troisième mandat.

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L’opposition et la société civile, vent debout contre ce troisième mandat qu’elles jugent inconstitutionnel et contraire aux accords d’Arusha qui avaient ouvert la voie à la fin de la longue guerre civile burundaise (1993-2006), parlent d’ores et déjà de "coup d’État" et promettent de continuer à défiler pour faire renoncer Pierre Nkurunziza, même après le congrès.

Elles ont annoncé des manifestations "pacifiques" dès dimanche, qu’elles prévoient monstres à Bujumbura.

Le gouvernement, qui a multiplié les mises en garde contre toute tentative de "soulèvement" ces dernières semaines et menacé de faire intervenir l’armée, a interdit les manifestations à partir de samedi dans tout le pays.

"Le gouvernement interdit toute manifestation pour quelque raison que ce soit sur l’ensemble du territoire du pays à partir de samedi, sauf les réunions politiques en rapport avec la campagne électorale", c’est-à-dire les meetings électoraux, a annoncé vendredi le ministre de l’Intérieur, Edouard Nduwimana.

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Le gouvernement a donné le ton dès la semaine dernière: une soixantaine de personnes ont été arrêtées et inculpées de "participation à un mouvement insurrectionnel", infraction passible de la prison à perpétuité, lors de premiers mouvements de rue contre ce troisième mandat annoncé.

"Frondeur" évincés

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Dans le petit pays d’Afrique des Grands-Lacs, où la société civile est très active, un bras de fer semble donc s’annoncer.

Aucun des avertissements lancés ces derniers mois contre les risques de dérapages en cas de candidature de Pierre Nkurunziza par la communauté internationale – Union européenne, États-Unis, Union africaine et jusqu’au Conseil de sécurité de l’ONU – n’auront non plus porté leurs fruits.

Le camp du chef de l’Etat est même allé jusqu’à faire le ménage au sein du parti présidentiel, divisé, pour assurer son investiture à Pierre Nkurunziza, ex-chef rebelle durant la guerre civile et chrétien "born again".

Quelque 130 hauts cadres "frondeurs", ouvertement opposés à ce troisième mandat, ont été évincés ces dernières semaines. Certains ont été emprisonnés, d’autres ont choisi la clandestinité, disant craindre "pour leur vie".

Avant cela, Pierre Nkurunziza avait limogé de hauts responsables militaires, dont le chef des services de renseignement Godefroid Niyombare, qui l’avaient mis en garde contre des risques pour la sécurité du pays s’il se représentait.

Le Burundi, l’un des pays les plus pauvres de la planète, qui vit sous perfusion de l’aide internationale, se remet à peine de sa guerre civile.

L’histoire post-coloniale de cet ex-protectorat belge, indépendant depuis 1962, a été marquée par des massacres inter-ethniques. A travers le pays, la population craint désormais une redite de ces conflits.

D’autant que les jeunes du parti au pouvoir, les Imbonerakure, accusés par l’ONU d’être une "milice" et de multiplier les intimidations et exactions à l’approche des élections, n’ont pas caché leur intention d’en découdre si l’on empêchait in fine leur champion, Pierre Nkurunziza, de se représenter.

Plusieurs milliers de Burundais ont d’ailleurs déjà fui au Rwanda voisin, terrorisés par les menaces des jeunes du Cndd-FDD qui, disent-ils, traquent les opposants au président sortant.

De son côté, la communauté internationale a, par la voix d’un ambassadeur occidental en poste à Bujumbura, averti le président sortant que tout dérapage d’ici aux élections aurait "de graves conséquences" dans ses relations avec Bujumbura.

La présidentielle sera précédée fin mai de législatives et de communales.

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