Pétrole : mouvements de fonds vers l’aval

Helios Investment Partners, Phoenix Capital Management, Emerging Capital Partners… Depuis deux ans, les investisseurs témoignent d’un intérêt croissant pour la distribution de pétrole et de gaz.

Publié le 10 janvier 2013 Lecture : 3 minutes.

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Pétrole : quand les juniors taquinent les majors

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La transaction a tourné court fin mai. Trois mois plus tôt, le fonds d’investissement Emerging Capital Partners (ECP) était entré en négociation exclusive avec Addax & Oryx Group pour racheter ses activités de stockage et de distribution de pétrole et de gaz dans 21 pays africains. Les discussions auraient achoppé sur le prix (plusieurs centaines de millions d’euros), mais ce deal manqué reste emblématique de l’intérêt croissant des fonds d’investissement pour les activités aval du secteur pétrolier et gazier africain. Et réciproquement, puisque ECP avait été préféré à deux concurrents sérieux, les traders Puma Energy et Vitol. Contrairement à ces spécialistes du secteur, le fonds pouvait faire valoir son besoin de reprendre la totalité des salariés.

En mars, un autre deal – de moindre envergure – s’inscrivait déjà dans cette tendance. Le fonds West Africa Emerging Markets Growth Fund (WAEMGF), lancé par la société financière ivoirienne Phoenix Capital Management (PCM), se portait acquéreur de 14 % du capital du distributeur de carburant Pétro Ivoire. « Les rendements tournent autour de 22 % dans l’industrie. Dans le secteur du pétrole et du gaz, on peut dépasser 45 %, explique Wilfrid Korsaga, responsable des placements chez PCM. La distribution pétrolière, ce n’est pas sorcier. Les rendements s’accroissent avec les volumes. Plus on couvre le territoire, plus le nombre de stations-service est important, plus on fait de marketing et plus l’activité est rentable. Le nerf de la guerre, c’est le financement. » Le WAEMGF, très intéressé par les perspectives de diversification de Pétro Ivoire dans la distribution de butane, est d’ailleurs en phase d’évaluation de deux autres prospects au Ghana et au Burkina Faso.

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L’amont plus difficile d’accès

Si les majors se concentrent sur l’amont – exploration et production -, c’est parce que les perspectives de retour sur investissement y sont bien meilleures. Et si les fonds d’investissement y sont absents, c’est que le ticket d’entrée s’avère rédhibitoire pour eux. « Il faut des moyens colossaux », résume Wilfrid Korsaga, de Phoenix Capital Management. Mais les difficultés ne s’arrêtent pas là. Les compétences techniques nécessaires pour réduire au minimum les risques – eux-mêmes autrement plus importants – sont bien plus complexes que dans la gestion de l’aval. Contre-exemples notables : le fonds Blackstone, soutien de Kosmos Energy (qui a notamment découvert le gigantesque gisement Jubilee, au Ghana), et Helios Investment Partners, détenteur de 29,4 % du capital d’Eland Oil & Gas, bien positionné dans le delta du Niger. S.D.

Sillage

Ces deux événements seraient peut-être passés inaperçus s’ils ne s’inscrivaient dans le sillage d’une opération majeure. En février 2011, Shell s’est délesté de 80 % de ses opérations aval dans une quinzaine de pays africains, au profit de Vivo Energy, compagnie née de l’alliance du trader Vitol et du fonds d’investissement Helios Investment Partners. Dans la balance, 1 milliard de dollars (environ 725 millions d’euros à l’époque), plus de 1 000 stations-service à travers le continent et plus de 2 000 employés. « C’est un secteur qui nous intéresse énormément, au moment où on assiste à l’émergence d’une classe moyenne et à l’explosion de la consommation », résume Dabney Tonelli, partenaire chez Helios, qui compare les dynamiques de ce nouvel investissement à celles de ses opérations précédentes dans la banque de détail ou les télécoms.

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« Ces opérations interviennent alors que les majors se désengagent de l’aval pour se concentrer sur la prospection et la production, plus rentables », explique Alan Gelder, responsable du secteur pétrolier au sein du cabinet de recherche et de conseil Wood Mackenzie. « Les fonds d’investissement ont déjà largement investi dans ces actifs en Europe, ajoute-t-il. Maintenant que le risque politique en Afrique a diminué, le même mouvement peut y avoir lieu. » 

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