Togo : Fabre ne lâche rien

Obstiné, le candidat de l’ANC ne reconnaît toujours pas sa défaite. Et rêve secrètement du statut de chef de l’opposition.

Jean-Pierre Fabre (au centre) se rendant aux urnes, le 25 avril à Lomé. © Erick Christian Ahounou

Jean-Pierre Fabre (au centre) se rendant aux urnes, le 25 avril à Lomé. © Erick Christian Ahounou

GEORGES-DOUGUELI_2024

Publié le 21 mai 2015 Lecture : 2 minutes.

Jean-Pierre Fabre n’a pas été élu, mais il n’est pas homme à renoncer. C’est même sa marque de fabrique : le leader de l’Alliance nationale pour le changement (ANC) a les qualités de ses défauts.

Ses détracteurs pestent contre cet obstiné qui ne connaît pas le doute, tandis que ses partisans n’y voient que ténacité et cohérence. Quoi qu’il en soit, le tribun de Kodjoviakopé (ouest de Lomé) promet de perturber le sommeil de Faure Gnassingbé en maintenant ses marches de protestation.

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Peu lui importe que la Cour constitutionnelle ait proclamé, le 3 mai, la victoire du président sortant. Plutôt quitter la politique que de montrer le moindre signe de faiblesse dans son bras de fer permanent avec le chef de l’État.

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C’est un fonds de commerce qu’il a arraché à son ancien mentor, Gilchrist Olympio. Son discours populiste attire aussi bien ceux qui perçoivent Faure comme un héritier illégitime que ceux qui rejettent les Gnassingbé par réflexe ethnorégionaliste.

La fracture Nord-Sud est toujours béante en dépit des efforts du pouvoir et des origines "sudistes" de la mère du chef de l’État. Faure a chouchouté Lomé et sa région en la dotant de routes et en rallongeant des quais portuaires.

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Lors des dernières législatives de 2013, le parti au pouvoir est parvenu à grappiller 2 sièges sur les 10 à pourvoir dans la circonscription du Grand Lomé, ce vivier électoral traditionnellement acquis à l’opposition. Mais cela n’a manifestement pas suffi pour influer sur les résultats de la présidentielle.

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Lassitude

Fabre, lui, espère bien en profiter. Et le temps joue en faveur de ce métis de père marseillais, qui a appris l’art de diriger en lisant les préceptes de L’Art de la guerre, du penseur et stratège militaire chinois Sun Tzu…

Il parie sur la lassitude de ceux qui votent pour le parti présidentiel et pour qui Faure est comptable des quarante-huit années que la famille Gnassingbé a passées au pouvoir. Mais le temps peut aussi jouer contre lui : lors de la présidentielle de 2020, Fabre aura 67 ans et se sera finalement rapproché du système s’il parvient à obtenir ce statut de chef de l’opposition (assorti d’avantages substantiels) auquel il tient tant.

Peut-il obtenir en promettant le changement, et en dépit d’un programme économique inexistant, l’adhésion de la jeunesse ? Rien n’est moins sûr. La hausse du niveau d’abstention – pas loin de la moyenne nationale, fixée à 40,01 % – enregistrée dans son fief de Lomé sonne comme un avertissement.

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Les lignes bougent et le Togo change. En témoigne l’apparition de nouvelles figures de l’opposition, à l’instar de Gerry Taama. Ce saint-cyrien de 40 ans, originaire de Kara, le fief des Gnassingbé, n’a obtenu qu’un faible score à la présidentielle (1,03 % des suffrages). Mais il a tenu un discours modéré et structuré qui a séduit au-delà de sa région d’origine. C’est peut-être cela l’avenir. 

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