L’Afrique doit devenir un acteur du droit maritime international

Patrice Rembauville-Nicolle est avocat membre titulaire du Comité maritime international.

Patrice Rembauville-Nicolle, avocat. DR

Patrice Rembauville-Nicolle, avocat. DR

Publié le 27 décembre 2012 Lecture : 3 minutes.

Pour la première fois depuis qu’existe le Comité maritime international (CMI), sa conférence internationale – la quarantième du genre – s’est tenue en Chine, à Pékin, du 14 au 19 octobre, à l’invitation de l’Association chinoise de droit maritime. Impensable il y a une petite vingtaine d’années, cet événement constitue un nouvel indicateur du rôle de ce pays dans le concert international et, par le biais du droit, de sa place désormais éminente dans le monde du commerce et du transport maritimes – le CMI ayant pour objet d’élaborer et d’unifier le droit maritime international via les associations nationales.

Depuis plusieurs années, les conventions de droit maritime ne sont certes plus l’oeuvre du CMI, auquel se sont progressivement substitués des organismes tels que la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced) et plus encore l’Organisation maritime internationale (OMI). Cependant, le CMI, grâce à l’indiscutable compétence des membres des associations nationales de droit maritime qui le composent, a su conserver un rôle essentiel d’initiative et de conseil, qui lui vaut d’être quasi systématiquement consulté, notamment par l’OMI, à l’occasion de la négociation et de la rédaction des nouvelles conventions internationales.

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Si la Chine a su prendre la place qui lui revient, les pays africains ayant un accès à la mer ne semblent, quant à eux, pas encore avoir pris la mesure de cette impérieuse nécessité. Le Maroc et la Tunisie sont membres de longue date du CMI, mais parmi les pays d’Afrique subsaharienne le Comité ne compte dans ses rangs que le Nigeria et l’Afrique du Sud. Les candidatures du Cameroun, du Sénégal, du Kenya et de la République démocratique du Congo seraient toutefois envisagées. Exception faite de la Tunisie, tous ces pays africains, auxquels il faut ajouter le Ghana, étaient représentés à la conférence de Pékin.

Il serait dommageable que le continent ne s’organise pas pour défendre ses intérêts.

En un temps où se développent inexorablement le concept et la réalité de la « Chinafrique », il serait dommageable que le continent ne s’organise pas, peut-être sous l’égide ou l’impulsion des instances multinationales existantes, pour que soient créées dans tous les États concernés – tout au moins dans les pays côtiers – des associations nationales de droit maritime qui deviendront membres du CMI. De quoi permettre à chacun de ces pays, comme à l’Afrique dans son ensemble, de veiller au mieux à la protection de ses intérêts.

Il n’est pas trop tard. Les règles du commerce international et celles du droit maritime sont en constante évolution. Par conséquent, l’Afrique est tout à fait en situation d’entrer dans l’histoire du commerce et du droit maritimes et d’y jouer le rôle qui lui revient. Elle pourrait en saisir l’occasion en prenant une part active à la prochaine conférence internationale du CMI, qui se tiendra en 2016 à New York. Il lui faut pour cela s’organiser afin de constituer une sorte de bloc cohérent à même de servir les besoins et les intérêts communs et spécifiques du continent – même si chaque pays peut en outre avoir des intérêts propres, dictés par exemple par la géographie et la géopolitique, qui commandent les flux du commerce maritime.

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Dans cette perspective, on pourrait imaginer la tenue d’un sommet africain en vue de constituer – est-ce réaliste ? – un Comité maritime continental dont l’existence permettrait aux associations nationales de droit maritime de confronter leurs points de vue et de se concerter, ce qui n’exclurait pas que chacune d’entre elles adhère individuellement au CMI. Parmi les multiples angles d’approche, la création d’une entité regroupant les pays francophones, qui ont pour la plupart en commun un même système juridique, serait aussi envisageable. 

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