Bénin : la Banque de l’habitat peine à loger

Née dans le cadre d’une initiative publique, la Banque de l’habitat du Bénin a été confiée au privé. Mais l’état n’a pas tenu toutes ses promesses, et l’établissement s’est développé très lentement.

Face au coût de la construction qui ne cesse d’augmenter, la banque réclame un soutien plus actif de l’État. DR

Face au coût de la construction qui ne cesse d’augmenter, la banque réclame un soutien plus actif de l’État. DR

ProfilAuteur_FredMaury

Publié le 21 janvier 2013 Lecture : 3 minutes.

Décideurs politiques et banquiers peuvent-ils aller main dans la main ? Est-il imaginable que les premiers fixent les lignes et les ambitions, tout en confiant la gestion d’institutions à but social aux seconds ? C’est l’objectif que se sont fixé il y a bientôt une décennie le Bénin et le groupe Bank of Africa (BOA). Au tournant du millénaire, le gouvernement de ce petit pays d’Afrique de l’Ouest s’inquiète des difficultés d’accès au logement des populations à revenus intermédiaires. Il décide donc de créer une institution financière spécialisée, en évitant un écueil : celui de la mauvaise gestion. La Banque de l’habitat du Bénin (BHB) est née.

« La volonté de l’État était de trouver un outil de financement de l’habitat mais d’en confier la gestion au secteur privé pour éviter les dérives connues ailleurs », explique Mamadou Mbengue, directeur général de BHB. Au terme d’un appel d’offres, BOA est retenu. Le groupe financier est un familier du pays : il possède déjà à l’époque la première banque locale, BOA Bénin. Il obtient la gestion de la nouvelle institution ainsi que le droit de constituer un tour de table réellement privé. Au final, l’État ne détient que 10 % des parts, BOA étant majoritaire à côté de ses partenaires historiques, les agences de développement Proparco (France) et FMO (Pays-Bas), ainsi que des institutions béninoises comme la Caisse nationale de sécurité sociale et La Poste.

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« La cible de la banque, ce sont les ménages à revenus modestes, explique Mamadou Mbengue. L’État devait aider en nous permettant d’abaisser les taux et d’allonger la durée des crédits. Il devait notamment affecter des fonds, pour 6 milliards de F CFA [9,1 millions d’euros, NDLR], à la banque. » Malheureusement, seule une première tranche de 1 milliard de F CFA a été versée. Les tranches suivantes (500 millions par an pendant dix ans) ne l’ont jamais été. Un problème crucial. « Le principal souci du financement de l’habitat dans nos régions c’est la question de l’accès à des ressources longues, explique un financier. Sans cela, impossible de prêter à long terme et donc de financer l’accès à la propriété. »

C’est sa maison mère, Bank of Africa, qui lui alloue l’essentiel des fonds nécessaires.

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BHB ne tient, depuis, que par le soutien de sa maison mère, BOA, qui lui alloue l’essentiel des fonds nécessaires. La banque a également lancé sur le marché financier régional un emprunt de 2 milliards de F CFA. « Parmi les principaux projets arrivés à terme, il y a la construction de 2 000 logements [à Cotonou, Porto-Novo et Parakou], rappelle Mamadou Mbengue. BHB en a financé l’essentiel, mais l’État a aussi joué son rôle en mettant à disposition les terrains et en développant les réseaux d’eau et d’électricité. » Quelque 80 % des logements seraient livrés et habités.

Double marque

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Mais le bilan de BHB reste modeste et, surtout, loin des ambitions initiales. Avec 20 employés et 11 000 clients, l’établissement affiche un total de bilan de moins de 27 milliards de F CFA, pour un total de crédits de 22 milliards. Pour les particuliers, l’emprunt moyen tourne entre 15 millions et 18 millions de F CFA. La banque, pour dynamiser son activité, espère lancer bientôt un crédit habitat sous la double marque BHB et BOA.

Pour le reste, après huit années d’activité, Mamadou Mbengue se risque à tirer quelques enseignements. « Sur le segment des logements économiques, une politique de soutien actif de l’État est indispensable. Pour trouver des ressources longues, évidemment, mais pas uniquement : un coup de pouce fiscal est indispensable. Nous avons en effet été confrontés à un problème de solvabilité des ménages : les crises qui ont touché le pays ont affaibli le pouvoir d’achat, tandis que le coût de la construction n’a cessé d’augmenter. »

Une bonne nouvelle toutefois pour le Bénin : à la différence de nombreux pays, comme la Côte d’Ivoire, où les banques de l’habitat ont sombré, la saine gestion de BOA a permis de maintenir l’institution à flot. En 2011, elle a même distribué des dividendes.

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