Burundi : ce qu’il faut savoir de la situation au deuxième soir du coup d’État

Une nouvelle nuit d’incertitude attendait les Burundais jeudi alors que les militaires putschistes et les fidèles du président Nkurunziza continuaient de s’affronter pour le contrôle des moyens de communication. Voici ce qu’il faut savoir de la situation.

Un Burundais enjambant une barricade dans Bujumbura. © Erik Esbjornsson/AP/SIPA

Un Burundais enjambant une barricade dans Bujumbura. © Erik Esbjornsson/AP/SIPA

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Publié le 14 mai 2015 Lecture : 4 minutes.

Qui tient le pouvoir ?

Difficile à dire. La confusion la plus totale règne. Le général Niyombare a annoncé mercredi la destitution du président Pierre Nkurunziza et les putschistes déclaraient jeudi midi contrôler la quasi-totalité de la capitale. Mais la présidence continue de son côté d’affirmer que la tentative de coup d’État a échoué. Contacté par Jeune Afrique, Willy Nyamitwe, conseiller chargé de la communication de la présidence burundaise, affirme que "la situation se normalise de plus en plus" à Bujumbura.

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Joint au téléphone par la RTNB, la radio nationale, Pierre Nkurunziza a quant à lui lancé un message en kirundi au peuple burundais, l’appelant à garder son calme. Il a également remercié les forces de défense et de sécurité du Burundi pour le "bon travail effectué pour déjouer la tentative de coup d’État". Au cours de la même intervention, le président burundais a également affirmé que "beaucoup de putschistes se sont rendus" et a appelé ceux qui résistent encore à déposer les armes.

Pierre Nkurunziza a également assuré que "les frontières du pays ne sont pas fermées", tandis que loyalistes et putschistes affirment chacun de leur côté contrôler l’aéroport.

Jeudi soir, alors qu’une pluie s’est abattue sur Bujumbura, le rapport de force reste donc incertain et la population s’attend à de nouveaux combats vendredi. Des membres de la société civile burundaise, en première ligne de la campagne anti-troisième mandat de Nkurunziza, ont confié à Jeune Afrique qu’ils craignaient pour leur vie. "Nous vivons cachés, explique l’un d’entre eux. Si les troupes loyales à Pierre Nkurunziza nous retrouvent, nous serons tués".

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Qui a gagné la bataille de la communication ?

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La journée de jeudi a avant tout été l’occasion pour les deux camps de tenter de prendre le contrôle des moyens nationaux de communication. Cinq des six radios les plus importantes du pays ont fait l’objet d’attaques, trois par la police, une par des manifestants, et une par les putschistes. La Radio publique africaine (RPA), principale radio indépendante du pays, était en flammes. Elle avait été fermée par les autorités pendant les manifestations anti-troisième mandat de Nkurunziza avant d’émettre à nouveau mercredi après l’annonce par les putschistes de la fin du régime de Nkurunziza.

De violents combats ont également éclaté autour du siège de la télévision et de la radio nationales – seul moyen de communication permettant d’atteindre tout le peuple – entre militaires loyalistes et putschistes. Au moins trois militaires ont été tués. Selon le directeur de la RTNB, qui a cessé d’émettre, avant de reprendre, pendant quelques heures, la radio est toujours aux mains des loyalistes. Le général Niyombare a de son côté confirmé que ses troupes s’étaient retirées des abords de la RTNB. "Les putschistes ont tenté une nouvelle offensive sur la RTNB, la radio et télévision nationales, mais ils ont été repoussés", a affirmé Willy Nyamitwe, conseiller chargé de la communication de la présidence burundaise.

Où est Pierre Nkurunziza ?

La question reste d’actualité. Le chef de l’État burundais, qui a lancé un appel au calme via Twitter et sur les ondes de la RTNB jeudi, n’a toujours pas été localisé. Certains affirment qu’il a quitté Dar Es-Salaam pour Kampala, tandis que d’autres croient l’avoir aperçu à Nairobi.

Contacté par Jeune Afrique, son porte-parole, Willy Nyamitwe, n’a pas souhaité donner de plus amples informations. À la question "Peut-on s’attendre à un retour imminent du président Nkurunziza au Burundi ?", il a déclaré : "C’est une question d’ordre sécuritaire, je ne peux y répondre".

Quelles sont les réactions internationales ?

La communauté internationale commencé à réagir. Le Conseil de sécurité des Nations unies s’est réuni jeudi à la mi-journée pour évoquer la situation burundaise. Les ambassadeurs des 15 pays du Conseil ont entendu un exposé de la situation fait par vidéoconférence depuis Nairobi par l’émissaire de l’ONU au Burundi Saïd Djinnit.

Selon des diplomates présents, celui-ci a souligné qu’il était encore prématuré de prédire le succès ou l’échec du coup d’État et qu’on ne savait "pas encore clairement" où se trouve le président burundais Pierre Nkurunziza. Selon Saïd Djinnit, cité par un diplomate, il n’y a "pas de composantes ethniques pour l’instant dans les violences" en cours, malgré les craintes d’affrontements possibles entre Hutus et Tutsis.

Le Conseil a condamné les violences et appelé à un retour de l’État de droit.

Pierre Nkurunziza, demeure le président "légitime", ont en outre affirmé jeudi les États-Unis. "Nous le reconnaissons comme le président légitime", a répondu le porte-parole du département d’État Jeffrey Rathke, interrogé sur le sort du président burundais.

La France a quant à elle appelé "toutes les forces en présence à renoncer à la violence et à prendre les mesures nécessaires pour que le processus électoral au Burundi puisse reprendre le plus vite possible, dans le respect de la Constitution et des accords d’Arusha".

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