Burundi : les contestataires refusent de céder au diktat des autorités
Les opposants à un troisième mandat du président burundais Pierre Nkurunziza refusaient dimanche de se plier à l’injonction des autorités qui ont exigé un « arrêt immédiat » de leur « insurrection », et qualifiaient cette sommation de « déclaration de guerre au peuple ».
Dans plusieurs quartiers contestataires de la capitale, des manifestants ont renforcé leurs barricades samedi soir à l’issue d’une journée de "trêve", craignant une intervention des forces de sécurité à qui les autorités ont donné 48 heures pour les démanteler. Les opposants réaffirmaient avec fermeté leur refus d’abandonner leur mouvement tant que M. Nkurunziza n’aura pas renoncé à sa candidature, qu’ils jugent contraire à la constitution.
Dans le quartier de Musaga, au sud du centre-ville, des policiers arrivés dimanche dès l’aube ont réussi à dégager la majeure partie des barricades. "Un groupe de policiers s’est déployé à l’aude au pas de course, ils nous ont surpris, certains d’entre nous se préparaient à aller à la messe d’autres dormaient encore", explique à l’AFP Claude, un étudiant de 25 ans. "On ne peut pas résister, mais même s’ils ont déblayé, on remontera les barricades", assure-t-il.
Selon des témoins, il y a eu beaucoup de coups de feu et plusieurs blessés. Un d’entre eux serait décédé à son arrivée à l’hôpital, selon des témoignages recueillis par l’AFP.
"Les militaires sont venus nous dire que les routes devaient être débloquées et qu’on ne pouvait pas résister à des gens armés de fusils", a expliqué à l’AFP Fabrice, un des leaders du quartier. "Nous avons décidé de laisser faire, mais ça ne veut pas dire que nous n’allons pas assurer notre sécurité, ce soir nous reprendrons nos rondes", a-t-il ajouté.
Le Conseil national de Sécurité (CNS) a exigé samedi que cesse "immédiatement et sans condition aucune, ce mouvement d’insurrection" et ordonné aux forces de l’ordre de "libérer les voies de communication" sous 48 heures, à Bujumbura et dans le reste du pays. "Les mesures du Conseil national de Sécurité, on s’en fout! Que Nkurunziza parte d’abord! Sinon nous allons continuer", a réagi Fiacre, 26 ans, dans le quartier contestataire de Cibitoke, au nord du centre-ville.
Le "Collectif contre un 3e mandat", qui regroupe un millier d’associations de la société civile et les deux centrales syndicales du pays, "considère la déclaration du Conseil national de sécurité (CNS) comme une déclaration de guerre au peuple burundais", a réagi Pacifique Nininahazwe, un de ses dirigeants, passé dans la clandestinité.
"Jusqu’ici, aucun président n’a gagné contre son peuple", a-t-il averti, citant Zine El Abidine Ben Ali en Tunisie, Hosni Moubarak en Egypte ou encore Blaise Compaoré au Burkina Faso, qui tous ont dû quitter le pouvoir après être restés sourds aux revendications de la rue. "Les manifestations vont continuer jusqu’à ce que Pierre Nkurunziza comprenne qu’il ne pourra pas avoir un troisième mandat, qu’il ne pourra pas violer notre Constitution", a assuré M. Nininahazwe.
Au moins dix-huit personnes ont été tuées lors des manifestations qui ont débuté le 26 avril, au lendemain de la désignation du président sortant comme candidat de son parti à un nouveau mandat.
Faisant fi de la contestation, le président Nkurunziza avait été le premier vendredi à déposer son dossier de candidature à la présidentielle du 26 juin au siège de la Commission électorale (Céni). Au total, huit candidats ont été enregistrés par la Céni après l’expiration du délai de dépôt des dossiers samedi soir. Parmi eux, le principal opposant, Agathon Rwasa, chef historique des FNL, la plus ancienne rébellion hutu, qui a réclamé un décalage du calendrier électoral.
La campagne électorale des législatives et communales du 26 mai, qui précédent la présidentielle du 26 juin, a été officiellement ouverte dimanche.
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