Shantayanan Devarajan : « Le défi, c’est de créer encore plus d’emplois »

Dans son enquête sur les économistes africains, Jeune Afrique a rencontré Shantayanan Devarajan, économiste en chef à la Banque mondiale, chargé de la zone Afrique. Il souligne l’importance du débat entre économistes africains et défend les prises de position de son institution.

Shantayanan Devarajan, économiste en chef à la Banque mondiale, chargé de la zone Afrique. © Shannon Jensen/JA

Shantayanan Devarajan, économiste en chef à la Banque mondiale, chargé de la zone Afrique. © Shannon Jensen/JA

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© Vincent Fournier pour JA

Publié le 6 décembre 2012 Lecture : 2 minutes.

Entré à la Banque mondiale en 1991, ancien directeur de la recherche en économie publique et ex-économiste en chef de la région Asie du Sud, Shantayanan Devarajan est à présent chargé de la zone Afrique.

Jeune Afrique : De manière générale, quelles sont les idées défendues par les économistes africains ?

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Shantayanan Devarajan : Aujourd’hui, ils s’accordent sur l’importance de la stabilité macroéconomique. Ce n’était pas le cas dans le passé. J’ai compris ce changement en 2008-2009, alors que la crise sévissait en Europe et aux États-Unis. Cependant, de manière plus structurelle, il y a encore quelques différences. Dambisa Moyo, par exemple, a un point de vue distinct du mien vis-à-vis de l’aide au développement. Mais ce débat est utile. De tels économistes jouent un rôle important en questionnant les hypothèses de leurs confrères plus traditionnels. Ils sont de plus en plus nombreux à agir ainsi. Ainsi en est-il du Malawite Thandika Mkandawire, qui appartient lui aussi à l’école dite des « structuralistes », dont le paradigme est plutôt indépendantiste et nationaliste. Je suis de ceux qui pensent que la plupart des problèmes des économies africaines sont internes. Il faut essayer de les résoudre de manière pragmatique. Je suis par exemple opposé à la subvention agricole européenne, mais que puis-je faire contre ? Le fait est qu’elle existe, et je dois donc composer avec… Il faut trouver la meilleure solution possible avec des outils de politique économique nationale.

Je ne connais aucun État qui veuille augmenter ses barrières tarifaires.

L’Afrique peut-elle vraiment penser son propre développement tout en coopérant avec la Banque mondiale ou le Fonds monétaire international, dont les politiques ont pourtant échoué sur le continent ?

Les programmes d’ajustement structurel ont été fortement critiqués, y compris en dehors de l’Afrique. Le problème n’était pas la politique en elle-même, mais les institutions qui l’avaient conçue. Ce qui est intéressant, c’est que les politiques économiques suivies après la période de ces ajustements structurels sont à peu près identiques. Et pourtant elles ont été imaginées et mises en oeuvre par les Africains eux-mêmes. Sans doute y a-t-il des nuances spécifiques à chaque pays. Par exemple, sur la libéralisation du commerce extérieur, je ne connais aucun État qui veuille augmenter ses barrières tarifaires.

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La « croissance inclusive » (qui crée de l’emploi durable) est le concept prôné actuellement sur le continent. Reconnaissez-vous qu’il s’agit là d’un aveu d’échec des politiques des institutions de Bretton Woods ?

Il y a plusieurs façons de lancer la croissance. Quand vous observez la plupart des pays africains, vous constatez qu’ils possèdent essentiellement des ressources naturelles. Et quand on dispose de telles réserves, il faut les exploiter. Nous avons donc commencé à créer de la richesse grâce à leur exportation et à la bonne tenue de leurs cours. Nous ne devons bien sûr pas en rester là. Parce que le défi, c’est de créer encore plus d’emplois.

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