Burundi : Nkurunziza, en campagne, se pose en garant de la paix

Accusé de mener le Burundi à la violence en s’entêtant à briguer un troisième mandat qui selon ses adversaires viole la Constitution, le président Pierre Nkurunziza, en campagne pour la présidentielle du 21 juillet, se pose au contraire en seul garant de la paix dans un pays meurtri.

Pierre Nkurunziza, lors de sa campagne électorale à Bujumbura, le 26 juin 2015. © Landry Nshimiye/AFP

Pierre Nkurunziza, lors de sa campagne électorale à Bujumbura, le 26 juin 2015. © Landry Nshimiye/AFP

Publié le 18 juillet 2015 Lecture : 3 minutes.

Pour ses ultimes meetings de campagne avant la présidentielle prévue mardi, Pierre Nkurunziza, élu en 2005 et réélu en 2010, s’est rendu vendredi dans deux provinces du nord du pays, théâtres ces derniers jours de combats entre l’armée et des combattants d’un groupe armé. Il s’est plu à balayer implicitement toutes les critiques de ses opposants qui l’accusent d’autoritarisme et d’aveuglement coupable.

« Depuis l’élection du CNDD-FDD (son parti) en 2005, c’est la première fois depuis l’indépendance (en 1962) que les gens ne s’entretuent pas pour des raisons ethniques », souligne M. Nkurunziza, à Ndora, à une centaine de km au nord de Bujumbura dans la province de Cibitoke, frontalière du Rwanda et de la République démocratique du Congo.

Si vous me choisissez, vous êtes assurés d’avoir paix durant les cinq ans à venir.

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L’histoire post-coloniale du Burundi est jalonnée de massacres communautaires et reste traumatisé par la guerre civile qui a opposé entre 1993 et 2006 l’armée alors dominée par la minorité tutsi et des rébellions hutues – parmi lesquelles le CNDD-FDD -, faisant 300.000 morts.

« Si vous choisissez le (candidat du) CNDD-FDD vous êtes assurés d’avoir paix durant les cinq ans à venir », promet-il à la foule de 1.500 à 2.000 personnes, rassemblée sous un soleil de plomb au sommet d’une des multiples collines escarpées qui constituent le paysage de cette région rurale, parsemée de modestes hameaux.

Ses opposants accusent pourtant M. Nkurunziza d’avoir déclenché la crise, émaillée de violences, qui agitent le Burundi en officialisant fin avril sa candidature à un troisième mandat, contraire selon eux à la Constitution et à l’Accord d’Arusha, dont la signature en 2000 a permis la fin de la guerre civile, en consacrant un subtil équilibre politico-ethnique au sein des institutions.

La contestation née fin avril a été marquée par des manifestations quasi-quotidiennes durant un mois et demi, concentrée surtout à Bujumbura et brutalement réprimées, d’une tentative ratée de coup d’Etat militaire à la mi-mai, et plus récemment d’attaques à la grenades avant les récents combats dans le nord.

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« Il va gagner, c’est sûr » 

Perché sur le camion-sono qui le suit dans tous ses meetings, M. Nkurunziza, polo et casquettes blanches aux armes du CNDD-FDD, lunettes de soleil sur le nez, se présente pourtant – sans le nommer – en garant d’Arusha: « depuis l’Accord global de cessez-le-feu, pour la première fois l’armée est composée de toutes les ethnies et toutes les couches sociales ».

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« Depuis que l’armée est équilibrée, toutes les tentatives de groupes qui ont tenté de déstabiliser le Burundi ont échoué », poursuit-il, en référence implicite à la crise actuelle.

Aux opposants et journalistes qui l’accusent d’autoritarisme, se disent victimes d’intimidations et de menaces et rappellent que les médias privés n’émettent plus depuis la mi-mai, il rétorque: « depuis que le CNDD-FDD est au pouvoir, vous pouvez choisir vos dirigeants, (du chef) de la colline jusqu’au président » du pays.

« Vous pouvez choisir des dirigeants qui finissent leurs mandats (…) avant, les dirigeants choisis par le peuple étaient renversés ou tués », souligne-t-il en référence aux coups d’Etat et assassinats de dirigeants qui jalonnent l’histoire du pays.

Le président-candidat multiplie pour finir les promesses d’infrastructures pour la région – routes, université, écoles professionnelles, hôpital et électrification grâce à « la construction de cinq barrages » – bien que les principaux bailleurs aient gelé une partie de leur aide et menacé, comme l’Union européenne, principal partenaire du pays, de cesser sa coopération s’il persistait à briguer un nouveau mandat.

« Je vais tout faire pour que le Burundi ne soit plus sur la liste des pays pauvres en 2020 » quand se terminera cet éventuel nouveau mandat, a affirmé M. Nkurunziza, alors que le Burundi végète parmi les dix derniers pays du monde en terme de développement et dépend très largement de l’aide extérieure.

« Avec la paix on va pouvoir extraire les minerais (…) multiplier par deux la production agricole (…) augmenter l’adduction en eau potable de 30% », assure le président.

Quand il lance enfin, « alors, qui va voter pour le CNDD-FDD? Levez les mains! », toutes les mains se lèvent.

Le 21 juillet, « il va gagner, c’est sûr », se réjouit Edouard, habitant de Ndora et chômeur de 36 ans. La polémique sur 3e mandat? « ça concerne les politiciens, nous ça ne nous regarde pas », évacue-t-il dans un sourire gêné.

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