Ménard, le Martel de Béziers
Après sa sortie controversée sur le fichage des enfants musulmans dans sa ville, le maire d’extrême droite Robert Ménard est revenu sur ses propos. Une gaffe, vraiment ?
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Nicolas Michel
Romancier et journaliste, il est responsable des pages consacrées à la culture et auteur d’une dizaine de romans et albums illustrés.
Publié le 14 mai 2015 Lecture : 2 minutes.
Dans son bureau de la mairie de Béziers, il y a un peu plus d’un mois, Robert Ménard déclarait à Jeune Afrique : "Dans ma ville, où près de 65 % des enfants des écoles primaires et maternelles sont musulmans, voire plus de 80 % dans certaines, vous n’intégrez plus personne."
Il ajoutait ensuite : "Ce n’est pas un discours idéologique, ce n’est pas une statistique inventée, c’est un constat. Constat que vous ne pouvez pas faire puisqu’il ne vous a pas échappé que les statistiques ethniques sont interdites.
>> À lire aussi : Robert Ménard, de Reporter sans frontières au Front national
Mais elles existent quand même ! Entrez dans une prison et demandez au directeur s’il ne sait pas combien il y a d’Arabes et de Noirs…" Le 4 mai, le maire apparenté FN a de nouveau entonné cette antienne à la télévision – avec des pourcentages différents – et récolté au passage une convocation à l’hôtel de police de Montpellier et une perquisition en règle à l’hôtel de ville de Béziers.
Normal, l’article 226-19 du code pénal français interdit de conserver des listes où des données personnelles, comme la religion, apparaîtraient. Mais après avoir soutenu l’idée que "les prénoms disent les confessions", Ménard a baissé d’un ton et affirmé : "Il n’y a pas de fichage des élèves à Béziers." Insuffisant bien sûr pour calmer la polémique lancée, répercutée d’articles en tweets et parodies dans les médias et sur les réseaux sociaux.
Parfait connaisseur du monde de la communication, le fondateur de Reporters sans frontières s’échine avec une régularité de métronome à faire parler de lui, surtout, et de Béziers, un peu, avec des mesures chocs conçues pour heurter ceux qu’il nomme les "bien-pensants".
Armement de la police municipale, crèche dans la mairie, interdiction du linge aux fenêtres, célébration d’un héros de l’Algérie française… Le but poursuivi est toujours le même : faire passer un message à l’électorat d’extrême droite, bien au-delà de Béziers, et peser sur le plan national.
En évoquant un chiffre de 60 % ou plus d’enfants musulmans dans les écoles, l’édile sait pertinemment que c’est ce pourcentage disproportionné et non représentatif au niveau national – environ 5 % des Français sont "d’origine musulmane" et 25 % d’entre eux se disent pratiquants – qui va tourner en boucle pendant quelques jours dans les médias, et frapper les esprits.
Robert Ménard ne dérape pas, il s’impose dans le concert xénophobe comme Jean-Marie Le Pen mettait en musique l’antisémitisme à coups de calembours fétides. Béziers n’est au fond qu’un laboratoire au service d’une carrière individuelle.
Préparez-vous, bientôt notre homme trouvera un nouveau truc pour occuper les unes, accroître l’islamophobie ambiante et intensifier son collé-serré avec Marine Le Pen. Allez, une suggestion pour la route ! Une belle et grande statue de Charles Martel, ce serait chouette sur le parvis de l’hôtel de ville de Béziers, non ?
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