Mali – Sidi Brahim Ould Sidati : « Nous voulons des portefeuilles-clés » au sein du gouvernement

Le 20 juin à Bamako, Sidi Ibrahim Ould Sidatti signait au nom de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) l’accord de paix et de réconciliation d’Alger avec le gouvernement malien. Celui qui est par ailleurs secrétaire général du Mouvement arabe de l’Azawad (MAA) a rencontré « Jeune Afrique » dans sa suite de l’hôtel Radisson, où il tient de nombreuses consultations, pour évoquer l’avenir. Interview.

Sidi Brahim Ould Sidati, représentant de la Coordination des mouvements de l’Azawad, signant l’accord de paix d’Alger au Mali, le 20 juin 2015. © Habibou Kouyaté/AFP

Sidi Brahim Ould Sidati, représentant de la Coordination des mouvements de l’Azawad, signant l’accord de paix d’Alger au Mali, le 20 juin 2015. © Habibou Kouyaté/AFP

Publié le 30 juin 2015 Lecture : 3 minutes.

Jeune Afrique : Après la signature de l’accord d’Alger à Bamako, le 20 juin, la confiance est-elle de retour entre les parties ?

Sidi Brahim Ould Sidati : Notre problème majeur, c’est le manque de confiance les uns envers les autres. Or les séquelles de tous les accords passés sont telles qu’il n’y a plus de confiance. Les acteurs doivent désormais rassurer la population en respectant toutes les closes de l’accord.

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Certains de vos membres, sur le terrain et en Europe, ont manifesté leur opposition à la signature de l’accord…

Normal ! L’accord en tant que tel ne prend pas en compte toute nos revendications. Mais je pense qu’il y a un compromis intéressant, surtout au sujet des derniers amendements signés [qui concernent les « arrangements sécuritaires », avec notamment le retrait du Gatia de Menaka, NDLR]. Il y a eu des efforts de part et d’autre afin que cet accord soit acceptable par tous. S’il est appliqué à la lettre, je suis convaincu que ceux qui y sont opposés aujourd’hui nous rejoindront.

Et si l’accord n’est pas « appliqué à la lettre » ?…

Dans ce cas, les rangs des contestataires vont certainement s’étoffer et cela peut même compromettre l’application de l’accord. Par exemple, il ressort des arrangements sécuritaires que la sécurisation de la ville de Ménaka revient à l’ONU. Mais les Équipes mixtes d’observation et de vérification (Emov) qui étaient censées aller vérifier ce qui se passe là-bas ne sont toujours pas parties. Il faut rapidement trouver une solution.

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À Bamako, des rumeurs font état d’un éventuel remaniement ministériel ouvert à la CMA…

C’est prévu par l’accord, notamment dans les arrangements sécuritaires signés à Alger. Nous tenons à ce que les choses soient transparentes, dans le cadre d’un partage réel du pouvoir et cela à tous les niveaux. Nous voulons des portefeuilles-clés comme ceux de la Sécurité intérieure, de la Défense, ou encore des Finances et des Affaires étrangères. Nous attendons aussi l’ouverture de postes au sein des services nationaux et régionaux ou encore des représentations diplomatiques à l’étranger.

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Certains membres importants au sein de la CMA disent en off que l’Algérie n’est pas vraiment neutre comme chef de file de la médiation. Qu’en pensez-vous ?

Des erreurs ont été commises, comme par exemple le fait de parapher l’accord avant même que toutes les parties en conflit n’acceptent le document final, cela a été source de tensions. Mais en général, les décisions prises dans le cadre de la médiation ont été consensuelles. Donc le fait d’accuser l’Algérie ou un autre membre de la médiation, c’est de la dramatisation inutile.

L’ouverture de la médiation aux États-Unis a-t-elle été déterminante ?

La hausse de l’insécurité, la prolifération des groupes jihadistes et la peur de l’échec du processus d’Alger ont amené les États-Unis à rejoindre les membres de la médiation. C’est clair que cette arrivée sur la scène politique a donné beaucoup de confiance aux parties en discussion. Ça montre aussi que les choses seront plus sérieuses que par le passé. C’est la première fois que nous avions une médiation élargie à la France et aux États-Unis.

Jean-Yves Le Drian, ministre français de la Défense, a déclaré que la France allait aider le Mali à la mise en œuvre de l’accord. Il a même effectué une visite au Mali après la signature de l’accord…

À la CMA on voit cette visite sous deux angles. Le premier est politique, car la France veut que les uns et les autres avancent dans l’application de l’accord. Le second est pratique. La France a beaucoup de soldats sur le terrain, et ses forces peuvent constituer un élément de pression pour que chacun respecte ses engagements. La force française sur le terrain pourra aussi couper le souffle aux opposants à l’application de l’accord de paix, qu’ils soient terroristes ou non.

À la suite de votre demande, le gouvernement malien a levé les mandats d’arrêt contre certains de vos leaders, parmi lesquels vous-même. Cela a été condamné par des ONG de défense des droits de l’homme comme HRW ou encore la FIDH…

La CMA avait demandé à ce que la signature de l’accord se fasse à Tombouctou. Finalement, c’est Bamako qui a été choisi. Nous avons dit que dans ce cas, on ne se sentirait pas en sécurité à cause des mandats d’arrêt en cours. La liste que nous avons donnée ne concerne que les membres de la CMA, le nom d’Iyad Ag Ghali n’y était pas. Je rassure les ONG : au cours de l’application de l’accord, la justice travaillera sur les droits de l’homme et si un membre de la CMA se trouve concerné, il répondra devant la justice, dans un cadre légal et transparent.

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