Seetanah Lutchmeenaraidoo : « Maurice veut être un tremplin pour les investissements de l’Asie vers l’Afrique »

De la construction d’infrastructures à la lutte contre la corruption, le ministre expose son plan de bataille pour faire de Maurice un hub régional.

Seetanah Lutchmeenaraidoo, ministre mauricien des Finances. © DR

Seetanah Lutchmeenaraidoo, ministre mauricien des Finances. © DR

Publié le 31 mai 2015 Lecture : 3 minutes.

C’est un vieux routier qui est revenu au ministère mauricien des Finances en décembre dernier. Seetanah Lutchmeenaraidoo, qui occupait déjà ce poste entre 1983 et 1991 et fut l’un des artisans de la restructuration de l’économie de l’île, doit aujourd’hui faire face à de nombreux défis, du ralentissement du taux de croissance à un scandale bancaire qui menace la position de Maurice en tant que centre financier. Mais l’homme assure qu’un grand nettoyage du secteur est en cours et que d’importants projets d’investissements, notamment dans l’économie marine, vont permettre de relancer la machine mauricienne.

Jeune Afrique : En avril, le régulateur a révoqué la licence de Bramer Bank Corporation, détenu par le groupe mauricien British American Investment [BAI]. D’après le Premier ministre, Arenood Jugnauth, il existe des preuves de la mise en place d’une pyramide de Ponzi. Craignez-vous que ce scandale affecte la réputation de l’île Maurice?

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Seetanah Lutchmeenaraidoo : Un processus de nettoyage est en cours, et tout ce qui se passe sera porté à la connaissance du grand public. Un balai nous a été donné par le peuple,nous nettoyons donc aujourd’hui la maison de tout ce qui était illégal et immoral.Comme l’a déclaré le Premier ministre, les problèmes dans le domaine bancaire et l’effondrement du groupe BAI ont provoqué un choc au sein de la population. Mais cela ne menace pas le secteur.

Vous prévoyez de relancer l’économie nationale par le biais d’investissements massifs dans le port et grâce à une prétendue « économie de l’océan »… 

Vous ne pouvez pas devenir une économie concurrentielle si vous ne disposez pas d’infrastructures dignes de ce nom. Nous avons besoin d’au moins un port et un aéroport pour faciliter les mouvements des investisseurs locaux et internationaux. Actuellement, nous investissons non seulement dans l’extension du port mais aussi dans son développement, afin qu’il soit compatible avec notre ambition dans la région. Ainsi, le port deviendra un acteur clé du développement de notre économie.

Et au cours des cinq prochaines années, nous réaliserons des investissements sans précédent dans ses infrastructures. Nous sommes actuellement en négociation avec des investisseurs étrangers. Et nous avons un projet de plusieurs milliards de roupies qui comprend deux ports de pêche. Le plan directeur vise à faire de Port Louis une plaque tournante pour le soutage, les fruits de mer, les croisières et le pétrole. Et pourrait faire augmenter le PIB, avec une contribution à deux chiffres. Nous misons également sur les infrastructures aériennes. Nous souhaitons ouvrir davantage notre espace afin que de nouvelles compagnies puissent desservir le pays et la région, avec des vols plus réguliers.

Le secteur bancaire sera nettoyé, et tout sera porté à la connaissance du public.

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Vous misez notamment sur les petites et moyennes entreprises [PME] pour doper votre croissance économique. Quelle est précisément votre stratégie dans ce domaine?

Nos secteurs traditionnels connaissent un ralentissement en matière de croissance et d’investissement. Nous devons donc explorer de nouvelles pistes.Nous nous concentrons actuellement sur les PME. Nous lançons ainsi une banque qui leur est destinée, pour financer des projets sans demander de garanties. Un montant de 10 milliards de roupies  [250 millions d’euros] sera mis à la disposition de cette structure au cours des cinq prochaines années. Et un guichet unique fournira tout le soutien, le financement et l’information nécessaires aux entrepreneurs.

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Après avoir été le tremplin des investissements étrangers vers l’Asie, comment comptez-vous drainer des capitaux sur le continent africain?

Ce n’est pas une tâche facile. Mais nous souhaitons nous ouvrir davantage aux autres pays de la région, et rien n’est laissé au hasard. Nous sommes donc pleinement intégrés à l’Afrique en ce qui concerne les organisations régionales et internationales : nous sommes membre de la Communauté de développement d’Afrique australe [SADC], du Marché commun de l’Afrique orientale et australe ainsi que de l’Union africaine. Par ailleurs, nous travaillons très étroitement avec certains pays africains pour les aider à créer des zones économiques. Les discussions sont très avancées avec le Sénégal, le Ghana et Madagascar. Nous espérons développer une importante coopération avec ces trois pays. L’avenir est plein de défis, mais je suis convaincu que nous pouvons émerger en tant que hub régional.

Comment envisagez-vous de renforcer les liens économiques avec les pays de la SADC?

Nous ne sommes pas en concurrence avec d’autres destinations – surtout pas avec l’Afrique du Sud –,mais notre grande ambition est que Maurice devienne un point central dans la région. Comment y parvenir ? En ouvrant davantage notre économie, en faisant de notre île une plaque tournante régionale pour les entreprises et un véritable tremplin pour les affaires, de l’Asie vers l’Afrique.

Propos recueillis à Port Louis par CRYSTAL ORDERSON (The Africa Report). 

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