Burundi – Abdoulaye Bathily : « Je n’ai pas de démission à poser ! »

Le médiateur de l’ONU au Burundi, le Sénégalais Abdoulaye Bathily, n’a pas l’intention de céder à la demande du parti au pouvoir, le CNDD-FDD, qui a réclamé sa démission dimanche. Pour lui, son mandat est déjà terminé et il appelle maintenant les chefs d’États africains à prendre leurs responsabilités. Interview.

Abdoulaye Bathily, représentant du secrétaire général de l’ONU pour l’Afrique centrale. © Nations unies/DR

Abdoulaye Bathily, représentant du secrétaire général de l’ONU pour l’Afrique centrale. © Nations unies/DR

Publié le 6 juillet 2015 Lecture : 2 minutes.

Jeune Afrique : Le parti au pouvoir au Burundi, le CNDD-FDD, a réclamé dimanche votre démission, comment avez-vous réagi ?

Abdoulaye Bathily : J’ai été surpris car cette demande n’est pas logique. Déployé au Burundi par les Nations unies comme leur représentant dans l’équipe de facilitation afin de dénouer la crise, mon mandat est déjà terminé. J’ai même déposé mon rapport en préconisant le report des élections. Le gouvernement est venu à une seule rencontre tandis que le parti au pouvoir ne s’est jamais intéressé au dialogue préférant poursuivre sa campagne électorale.

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Le parti au pouvoir vous reprochait de ne pas vous être manifesté dès votre arrivée auprès des plus hautes autorités du Burundi et d’avoir privilégié l’opposition. Considérez-vous avoir fait les démarches nécessaires en tant que médiateur de l’ONU ?

Ce sont des reproches qui n’ont aucun sens. Lors de ma nomination, une note a été envoyée directement à la représentation permanente du Burundi à l’ONU et le ministre des Affaires étrangères l’a reçue avant que j’en sois informé moi-même ! Quand je suis arrivé au Burundi, nous avons mis en place un programme de travail en collaboration avec l’Union africaine, la Communauté des États de l’Afrique de l’est et la Conférence internationale des Grands Lacs. Ce n’était pas à moi d’aller rencontrer les autorités et notre équipe qui a fait les démarches avant que j’arrive. Alors, je n’ai pas de démission à poser ! Nous sommes face à un exercice du parti au pouvoir tout à fait futile.

Vous aviez été nommé en remplacement de Saïd Djinnit, lui-même poussé vers la sortie par l’opposition. Le Burundi est-il dans l’impasse ?

Nous souhaitons que les chefs d’États s’investissent personnellement dans cette affaire en raison de sa gravité. Le Burundi glisse actuellement dans le chaos. La situation sécuritaire se dégrade à vue d’oeil. Près 140 000 personnes sont réfugiées dans les pays voisins. L’armée est divisée. Il y a des fissures très nettes à l’intérieur du parti au pouvoir. Le président de l’Assemblée nationale a trouvé refuge en Belgique en disant qu’il a eu peur pour sa vie. Le deuxième vice-président, membre du parti au pouvoir, a aussi fui à l’étranger. Ce pays est en réel danger !

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Que pensez-vous de la décision de la Communauté est-africaine de demander un report des élections au 30 juillet 2015, comme vous l’aviez vous-même recommandé dans votre rapport ? Quid de la nomination du président ougandais Yoweri Museveni à la tête de la médiation ?

J’ai participé au huis clos au Sommet à Dar es Saalam (Tanzanie) et j’espère que Yoweri Museveni réussira. On doit reporter les élections mais aussi désarmer les milices qui sèment la terreur dans le pays. Sans ces conditions, nous ne pouvons tenir des élections libres, démocratiques et transparentes. Si l’on veut des solutions africaines aux problèmes africains, il faut prendre ses responsabilités. Les populations sont en train de payer très cher ces luttes violentes pour la conservation du pouvoir. Le monde entier interpelle le président Nkurunziza et son parti. Il faut tourner cette page sombre de l’histoire africaine !

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