Dossier formation : quelles sont les meilleures écoles de commerce africaines ?

La croissance économique du continent et les besoins en cadres locaux plaident pour l’amélioration du niveau des écoles de commerce africaines. Lentement mais sûrement, celles-ci se rapprochent des standards internationaux.

Les étudiants du MDI, à Alger, peuvent bénéficier d’un double diplôme avec l’IAE Lille ou l’Edhec Business School. © Omar Sefouane/JA

Les étudiants du MDI, à Alger, peuvent bénéficier d’un double diplôme avec l’IAE Lille ou l’Edhec Business School. © Omar Sefouane/JA

Publié le 10 novembre 2012 Lecture : 6 minutes.

Si les établissements d’Afrique francophone sont les grands absents des classements internationaux, ils se rapprochent tout de même progressivement de leurs homologues occidentaux. Toujours plus de certifications, d’ouverture à l’international et de liens avec les entreprises. Créées pour les plus anciennes il y a une vingtaine d’années, les écoles africaines avancent leurs pions, et les établissements maghrébins et sénégalais affichent une longueur d’avance, comme en témoigne notre classement. Le palmarès 2012 de Jeune Afrique a été réalisé à partir des données recueillies auprès de dix-huit établissements francophones sur la quarantaine ciblée. Pour cette quatrième édition, chacun a reçu un questionnaire comprenant trente questions allant du coût des études au nombre d’ouvrages disponibles dans la bibliothèque, en passant par les partenariats avec d’autres écoles et avec les entreprises, par la qualification des enseignants, etc. Loin de prétendre à l’exhaustivité, cette enquête s’est focalisée sur le programme « grande école » – programme phare des business schools – en formation initiale.

Les établissements maghrébins et sénégalais affichent une longueur d’avance.

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Ces dernières années, les écoles de commerce occidentales se sont davantage intéressées à l’Afrique et certaines d’entre elles sont même allées jusqu’à mettre en place leur propre campus. « Les formations en business sont celles qui connaissent la plus forte croissance parmi les activités académiques en Afrique subsaharienne », relevait déjà fin 2010 Guy Pfefferman, le PDG du réseau Global Business School. De fait, le potentiel est réel face à l’énorme demande non satisfaite. Ce qu’a bien compris Bordeaux École de management (BEM) en implantant une filiale à Dakar en 2008, suivie l’année suivante par Euromed Management, qui a créé son propre campus à Marrakech, et par l’université Paris-Dauphine, qui en 2009 a ouvert son institut à Tunis. « Nous sommes très sollicités par ailleurs, notamment au Maroc et au Sénégal, mais pour l’instant nous nous concentrons sur la Tunisie », précise Sébastien Duizabo, directeur de la formation continue à l’université Paris-Dauphine.

Accréditations

Les business schools non affiliées à une école occidentale misent sur les labels pour gagner en visibilité. Parmi les accréditations, certaines sont particulièrement prisées car elles attestent que l’établissement répond à un certain nombre de standards internationaux. C’est le cas notamment de l’accréditation américaine accordée par l’Association to Advance Collegiate Schools of Business (AACSB) et des labels européens tels qu’Equis (la référence, qui s’applique à un établissement) et Epas (qui ne vise qu’un programme), délivrés par la European Foundation for Management Development (EFMD). BEM Dakar, qui peut revendiquer la double accréditation grâce à sa maison mère, fait figure d’exception côté francophone. Au Maghreb, l’École supérieure du commerce et des affaires (Esca) peut prétendre, depuis cette année, aux systèmes d’accréditation européen et américain. « Une grande première pour la région et une vraie reconnaissance pour nous », se réjouit Thami Ghorfi, son président. Pour les écoles subsahariennes, d’autres certifications continentales font également référence sur le plan régional comme le Conseil africain et malgache pour l’enseignement supérieur ou le fait d’être labellisé « centre d’excellence UEMOA » (Union économique et monétaire ouest-africaine).

Sur le campus de l'Institut supérieur de management (ISM), à Dakar. © Sylvain Cherkaoui/JADouble diplôme

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Côté pédagogie, le nombre de professeurs permanents et la proportion d’entre eux qui détient un doctorat (PhD) sont un bon indicateur du niveau d’exigence pédagogique de l’école. À l’Esca, leur nombre est passé en un an de 36 à 53. Mais c’est BEM Dakar qui affiche la hausse la plus spectaculaire en la matière, bondissant de 30 à 73 enseignants permanents, avec un taux de PhD en progression, de 50 % à 74 % en un an. Au-delà des labels et de son corps enseignant, la valeur d’une école tient aussi à la qualité de ses partenaires académiques, gage d’une expertise pédagogique supplémentaire. Ces associations académiques sont susceptibles d’aboutir à la mise en place de diplômes communs – tous les étudiants en master à l’École supérieure algérienne des affaires (Esaa) bénéficient par exemple d’un double diplôme. Les étudiants en master au Management Development International Institute (MDI), en Algérie, peuvent également obtenir un double diplôme. De quoi accorder davantage de crédit à des filières souvent méconnues par les multinationales.

Internationalisation

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Le rapprochement avec des établissements étrangers s’inscrit aussi dans une logique de mobilité étudiante. À l’Esca ou à l’Institut africain de management (IAM), il est ainsi possible de suivre un semestre dans une université anglophone grâce aux accords avec les institutions partenaires. Sur fond de mondialisation, l’exigence de parler anglais revêt à l’évidence une importance toute particulière. À l’Esaa, à l’Esca ou à BEM Dakar, la totalité des étudiants passe le Toeic (axé sur la maîtrise de l’anglais professionnel), un prérequis pour décrocher son diplôme. De son côté, depuis 2011, Sup de Co Dakar dispense son enseignement de master 2 dans la langue de Shakespeare exclusivement. « Le tiers des étudiants suit des programmes entièrement en anglais », souligne Aboubacar Sédikhe Sy, son PDG. À l’Esca, à partir du master 1, 30 % à 100 % des cours sont dispensés en anglais selon la spécialisation.

Les écoles côté finances

Si la plupart des frais d’inscription demeurent stables d’une année sur l’autre – c’est le cas pour le MDI, BEM Dakar, l’ISM et le Cesag -, ils affichent une nette augmentation à l’Esca, où ils sont passés de 3 875 à 4 300 euros en master 1 en un an, et à l’Esaa, où ils ont bondi de 4 125 à 4 500 euros dans le même laps de temps. À l’inverse, à l’ESC Tunis et à l’Essec Douala, les tickets d’entrée se limitent respectivement à 54 et 76 euros. Côté salaires, la fourchette est plutôt large. Au Maghreb, les rémunérations pour une première embauche varieraient entre 320 euros (ESC Tunis) et 900 euros (Esca). Et en Afrique subsaharienne, les émoluments mensuels oscilleraient entre 450 euros (IAM) et 850 euros (BEM Dakar). Dans les trois autres écoles sénégalaises, ils avoisineraient les 600 euros. Au Cameroun, le premier salaire pour les diplômés de l’Essec Douala atteindrait 380 euros. F.R.

Autre indice de cette ouverture internationale : la proportion d’étudiants étrangers dans les effectifs – Sup de Co Dakar en compte 45 %, pour 27 nationalités. Afin de renforcer les partenariats Sud-Sud, l’Esca, en accord avec Grenoble École de management (GEM), a créé l’Institut euro-africain de management (Inseam), qui recrute depuis cette année une vingtaine d’étudiants dans un réseau d’une dizaine d’écoles de commerce subsahariennes afin de leur permettre de préparer un master en management général à Casablanca.

Mise en pratique

Incontournables en master, les stages en entreprise durent de deux à six mois selon les écoles. La présence au sein du corps enseignant de professionnels n’est pas non plus négligeable. Ils sont ainsi plus de 70 % à Sup de Co Dakar, 75 % au Centre africain d’études supérieures en gestion (Cesag) et 80 % à l’IAM. Afin d’ancrer leurs enseignements dans la pratique, les écoles rivalisent d’initiatives : forums de recrutement, « Job Days », visites dans des pépinières d’entreprises… L’IAM Dakar fait même appel à un cabinet de recrutement pour optimiser ses placements et organiser des séances de speed dating. Pour leur mettre le pied à l’étrier, les junior-entreprises permettent à des groupes d’élèves d’effectuer des travaux rémunérés pour leurs clients. Quant aux incubateurs de projets, ils accompagnent les diplômés dans la création de leur société.

Une autre tendance nette se dessine : la mise en avant de l’entrepreneuriat. L’Esca a ouvert en 2012 un master « entrepreneuriat et développement international » et le parcours « grande école » comprend un cours de création d’entreprise. L’ESC Tunis a quant à elle introduit des modules « culture entrepreneuriale » et « création d’entreprise » dans toutes ses filières. En Algérie, le MDI propose une spécialisation dans le domaine en master 2. De fait, le développement d’une culture d’entrepreneuriat, encore balbutiante sur le continent, figure parmi les principaux défis que les business schools africaines devront relever.

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Méthodologie du classement

Ce palmarès a été réalisé à partir des réponses des écoles à notre questionnaire. Notoriété, ouverture à l’international, pédagogie, liens avec les entreprises : quatre thèmes ont été retenus pour un total de trente questions.

À noter, ce classement panafricain ne tient pas compte de critères tels que la rémunération ou le taux d’insertion six mois après l’obtention du diplôme – la première devant être resituée dans le niveau de vie du pays et le taux d’insertion déclaré avoisinant presque toujours les 90 % à six mois. Signalons également l’absence, dans cette édition, de quelques poids lourds tels que le groupe HEM et Al Akhawayn, au Maroc, ou encore la Mediterranean School of Business, en Tunisie, qui n’ont pas souhaité participer à notre enquête ou qui n’y ont pas répondu à temps.

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