Jérôme Ferrier : « Du gaz pour l’électrification des pays africains ! »

À l’occasion du congrès mondial de cette industrie, qui se tient à Paris, Jérôme Ferrier, président de l’Union internationale du gaz (UIG), a répondu aux questions de « Jeune Afrique » sur les défis gaziers qui touchent particulièrement le continent.

Le congrès mondial du gaz s’est ouvert le 1er juin sous la houlette de Jérôme Ferrier. © wgc2015

Le congrès mondial du gaz s’est ouvert le 1er juin sous la houlette de Jérôme Ferrier. © wgc2015

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Publié le 3 juin 2015 Lecture : 4 minutes.

Le Congrès mondial du gaz s’est ouvert ce 1er juin 2015 au Parc des expositions de la porte de Versailles à Paris. Sous la houlette de Jérôme Ferrier, président de l’Union internationale du gaz (UIG), plus de 3 500 professionnels du secteur – dont quelques 130 Africains – se rencontrent pour échanger : modalités de production d’électricité à partir de gaz, fabrication de Gaz naturel liquéfié (GNL), questions environnementales et logistiques, évolution des marchés, modèles économiques les plus pertinents… autant de sujets qui seront particulièrement discutés cette année.

Le Français, qui rend son tablier à la fin de la manifestation, a répondu à nos questions sur les défis gaziers qui touchent particulièrement le continent. C’est l’Américain David Carroll, du Gaz Technical Institute de Chicago qui prendra sa suite à la fin du congrès le 5 juin.

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Propos recueillis par Christophe Le Bec

Que peut-on attendre d’un évènement comme le Congrès mondial du gaz ?

C’est la « famille » gazière qui se réunit. Il ne s’agit pas d’une manifestation de lobbying – d’ailleurs, il y aura peu de représentants politiques -, mais plutôt d’un lieu d’échange entre des experts issus des entreprises du secteur – notamment des plus grandes comme Total, Chevron ou Engie (Ex GDF Suez) – et institutions du secteur, issus de 91 pays. Le gaz est une partie de la solution pour une planète durable, il s’agit de réfléchir ensemble, de partager les meilleures pratiques. C’est d’ailleurs la raison de la présence de Laurent Fabius, qui sera présent non pas comme ministre français des Affaires étrangères, mais en tant que président la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques de Paris (COP 21), prévue du 30 novembre au 11 décembre 2015.

>>>>> Lire aussi : L’Afrique en marche vers la COP21

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Quels sont les participants africains les plus impliqués ?

Depuis mon arrivée à la tête de l’Union internationale du gaz en 2011, le nombre de pays africains membres a augmenté : le Maroc, la Côte d’Ivoire et la Guinée Equatoriale sont venus s’ajouter à l’Algérie, la Tunisie, l’Égypte, le Cameroun, le Nigeria, l’Angola et le Mozambique. La plupart d’entre eux détiennent des réserves gazières, mais certains ne sont que consommateurs.

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Chaque pays membre envoie des délégués -issus des ministères, institutions et entreprises – au Congrès mondial du gaz. Les plus gros contingents viendront des deux producteurs africains de gaz les plus importants actuellement : le Nigeria et l’Algérie, avec, pour cette dernière, des représentants de la Sonatrach, très impliquée pour cette édition de Paris. Mon seul regret est toutefois de n’avoir pas pu encore convaincre deux pays au potentiel gazier majeur : le Congo-Brazzaville, que je connais bien pour avoir y avoir travaillé pour Total, ainsi que le Gabon.

Que peut apporter une organisation comme la vôtre aux pays africains ?

Des compétences pour définir les meilleures modalités pour un projet gazier ! Et en particulier pour l’utilisation du gaz pour la production locale d’électricité. Les premiers projets africains ont mis énormément de temps à voir le jour : celui de Boni, au Nigeria, dans lequel j’ai été impliqué pour Total, a mis 14 ans avant d’entrer en production… Au Nigeria, mais aussi au Mozambique ou au Cameroun, la plupart des projets gaziers africains sont uniquement tournés vers l’exportation. Or il est difficile voire impossible de changer en cours de projet la destination du gaz, définis avec les bailleurs de fonds et investisseurs. L’UIG veut aider avec son expertise à développer l’électrification grâce au gaz, en partenariat avec le programme « énergies renouvelables pour tous » mené par Kamde Yumkela, représentant spécial des Nations Unies, en association avec la Banque mondiale.

La conjoncture actuelle permet-elle l’avancée de tels projets en Afrique ?

La chute drastique des cours du pétrole a eu un impact sur les prix du gaz, ce qui a ralenti voir gelé les projets en cours de développement, notamment au Mozambique, malgré son immense potentiel. Mais nous apportons notre expertise sur des projets en Afrique de l’Est – en Tanzanie, au Kenya et l’Ouganda – définis dès le départ pour qu’une partie du gaz serve à la production d’électricité locale.

L’exploitation de gaz de schiste – dits non conventionnels – fait polémique en Algérie. Qu’en pensez-vous ?

L’Algérie – comme la plupart des grands pays producteurs de gaz comme la Russie – reste assez évasive sur sa stratégie gazière de long terme, notamment sur ses besoins intérieurs pour l’électrification. Le pays met en avant ses réserves non-conventionnelles notamment pour montrer sa capacité à tenir ses objectifs d’augmentation de ses exportations gazières vers l’Europe qui sont censées doubler sur la période 2005-2030, atteignant 115 milliards de mètres cubes par an.

Les experts de l’UIG, notamment les Américains, qui ont le plus d’expérience en la matière, peuvent bien sûr l’épauler dans ce domaine, en particulier sur les questions environnementales. Sans juger du bien ou mal-fondé des projets gaziers algériens non-conventionnels, pour les développer, il faudra prendre en compte de nombreux paramètres : la taille des réserves, non divulguée à ce jour, l’acquisition de nouvelles compétences techniques, la disponibilité en eau et, bien sûr, les relations avec les communautés locales et la sécurité dans le Sahara. L’Algérie n’est pas l’Amérique… À chacun son développement gazier…

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