Cannes 2015 : « Dégradé », un salon de beauté nommé Gaza

Présenté lors de la Semaine de la critique, « Dégradé » est un huis clos original au scénario habile. Ce film revient sur les déchirements entre Palestiniens et le vécu des femmes. Entre drame et comédie.

Arab (à g.) et Tarzan Nasser, à Paris, le 11 mai. © Andrew C. Kovalev pour J.A.

Arab (à g.) et Tarzan Nasser, à Paris, le 11 mai. © Andrew C. Kovalev pour J.A.

Renaud de Rochebrune

Publié le 18 mai 2015 Lecture : 2 minutes.

Dramatique ou cocasse. En 2007, une famille palestinienne mafieuse vole le lion du zoo de Gaza et l’exhibe pour montrer sa puissance et son mépris des autorités. Les islamistes du Hamas au pouvoir mènent alors une véritable opération militaire – "Libérez le lion" – pour mettre fin à cette situation.

Une intervention qui se soldera par un bain de sang. Voulant réaliser un long-métrage sur la vie quotidienne à Gaza montrant les difficultés absurdes que doit affronter la population enfermée dans cette enclave sans issue, deux jeunes réalisateurs palestiniens aujourd’hui en exil à Amman, les frères Tarzan et Arab Nasser, ont construit à partir de cette histoire un scénario habile.

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Ils ont imaginé un petit salon de coiffure situé face à la maison des kidnappeurs du félin. La patronne, sa fille et les clientes se retrouvent coincées à l’intérieur en attendant la fin des combats.

Tout le film Dégradé, présenté à Cannes le 17 mai dans le cadre de la Semaine de la critique, se déroule dans l’unique décor de ce mini-institut de beauté d’où l’on peut simplement voir à travers la vitrine une partie du déroulement des événements dramatiques et évidemment inquiétants.

Ambition commune

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Les treize femmes présentes sont obligées de vivre pendant de très longues heures dans ce huis clos qui renvoie bien sûr à celui qui caractérise la vie à Gaza. Et comme ces personnages sont de toutes origines et de toutes situations sociales ou familiales, le film permet de dresser un portrait saisissant de la société gazaouie, où il faut lutter en permanence et faire preuve autant que possible d’un grand recul, ou d’une grande capacité de déni, pour pouvoir mener une vie à peu près normale.

Qu’on soit sage ou excentrique, riche ou pauvre, religieux ou non pratiquant, né sur place ou récent immigré, supporter du Hamas ou sceptique vis-à-vis de tous les politiques.

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Les frères Nasser sont de vrais jumeaux au sens le plus fort du terme : l’un peut terminer sans problème une phrase commencée par l’autre, et avec leurs cheveux longs et leurs barbes bien fournies, style beatniks des années 1970, ils sont tout à fait semblables.

Ils ont en tout cas une ambition commune : mettre l’accent, à la différence de la plupart des films palestiniens, non pas sur le conflit avec Israël et sur les hommes combattants, mais "sur les affrontements internes entre Palestiniens à partir du vécu des femmes", expliquent-ils.

Et c’est ce qui confère à ce film à la fois son originalité et son efficacité en tant que témoignage sur un lieu unique au monde. 

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