Le jihadiste algérien Belmokhtar dément l’allégeance de son groupe à l’EI
Le chef jihadiste Mokhtar Belmokhtar a réaffirmé la loyauté de son groupe, Al-Mourabitoune, à Al-Qaïda et démenti l’allégeance à l’État islamique (EI) proclamée la veille par un autre dirigeant, laissant présager une sérieuse discorde dans la hiérarchie du mouvement.
L’imbroglio a débuté jeudi. Un enregistrement audio attribué à un des chefs du groupe, Adnan Abou Walid Sahraoui, est alors diffusé par l’agence privée mauritanienne Al-Akhbar, qui publie régulièrement les communiqués de jihadistes.
L’enregistrement annonce qu’Al-Mourabitoune fait "allégeance au calife des musulmans Abou Baqr al-Baghdadi", en référence au chef de l’État islamique. Son auteur en profite pour inviter "tous les mouvements jihadistes à prêter allégeance" au chef de l’EI "pour unifier la parole des musulmans et resserrer leurs rangs".
Mais le démenti ne tarde pas. Vendredi, l’agence Al-Akhbar ainsi que le site américain spécialisé SITE rapportent que Mokhtar Belmokhtar, a réagi, jugeant cet acte d’allégeance nul et non avenu.
La première déclaration "ne respecte pas les conditions et règles de la Choura", organe central d’Al-Mourabitoune, et par conséquent, "n’engage pas" le groupe "qui reste fidèle à son allégeance à Ayman al-Zawahiri sur la voie du jihad", dit le communiqué attribué à Belmokhtar, et authentifié auprès du mouvement jihadiste par des spécialistes de l’agence Al-Akhbar.
"À ce sujet, le conseil de la Choura publiera un communiqué après des consultations en cours", conclut le texte.
SITE indique de son côté que le communiqué a été publié jeudi sur Twitter mais ne pas avoir pu en déterminer l’authenticité.
Un nouvel émir d’Al-Mourabitoune ?
L’EI, qui contrôle de larges pans de territoires en Irak et en Syrie, est devenue une franchise de choix dans le monde jihadiste, attirant des combattants de l’étranger et l’adhésion de groupes islamistes comme Boko Haram, actif au Nigeria et dans des pays voisins.
Les spécialistes de l’agence mauritanienne voient dans cet épisode une confirmation de l’ascension d’Adnan Abou Walid Sahraoui au sein du groupe. Ils pointent aussi des divisions au sein de la direction d’Al-Mourabitoune qui, selon eux, pourraient conduire à une scission.
Jeudi, l’agence n’hésitait d’ailleurs pas à affirmer qu’Adnan Abou Walid Sahraoui était désormais le nouvel "émir" (chef) d’Al-Mourabitoune.
L’expert mauritanien du jihadisme dans le Sahel, Isselmou Ould Salihi, lisait aussi jeudi, dans la déclaration attribuée à Adnan Abou Walid Sahraoui, une "montée en puissance" de ce rival de Belmokhtar.
Al-Mourabitoune est né en 2013 de la fusion des "Signataires par le sang" de Mokhtar Belmokhtar – cerveau de la meurtrière prise d’otages du site gazier algérien d’In Amenas – et du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), un des groupes jihadistes ayant contrôlé le nord du Mali jusqu’au lancement de l’opération française Serval en janvier 2013.
Adnan Abou Walid Sahraoui s’est plusieurs fois exprimé au nom du Mujao mais aussi d’Al-Mourabitoune, notamment pour revendiquer des enlèvements, attaques ou attentats suicides dans le nord du Mali.
Le Mujao, Aqmi et d’autres groupes jihadistes ont en grande partie été chassés de ces régions par une intervention militaire internationale déclenchée en janvier 2013 à l’initiative de la France et toujours en cours. Mais des zones entières échappent encore au contrôle du pouvoir central malien.
Al-Mourabitoune a ainsi revendiqué le premier attentat contre des Occidentaux à Bamako, la capitale, le 7 mars, ayant visé un bar très fréquenté par les locaux et les expatriés qui avait tué trois Maliens, un Français et un Belge.
Le mouvement jihadiste a aussi revendiqué un attentat-suicide commis le 15 avril contre le contingent nigérien d’une base de la Mission de l’ONU au Mali (Minusma), ayant tué deux civils dans le Nord.
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