Crise au Burundi : sommet de l’Afrique de l’Est, sans Nkurunziza

Les chefs d’Etats d’Afrique de l’Est se retrouvent dimanche à Dar es Salam (Tanzanie) pour tenter de trouver une issue à la crise au Burundi, après plus d’un mois de fronde populaire contre le président Pierre Nkurunziza, absent du sommet.

Lors d’une manifestation contre le président Pierre Nkurunziza, le 25 mai à Bujumbura. © AFP

Lors d’une manifestation contre le président Pierre Nkurunziza, le 25 mai à Bujumbura. © AFP

Publié le 31 mai 2015 Lecture : 3 minutes.

La réunion est jugée cruciale car le blocage est total entre le camp présidentiel et les manifestants hostiles à la candidature de M. Nkurunziza à un troisième mandat a l’élection présidentielle du 26 juin, mais le principal intéressé n’y participera pas.

Selon son porte-parole, "le président Nkurunziza sera représenté par son ministre des Relations extérieures" car "il est en train de faire campagne" pour les élections à venir.

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Le président burundais avait participé à un premier sommet le 13 mai, déjà dans la capitale économique tanzanienne, qui avait été bouleversé par une tentative de coup d’Etat. Son retour au pays avait précipité l’échec du putsch, sans étouffer la fronde dans les rues.

Malgré une sévère répression policière, les manifestants anti-troisième mandat ne faiblissent pas. La police a investi en force depuis deux semaines les quartiers contestataires de Bujumbura et tente chaque jour d’y empêcher à coups de kalachnikov tout rassemblement, sans parvenir à éteindre le feu de la contestation qui commence à prendre par endroits en province.

Les protestataires jugent un troisième mandat anticonstitutionnel et contraire aux accords de paix d’Arusha, qui avaient mis fin à la guerre civile burundaise entre majorité hutu et minorité tutsi (1993-2006). Les partisans du pouvoir estiment cette candidature légale, M. Nkurunziza n’ayant pas été élu à son accession au pouvoir en 2005 mais désigné par le parlement.

Un "pays au bord du gouffre"

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"Spirale de la violence", "pays au bord du gouffre", "atmosphère de peur et d’intimidation généralisée", "radicalisation": tous les observateurs mettent en garde contre une catastrophe annoncée.

En un mois, les violences ont fait plus d’une trentaine de morts, dont beaucoup de victimes des tirs de la police. Assassinat d’opposant, jets de grenades, lynchages, jeunes du parti présidentiel accusés d’agir en milice: certains incidents rappellent les sombres années ayant précédé la guerre civile, dont le pays était sorti exsangue.

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Les pays de l’Afrique des Grands lacs, région à l’instabilité chronique, sont à nouveau en première ligne face à cette crise. Des dizaines de milliers de Burundais ont trouvé refuge au Rwanda et en Tanzanie.

A défaut de se prononcer sur le coeur du problème, le troisième mandat de M. Nkurunziza – "ligne rouge" non négociable, selon le camp présidentiel -, l’Ougandais Yoweri Museveni, le Rwandais Paul Kagame, le Tanzanien Jakaya Kikwete et le Kényan Uhuru Kenyatta devraient a minima préconiser un report des élections générales, censées débuter vendredi prochain avec des législatives et des communales.

Hormis le camp Nkurunziza, qui affirme qu’elles se dérouleront dans "de très bonnes conditions", tous les acteurs de la crise et partenaires du Burundi estiment que ces élections, déjà reportées de 10 jours sous la pression internationale, ne peuvent se tenir dans les conditions actuelles et doivent être reportées.

La vice-présidente de la Commission électorale fuit à l’étranger

Dans la semaine, l’Église catholique et l’Union européenne avaient annoncé leur retrait du processus électoral. L’opposition avait jugé "impossible" la tenue des scrutins, appelant la communauté internationale à ne pas "cautionner" un "hold-up électoral" au risque d’"une prévisible guerre civile".

Vendredi, on apprenait la fuite à l’étranger de la vice-présidente de la Commission électorale, et la défection d’une autre commissaire sur les cinq que compte cette institution. Samedi, l’opposant Agathon Rwasa a de nouveau demandé un report des scrutins de vendredi prochain, y voyant une "mascarade".

Dans un communiqué, la société civile burundaise, en pointe dans la contestation, a redemandé samedi aux leaders régionaux d’"amener le président Nkurunziza à respecter les accords d’Arusha (qui ne prévoient que deux mandats) et la Constitution, et à renoncer au troisième mandat".

Elle les a également appelés à "réaménager le calendrier électoral" après consultation des "parties prenantes" et, nouveauté, à "dépêcher une force militaire d’intervention pour sécuriser la population, désarmer et démanteler la milice Imbonerakure", la ligue de jeunesse du parti présidentiel.

Pendant ce temps, à Bujumbura, la nuit a été marquée une nouvelle fois par de nombreux tirs, notamment dans les quartiers de Cibitoke, Nyakabiga et Musaga.

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